Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Réunion du 27 octobre 2020 à 14h30
Accélération et simplification de l'action publique — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Agnès Pannier-Runacher :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l’accélération et la simplification de l’action publique constituent une attente forte régulièrement exprimée par nos concitoyens et nos élus. C’est un axe fort de notre politique depuis le début du quinquennat, avec des lois importantes : loi Essoc (loi pour un État au service d’une société de confiance), loi ÉLAN (loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique), loi Pacte (loi relative à la croissance et la transformation des entreprises).

Quelle est l’origine de ce nouveau texte ? Ce projet de loi ASAP s’appuie sur trois axes. Sur la simplification de l’administration, ce texte est né des travaux menés par Olivier Dussopt et il en constitue l’aboutissement législatif. Sur la simplification du quotidien des Français, ce texte vise à répondre aux préoccupations des Français, qui se sont notamment exprimées pendant le grand débat national. Sur la simplification des entreprises, ce texte rassemble les propositions de la mission Kasbarian réalisée pour le groupe de travail Industrie dans le cadre de la préparation du Pacte productif.

Ce texte a été conçu avant le covid et voté au début du mois de mars dernier au Sénat. La crise que nous traversons nous a montré que nous pouvions aller plus loin et nous engager plus avant dans cette simplification. Le texte a ainsi été enrichi par un travail interministériel conduisant à identifier deux types de simplifications additionnelles : d’une part, la pérennisation de mesures d’urgence votées depuis le mois de mars 2020, qui ont montré leur intérêt et dont l’impact a pu être évalué ; d’autre part, des mesures de simplification additionnelles pouvant aider à la relance de notre pays.

Les deux premiers titres de ce projet de loi traduisent les engagements pris par le Gouvernement en matière d’organisation administrative.

Le premier de ces engagements, c’est celui d’une organisation administrative plus simple et plus réactive. Vous le savez, le comité interministériel de la transformation publique prévoyait de supprimer 86 commissions consultatives sur les 394 existantes. Certaines ont une accroche législative et seront supprimées par cette loi. Cette simplification vise à fluidifier de manière significative le processus de la décision publique, bien souvent perçu comme trop lent et complexe par nos concitoyens, nos élus locaux et nos entreprises.

En même temps, nous avons écouté les considérations des parlementaires et maintenu les commissions qui paraissaient essentielles. Ainsi, à la demande du Sénat, la commission mixte paritaire a maintenu la Commission nationale d’évaluation du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs (CNEF).

Le second engagement du Gouvernement consiste à rendre les administrations plus proches et plus accessibles. Notre objectif consiste à approcher un taux de 99 % de décisions individuelles prises à l’échelon local. Une administration plus proche et plus à l’écoute de nos concitoyens, ce n’est pas qu’un impératif d’efficacité, c’est également un impératif démocratique. Les deux chambres se sont retrouvées sur ce sujet, qui a été adopté de manière consensuelle en commission mixte paritaire.

Les titres III à V du projet de loi visent des simplifications pour le quotidien des Français et des entreprises. Leur objectif est de faire gagner du temps à nos concitoyens et à nos administrations, pour que ces dernières se concentrent sur les sujets ayant la plus grande importance pour les Français.

Ce texte permet de simplifier les démarches administratives : faciliter la délivrance de différents documents comme les papiers d’identité ou le permis de conduire ; simplifier des démarches qui concernent nos jeunes concitoyens, que ce soit pour passer le permis de conduire ou la pratique du sport ; simplifier les ouvertures de livret d’épargne populaire pour nos concitoyens aux revenus les plus modestes. Nous assumons cette diversité de mesures, car ce sont précisément celles qu’attendent nos concitoyens. Cela ne fait peut-être pas la une des journaux, mais, en tout état de cause, cela facilitera leur quotidien.

Par ailleurs, les travaux des deux chambres ont permis d’enrichir le texte de nouveaux axes de simplification pour protéger les Français : simplification et accélération de la procédure administrative d’expulsion en cas d’occupation illicite du domicile et renforcement des sanctions pénales anti-squat ; extension de l’utilisation des chèques énergie aux hébergements pour personnes âgées.

Le projet de loi vise également à simplifier la vie de toutes les entreprises.

Le premier axe concerne les procédures des implantations et extensions industrielles que le Gouvernement souhaite accélérer sans modifier de normes d’urbanisme, d’archéologie ou d’environnement. Les délais pour une décision d’autorisation sont deux fois plus longs en France qu’en Suède. Pourtant, le droit suédois est au moins aussi exigeant que le nôtre en matière d’environnement.

