L'AFT, qui emploie une quarantaine de salariés, est l'une des meilleures au monde. Elle gère par exemple la dette de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades). Face à la crise économique et à l'augmentation sans précédent du besoin de financement de l'État, l'AFT s'est adaptée au fur et à mesure et a su reprendre des marges de manoeuvre avec des BTF, du court-terme, ce qui a bien fonctionné au moment de la crise. Elle a également rehaussé ses appels au marché, toutes les semaines pour les BTF et toutes les deux semaines pour les OAT. C'est passé sous le radar, mais nous avons été confrontés à une petite crise de liquidité de la dette française, sur le marché obligataire. Les OAT sont très recherchées, ce qui nous permet d'émettre à des taux plus faibles et la liquidité de notre dette est dans 99 % des cas un de nos meilleurs atouts. Mais en mars, les investisseurs étaient à la recherche de liquidité, ils ont donc d'abord vendu leurs actifs les plus liquides, donc de la dette française. Heureusement, cela n'a duré que très peu de temps et les conditions d'émission assurées par l'AFT sont rapidement redevenues très favorables.
Notre rapporteur général m'interroge sur les PGE. Lors de la mise en place des PGE, Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance avait évoqué une sinistralité nette évaluée à 3 %. Il faut la rapporter aux 120 milliards d'euros décaissés, sur les 360 milliards annoncés pour les PGE. Le calcul est vite fait, cela représente environ 3,6 milliards d'euros. L'essentiel aurait lieu en 2021, surtout au second semestre, puis en 2022. Plus de 1,26 milliard sont aujourd'hui provisionnés : l'estimation est raisonnable.
Éric Bocquet pose la question de la dette française, détenue pour moitié par les non-résidents et pour moitié par les résidents, dont 20 % par l'Eurosystème. Sur la totalité de notre dette, 50 % seraient achetés par les banques centrales, de toute zone géographique. La dette française n'est donc pas majoritairement détenue pas des fonds spéculatifs, ce qui est rassurant. Cela ne veut pas dire qu'ils ne sont pas utiles : ce qui compte, c'est la diversification des investisseurs, qui achètent et qui vendent, pour assurer la liquidité de la dette et faire baisser les taux d'intérêt. La dette permanente existe : tous les ans, nous émettons 260 milliards d'euros, en grande partie pour amortir nos titres arrivés à échéance. Ces 260 milliards d'euros, c'est bien sûr avant le reconfinement du mois de novembre ! Notre besoin de financement de l'État, déjà record à 345 milliards d'euros, pourrait encore augmenter !
Nous remboursons tous les ans 140 milliards de dette passée et nous réempruntons pour les rembourser. Pourrions-nous tout simplement annuler la dette ? En théorie oui, mais il faudrait, en zone euro, changer les traités et que tous les autres pays l'acceptent. En cas d'asymétrie, de décision unilatérale, les taux d'intérêt exploseraient, ce qui conduirait à une dévaluation de la monnaie. Une telle annulation n'est pas souhaitable, car nous perdrions toute crédibilité budgétaire : qui voudrait acheter notre dette ?
La dette japonaise s'élève certes à 230 % du PIB, mais elle est détenue à 90 % par les Japonais. Néanmoins, les taux d'intérêt sont proches de zéro et la croissance difficile à stimuler. Nous préférons l'emprunt Giscard ou l'emprunt Balladur, qui rapportaient plus !
Sébastien Meurant m'a interrogé sur les prêts structurés : plus de 85 % des dossiers ont été traités. La Société de financement local (Sfil), rachetée par la Caisse des dépôts et consignations, s'est largement chargée du sujet de manière exceptionnelle.
Marc Laménie me demande quel est le lien entre l'AFT et la Banque de France : la Banque de France achète, dans le cadre des programmes de rachat mis en place par la Banque centrale européenne, de la dette française. L'AFT doit également s'assurer que le compte de l'État à la Banque de France est toujours créditeur en fin de journée. Il s'agit donc de liens classiques.
Les Green Bonds fonctionnent très bien. Anthony Requin était venu, sur invitation de Vincent Éblé et d'Albéric de Montgolfier, nous parler de la dette verte. Les Green Bonds sont un phénomène particulier : l'encours de l'OAT verte française a atteint 27 milliards d'euros en 2020. Elle est très demandée, même si les banques ne croient pas tellement en nos dépenses écologiques en termes d'investissement : Jean-François Husson ou Christine Lavarde pourraient vous l'expliquer mieux que moi. On ne peut donc pas émettre plus de dette qu'il n'y a de dépenses « vertes » éligibles. Il existe donc un problème d'émission de dette verte : tout le monde en veut, mais il n'y en a pas assez. Il y a donc une prime sur la dette verte. Quant aux rural bonds, il faudrait savoir ce que cela recouvre : qui rembourse et quoi ? Il faudrait également mettre en place un processus de certification !
Par ailleurs, plus vous segmentez votre dette, plus la prime de risque est importante et plus les taux d'intérêt sont élevés. Voilà pourquoi il est important de centraliser la dette à l'Agence France Trésor. Dans ce contexte, il est également utile que la Cades soit adossée à l'Agence France Trésor. D'autres dettes seront-elles reprises ? Peut-être, c'est d'ailleurs souhaitable.
Pour les politiques d'assouplissement monétaire et de rachat de la Banque centrale européenne, François Villeroy de Galhau ne pouvant pas être auditionné pour cause de réserve, nous en saurons plus ultérieurement. Je ne suis pas la madame Irma ni la madame Soleil de la finance ! Mais le consensus veut que ces programmes continuent encore pour un moment.
Victorin Lurel soulève une question de comptabilité : il me semble que la réponse à son interrogation figure sur un compte de commerce.