Intervention de Alfred Marie-Jeanne

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 10 juin 2020 : 1ère réunion
Entretien avec m. alfred marie-jeanne président du conseil exécutif de la collectivité territoriale de la martinique

Alfred Marie-Jeanne, président du conseil exécutif de la collectivité de Martinique :

Je vous remercie, Monsieur le président. Je crois que nous sommes déjà entrés dans le vif du sujet et je pense que vous connaissez mes positions - qui ne datent pas d'aujourd'hui.

D'une manière générale, la recentralisation n'est pour moi pas envisageable dans quelque domaine que ce soit. Je m'inscris donc contre la tendance actuelle du Gouvernement à recentraliser. Nous sommes en effet des laboratoires, qui avons avancé sur le chemin de la décentralisation, et nous devons y rester. Il faut plutôt permettre des adaptations appropriées à chaque territoire.

En dépit de nos excellentes relations avec la Guadeloupe, la Polynésie française, La Réunion et toutes les autres collectivités d'outre-mer, nous ne pouvons pas dire que nos réalités sont identiques. Le souhait de la Martinique peut ne pas correspondre à celui de la Guadeloupe, idem pour la Guyane, etc. J'insiste sur la nécessité d'une adaptation appropriée à nos situations et laissée à notre choix.

Je tiens à rappeler que le champ de décision des préfets me semble trop large à certains égards. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de m'en ouvrir au Président de la République et au préfet de la Martinique lui-même. Les préfets sont nommés, alors que le président du conseil exécutif de la collectivité a été élu. Je considère dès lors que la démocratie est ce qui nous sépare en dépit de tout le respect que j'ai pour les préfets. Je plaide donc pour un travail en harmonie avec la collectivité afin de susciter l'adhésion. Or il m'est arrivé d'avoir à déplorer que ce ne soit pas toujours le cas. Je suis favorable à ce que les décisions soient prises avec davantage de concertation entre les services déconcentrés et l'assemblée territoriale qui doivent travailler « main dans la main » au service du territoire.

Les outre-mer contribuent au rayonnement de la France, il est temps de les voir comme un apport essentiel et pas seulement comme un coût. Cela fera, j'en suis convaincu, de la France un État plus fort, au niveau international.

Une autre de mes convictions est que l'élection confère la légitimité pour adapter la législation chemin faisant. En revanche, aucune modification de portée institutionnelle ou statutaire ne peut avoir lieu sans consultation de la population et l'évolution pour chaque collectivité doit être « à la carte ».

La fusion des articles 73 et 74 est une proposition que je partage, car elle peut être une solution pour approfondir les compétences locales. Ce serait de plus une mesure de simplification permettant à chaque territoire de décider d'aller plus avant dans son évolution statutaire s'il le souhaite. L'enjeu est celui de l'adaptation et non de la dilution.

L'organisation spécifique dont nous disposons doit être améliorée pour permettre au territoire d'avancer davantage vers son développement. Prenons l'exemple de l'octroi de mer qui subit actuellement des assauts débridés. Il s'agit d'un dispositif historique qui remonte à Mathusalem tant il est en vigueur depuis longtemps ! Ce droit d'octroi de mer avait initialement été instauré pour protéger les intérêts de l'État. Il a par la suite évolué pour devenir à la fois une ressource pour les collectivités et un mécanisme de développement endogène. Remettre en cause cette taxe s'apparenterait à un coup mortel.

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