Intervention de Catherine Deroche

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 17 septembre 2020 à 11:5
Table ronde d'anciens directeurs généraux de la santé

Photo de Catherine DerocheCatherine Deroche, rapporteure :

Je reviens sur les plans blancs. On me dit que nous sommes prêts, que si déprogrammation il y a, elle sera plus ciblée. On me dit aussi que, dans certains établissements, faute de personnel, tous les lits ne sont pas rouverts.

Dr Jean-Yves Grall. - Nous avons effectivement un problème de mobilisation des professionnels dans le sanitaire et le médico-social. Les étudiants, qui aidaient beaucoup, ont fait leur rentrée... C'est un sujet d'inquiétude, que nous surveillons.

Pr Benoît Vallet. - Quelques éléments sur la pratique d'exercices. L'exercice « pandémie » de novembre 2013, qui s'est tenu alors que je venais d'être nommé DGS, a été riche d'enseignements pour moi. Il consistait essentiellement en un passage de témoin entre le ministère de la santé et le centre de crise national, à Beauvau. Le ministère de la santé passait la main, donc la responsabilité de la gestion de crise - ce que nous n'avons pas observé de manière évidente lors du déconfinement.

J'ai aussi vécu un exercice visant à préparer les établissements en cas d'attentats. À la suite des attentats, nous avons amélioré les stocks tactiques et la prise en charge des victimes, notamment pédiatriques, sur le terrain. L'exercice en réel mené à Bordeaux avec Mme Touraine et M. Cazeneuve a souligné le risque de débordement des établissements ; nous avions donc imaginé à l'époque, sur la proposition du Professeur Carli, les TGV d'évacuation de victimes, qui se sont matérialisés lors de la crise Covid.

Les retours d'expérience permettent de trouver des solutions. L'exercice mené au cours de la préparation de l'Euro 2016, toujours dans l'hypothèse d'un attentat, a été utile au CHU de Nice quand il a dû hélas ! accueillir les victimes, notamment pédiatriques, du 14 juillet 2016. Ces exercices sont indispensables, ils renseignent sur les conséquences de l'amélioration des prises en charge et préparent le dispositif de santé.

L'exercice « plan blanc » est très important ; ce fut mon premier exercice en tant que président de la commission médicale d'établissement. Ces exercices sont à encourager, même si la traçabilité n'est pas toujours aisée.

À quel moment le ministre est-il informé ? Le DGS informe son ministre très fréquemment, plusieurs fois par semaine. Les alertes sanitaires ne sont pas toujours portées à la connaissance du grand public, et n'atteignent pas forcément la dangerosité imaginée - heureusement ! Le premier interlocuteur du DGS est le directeur de cabinet du ministre, qui est chargé d'articuler la relation avec le ministre. Pour ma part, j'étais très régulièrement dans le bureau de Mme Touraine pour du reporting sur différents sujets.

Un mot enfin sur l'Europe. J'ai vécu la coordination européenne lors de la crise d'Ebola ; nos ressortissants de retour d'Afrique étaient distribués par le Health Security Committee entre les pays européens qui avaient les moyens d'accueil et l'équipement adapté. Le mécanisme de coordination européenne s'était révélé compliqué à mettre en place, il le reste aujourd'hui. Il y a un gros effort à faire au niveau de l'agence européenne de surveillance épidémiologique et du mécanisme de contrôle d'organisations européennes comme le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies.

Comment transfère-t-on le savoir accumulé lors d'une crise sur la crise suivante ? Nous avions observé, lors des attentats de Nice, que la présence sur place d'un collaborateur du centre de crise apportait des enseignements plus intéressants que le simple reporting. Nous avons donc jugé indispensable de disposer d'une confrérie de centres de crise nationaux, avec un point focal sur chaque ARS qui reproduise l'organisation de surveillance et d'alerte. Il est important que le niveau national et les régions sachent travailler ensemble et se comprennent ; cela suppose de se déplacer. Nous avons ainsi apporté une mission d'appui à chaque ARS en 2018 et 2019, puis aux outre-mer, pour partager l'expertise.

Le règlement sanitaire international propose une montée en puissance de l'alerte, avec la possibilité d'envoyer des missions sur place - ce n'est sans doute pas facile à organiser dans le contexte international - pour avoir l'appréciation la plus précise possible.

Dr Jean-Yves Grall. - Dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, la baisse de la contribution de l'assurance maladie à l'Éprus - soit une perte de 3 ou 5 millions sur un budget de 50 millions d'euros - a considérablement freiné la constitution de stocks.

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