Intervention de Yann-Gaël Amghar

Commission des affaires sociales — Réunion du 21 octobre 2020 à 8h35
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 — Audition de Mm. Jean-Eudes Tesson et yann-gaël amghar président du conseil d'administration et directeur de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale acossen visioconférence

Yann-Gaël Amghar, directeur de l'Acoss :

Contrairement à l'Insee, nous ne sommes pas en mesure de faire des prévisions relatives à la masse salariale sur plusieurs années. En revanche, nous pouvons constater de manière très avancée ses évolutions à court terme.

La prévision de masse salariale sous-jacente au PLFSS pour 2021 a été établie par le ministère des comptes publics en liaison avec nous ; dans le cadre d'échanges techniques, nous avons confronté les anticipations, nos constats et les autres indicateurs dont dispose le ministère. Nous sommes donc totalement en phase avec cette prévision.

L'histoire récente a montré combien il est difficile d'anticiper les évolutions de la masse salariale dans un contexte volatile - et, bien entendu, tributaire des mesures restrictions sanitaires. Les trois lois de finances rectificative ont révisé la prévision de façon significative. Souvent, en pareil cas, la prévision est en retard sur le renversement de tendance. Ainsi, si les deux premières révisions ont peut-être été trop optimistes, la troisième a sans doute été un peu pessimiste, compte tenu de la résistance de la masse salariale que nous continuons de constater pour septembre et début octobre.

La dynamique des encaissements a une incidence surtout en trésorerie ; en droit, les produits de la sécurité sociale sont les sommes dues. En avril, nous prévoyions une récupération des charges reportées à hauteur de 40 % d'ici à la fin de l'année, parce que nous imaginions que la sortie de crise serait plus rapide. À partir de mai, nous avons tablé plutôt sur une reprise des recouvrements à partir d'octobre, mais sans anticiper l'ampleur des paiements spontanés. Or celle-ci s'avère étonnamment positive : sur les 11,5 milliards d'euros des échéances des 15 mars, 5 avril et 10 avril, il n'en restait déjà plus que 5,2 milliards d'euros à la fin septembre. De ce fait, notre profil de trésorerie pour le second semestre est meilleur qu'anticipé au printemps.

Pour 2021, nous avons construit notre profil de trésorerie sur la base des échéanciers qui seront proposés aux entreprises à partir de novembre pour des remboursements qui commenceront, dans le cas général, à la fin de l'année ou au début de l'année prochaine. Les entreprises pourront ajuster ces remboursements.

Enfin, notre plafond d'emprunts reste au niveau le plus élevé de cette année, soit 95 milliards d'euros, malgré la reprise de dette par la Cades et alors que le point bas de financement que nous anticipons pour 2021 sans doute pour janvier se situe plutôt à 70 ou 75 milliards d'euros. Cet écart est assurément très supérieur aux marges de prudence intégrées dans les PLFSS précédents.

La prudence particulière dont ce plafond témoigne se justifie à double titre. D'abord, une dégradation de la conjoncture reste possible : 0,1 point de masse salariale en moins fait perdre 2 milliards d'euros d'encaissements. Ensuite, nous avons radicalement changé notre politique de financement au printemps, pour tenir compte de la très forte hausse de nos besoins : nous veillons à être financés non plus seulement à cinq ou sept jours, mais à un horizon temporel bien plus long, par souci de prévisibilité et de sécurité dans un environnement qui reste incertain pour les encaissements comme sur les marchés financiers - dont je rappelle qu'ils sont restés quasiment fermés dans la seconde quinzaine de mars.

Conformément à cette nouvelle politique de financement, nous sommes aujourd'hui financés jusqu'au 27 novembre. Le niveau de préfinancement que nous pratiquons désormais a pour corollaire une décorrélation entre les besoins de financement du moment et le niveau du financement. Le plafond de 95 milliards d'euros pour 2021 est en cohérence avec cette politique de prudence, qui réduit notre exposition aux risques conjoncturels comme à ceux liés aux marchés financiers.

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