Intervention de René-Paul Savary

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 15 septembre 2020 à 15h00
Audition du professeur didier raoult directeur de l'institut hospitalo-universitaire en maladies infectieuses de marseille

Photo de René-Paul SavaryRené-Paul Savary, président :

Vous insistez sur la vitesse de mutation du virus. Or, lors des auditions de ce matin, on nous a affirmé que ce virus ne mutait pas.

Pr Didier Raoult. - Nos équipes font énormément de séquences ; elles en font sans doute plus que n'importe qui, si bien qu'elles travaillent même le week-end. Plus de 500 séquences de virus ont été réalisées depuis juillet dernier, car nous étions étonnés des formes que prenaient alors les cas cliniques et l'épidémie elle-même.

Dès le départ, on a trouvé un mutant, que nous avons appelé Marseille, présentant vingt-trois mutations par rapport à la souche de Wuhan, et nous avons tracé sa source : il est venu du Maghreb par bateau avant de se diffuser dans l'environnement. On a répertorié 100 cas de ce virus, qui a à peu près disparu depuis le mois d'août. Aujourd'hui, on dénombre sept mutants : le plus actif actuellement est le « quatre », pour lequel nous avons répertorié 60 cas. Je viens de publier ces données en ligne.

Il faut observer le degré de variation du virus par rapport à la souche initiale. Depuis juillet dernier, la variabilité des virus a été multipliée par dix par rapport aux virus observés jusqu'en mai. Il existe quatre bases génétiques, ATGC pour l'ADN et AUGC pour les virus ARN. Normalement, la dégradation de C vers U est réparée, car la plupart du temps elle est délétère. Majoritairement, on constate une mutation de T vers U. Elle traduit, soit l'effet d'une enzyme bien connue chez les humains, qui s'appelle Apobec et qui a l'habitude de couper les virus.

En parallèle, on a comparé 100 cas à partir de juillet et 100 cas auparavant, pour mesurer le degré des troubles de coagulation. Ces derniers sont beaucoup moins nombreux et moins sévères depuis juillet, et la mortalité est plus faible. J'ai téléphoné au conseiller du ministre, Antoine Tesnière, pour lui communiquer ces données. Je lui téléphone d'ailleurs chaque semaine pour mettre les résultats de nos travaux à la disposition du ministère, de manière tout à fait démocratique. Je les mets d'ailleurs à la disposition de la planète entière.

100 cas comparés, avant et après le mois de juillet, est-ce suffisant pour affirmer que le virus mute ?

Pr Didier Raoult. - La mutation, c'est une autre question : on la constate dans le virus lui-même. Nous avons fait 500 séquences de génomes viraux et nous avons observé le changement de base en juillet et en août. Nous avons constaté, avec d'autres, que l'on pouvait séquencer directement les virus sans les cultiver. Dans la pratique, pour tous les virus présentant moins de 20 CT, on peut disposer du génome entier dans les huit heures qui suivent. Je vous renvoie à notre papier, publié sur notre site.

Nous le lirons bien sûr avec beaucoup d'intérêt.

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