D’abord, il s’agit de ne pas faire recommencer de zéro les porteurs de projets à chaque changement réglementaire. Ces derniers devront bien entendu se mettre en conformité, dans les délais contraints des installations déjà existantes.

Ensuite, nous souhaitons faciliter l’instruction des dossiers et adapter les procédures aux réalités du terrain en permettant aux préfets d’accélérer les délais au cas par cas, pour les projets ne nécessitant pas une évaluation environnementale. C’est une demande assez largement partagée au sein de cette assemblée.

Pour raccourcir les délais tout en maintenant nos exigences en matière environnementale, culturelle et de droit de l’urbanisme, des « sites clés en main » ont été identifiés, pour lesquels toutes ces procédures administratives ont été menées en amont. Un projet industriel pourra ainsi démarrer sa production en quelques mois seulement. Il s’agit de créer de l’emploi sur notre territoire national.

Le deuxième axe consiste à anticiper et faciliter les procédures pour accélérer le déploiement de la relance. C’est un point qui est cher au ministère de l’économie, des finances et de la relance, en particulier à Bruno Le Maire et à moi-même.

Le projet de loi ASAP permet d’aller plus loin dans le partage de la valeur. Des dispositions sont prévues pour faciliter les négociations en matière d’épargne salariale et d’accord d’intéressement. Nous tirons là les enseignements de la mise en œuvre de la loi Pacte.

Le projet de loi ASAP permet également d’aller plus loin pour faciliter la commande publique, en pérennisant certains dispositifs pris pendant l’état d’urgence sanitaire et en augmentant le seuil de la commande publique sans formalité pour les travaux à 100 000 euros pendant les deux ans de la relance. Ce faisant, nous nous rapprochons de la moyenne européenne.

Le projet de loi ASAP permet enfin de construire plus avant l’expérimentation Égalim, du nom de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, tout en tirant les enseignements de sa mise en œuvre sur les produits saisonniers.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous pouvez le constater : ce texte est utile et concret. Je veux ici saluer le travail de concertation et de coconstruction qui a rendu possible son adoption rapide. Cela a été dit, ce projet de loi a été peu à peu enrichi par vos apports et le débat parlementaire.

Je tiens à cet égard à souligner le travail accompli par les deux chambres, plus particulièrement en ce jour par le Sénat. Votre esprit d’exigence et de dialogue a permis de faire avancer ce texte, afin qu’il réponde aux attentes formulées par nos concitoyens. Vous avez intensément travaillé ces derniers jours à revoir la rédaction d’un grand nombre d’articles et à trouver des solutions, ce dont je veux vous remercier.

La commission mixte paritaire a ainsi réalisé un travail exemplaire en prenant en compte les souhaits et expertises des deux chambres. Même si les rédactions ont pu évoluer, les simplifications de l’administration et celles pour les implantations industrielles se sont révélées consensuelles. C’est la preuve que ces mesures ont du sens pour nous tous, pour favoriser la localisation d’activités et d’emplois dans nos territoires sans en rabattre sur nos standards environnementaux.

J’en viens maintenant aux sujets de fond qui ont fait couler beaucoup d’encre, en particulier les sujets relatifs à l’agriculture.

Nous avons écouté les demandes du Sénat sur la réforme des chambres d’agriculture de région, qui ne pourra se faire qu’après accord de deux tiers des chambres infrarégionales.

Nous avons pris en compte la demande du Sénat d’inscrire en dur les ordonnances Égalim et de faire une exception pour les produits festifs dès que le texte entrera en vigueur ; ce sera, je pense, apprécié par les professionnels alors qu’approchent les fêtes de fin d’année. Enfin, nous mettrons à disposition des parlementaires plusieurs rapports, notamment un rapport des économistes en 2021 fondé sur l’exercice 2020 et le rapport de la mission Papin, qui permettra d’évaluer l’expérimentation du seuil de revente à perte (SRP), prolongée jusqu’au mois d’avril 2023, de manière à permettre à chacun de reprendre la main sur ce texte sur la base de constats réels.

In fine, c’est un texte fourni, je le reconnais volontiers, qui garde la cohérence de ses trois axes initiaux : simplification de l’administration, simplification du quotidien des Français, simplification de la vie des entreprises.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la démarche de simplification que nous prônons est concrète et doit s’inscrire dans la durée. Elle doit servir à la relance de notre pays que nous engageons en cette période de crise. Ce projet de loi, qui reflète le travail de coconstruction, contribuera à nous en donner les moyens. C’est pourquoi je vous invite à le voter.

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