Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la présente proposition de loi – je remercie Hervé Maurey de l’avoir présentée et je l’aurais volontiers cosignée – s’attache à parfaire le fonctionnement de la DETR ; j’appartiens d’ailleurs à la commission DETR de mon département, l’Aisne.
Déjà, en 2018, nous avions constaté le rôle limité de cette commission, le préfet ayant la capacité de retenir les projets de son choix, d’en refuser d’autres, pourtant éligibles ou prioritaires, et ce sans devoir motiver son refus. Il est même arrivé dans le passé – on s’en apercevait au détour d’une discussion – que certains dossiers ressortissant d’une politique expressément écartée par la commission soient cependant retenus, au titre des demandes inférieures au seuil de la saisine pour avis de ladite commission. Évidemment, dans l’état actuel, celle-ci n’est pas non plus informée de l’ensemble des demandes formulées.
Bref, il n’y a que peu de transparence, voire aucune, sur les dossiers en amont, donnant une effectivité toute relative à cette consultation des élus qui ne se prononcent ainsi que sur une infime partie des besoins de nos communes ou EPCI.
Fruit de la fusion de la dotation de développement rural et de la dotation globale d’équipement des communes en 2011, et, dans une certaine mesure, de feu la réserve parlementaire en 2018, la DETR doit répondre aux besoins d’équipement des territoires ruraux.
Lors de la campagne sénatoriale que j’ai menée l’été dernier, j’ai rencontré moult élus qui regrettent la réserve parlementaire. En son temps, celle-ci permettait en effet de verser des subventions de petit montant, qui apportaient une grande aide aux communes rurales à faible potentiel financier. C’est pourquoi le Sénat s’était battu pour qu’elle soit conservée – Hervé Maurey l’a rappelé.
Mais, vous le savez tous, l’Assemblée nationale a décidé de supprimer la réserve parlementaire à la fin de 2017, au prétexte d’un prétendu manque de transparence, alors même que tout était contrôlé depuis le cabinet du ministre de l’intérieur, en liaison étroite avec les préfectures. En moyenne, les subventions par le biais de la réserve parlementaire, publiées chaque année – ne l’oublions pas –, étaient de 5 000 euros. Il nous avait alors été dit que ces sommes seraient reversées vers la DETR, puis ciblées en direction des petites communes. Mais force est de constater que, sur les deux années écoulées, le compte n’y est pas.
Dans mon département, qui compte 800 communes, dont presque 600 de moins de 500 habitants, le mot « rural » est dominant, et les besoins en investissements structurants, même petits, sont légion. Résultat, avec le relèvement systématique du plafond – de ce fait, les petits dossiers échappent à la vigilance de la commission –, personne ne peut plus mesurer l’étendue des besoins correspondants. C’est ainsi que les conditions d’attribution ont été très régulièrement évoquées par mes interlocuteurs durant cette campagne électorale.
Pour l’année 2020, l’appel à projets a été lancé par circulaire du 7 janvier 2020, avec un dépôt limite fixé au 28 février suivant, par voie dématérialisée, le début d’exécution des travaux devant impérativement intervenir en 2020.
Début mars, la pandémie de covid-19 a tout bousculé – je dirais même qu’elle a tout arrêté –, et les collectivités n’ont pas été en mesure d’anticiper les conséquences budgétaires, telles que l’augmentation des dépenses immédiates relatives à la protection de la population, mais aussi la baisse induite des recettes fiscales.
De plus, 30 millions d’euros sont globalement prélevés sur la fiscalité propre de mon département au titre de la suppression de la taxe d’habitation, pour ne citer qu’un exemple.
Ces deux facteurs conjugués vont représenter un coût très important pour les finances locales.
Par ailleurs, l’immobilisation des entreprises durant le confinement et la difficile reprise de l’activité ont perturbé fortement l’investissement public, dont la DETR est un véritable levier.
Aussi, compte tenu de la baisse continue des dotations, et parce qu’elle souffre d’un carcan certain, la DETR nécessite une adaptation à la réalité. Il va falloir nécessairement assouplir son fonctionnement. Je salue donc les dispositions de la proposition de loi et les améliorations apportées par le rapporteur, comme la fin des critères additifs départementaux excluant du bénéfice de la DETR, la communication de tous les dossiers déposés, une information plus complète et la baisse du seuil. Je soutiens également une partie des amendements qui ont été proposés.
Enfin, et ce n’est pas le moins important, la chaîne d’exécution ayant pris beaucoup de retard – dans certains cas, il n’y a même pas de commencement de travaux –, il paraît nécessaire de revoir la durée de validité de la demande de subvention, tout comme les délais réglementaires de commencement et d’achèvement de l’opération – ceux-ci pourraient être allongés d’un exercice supplémentaire.
Pourquoi ne pas envisager également le déblocage des aides publiques tout au long de l’année, dès lors qu’un projet d’investissement a été déclaré éligible ? La relance des territoires par le biais des commandes publiques aux entreprises du BTP passera par une DETR plus souple, inclusive, argumentée et motivée, aussi bien lors de l’octroi que lors du refus, qui pourrait donc être acceptable par tous.