Personne, donc, ne dit que la guerre est facile. Chacun, sur ces travées, est même convaincu de la difficulté de la tâche. Chacun sait que, alors même que nous débattons à Paris, nos soldats sont engagés dans ces opérations, que leur vie est exposée au combat et que les pertes sont déjà lourdes.
Pour ma part, je suis convaincue que nous devons désormais définir et préparer les conditions réalistes de notre désengagement. Des conditions « réalistes », j’insiste sur ce point, car il faudra bien avoir le courage ou l’honnêteté d’admettre que le discours consistant à dire que les forces étrangères resteront en Afghanistan tant qu’il n’existera pas un État, des dispositifs sécuritaires et d’organisation civile qui nous satisfassent pleinement est un discours qui prépare les pires désillusions.
Si nous tenons ce discours, nous savons qu’il sera difficile de se retirer d’Afghanistan tant la présence des armées étrangères est déjà, et le sera plus encore à terme, un facteur de blocage de « l’afghanisation » du conflit, dont on ne cesse pourtant de dire que c’est le but recherché.
Il faudra bien un jour quitter ce pays. En refusant de l’admettre, nous préparerions le scénario le plus noir, celui d’un retrait précipité et désordonné, qui adviendra au moment où nous n’aurons plus d’autres choix, au moment où, aux États-Unis, en France et dans les autres pays alliés, l’idée même de notre maintien sur place sera devenue totalement intolérable aux opinions publiques, ce qui viendra sans doute bien après que les Afghans eux-mêmes ne le supportent plus du tout.
Je crains que ce jour ne soit plus proche que beaucoup veulent le croire !
Je ne dis pas qu’il n’y a qu’une solution. En revanche, je suis assez solidement convaincue qu’il y a au moins une nécessité impérative, celle d’abandonner l’illusion d’une solution militaire, d’accepter dans le même mouvement de faire aussi vite que possible confiance aux Afghans eux-mêmes pour bâtir les conditions d’un Afghanistan plus prospère, plus stable, plus démocratique.
D’ici là, nous pouvons faire beaucoup, assurer effectivement l’accès aux biens publics de base : l’eau, l’énergie, la santé, l’éducation pour les filles et pour les garçons.
À chaque rencontre, monsieur le ministre des affaires étrangères, vous nous dites que c’est là le point le plus positif du bilan. Sans doute, à condition d’admettre que ce qui est possible et partiellement vrai à Kaboul ne l’est pas ailleurs. L’aide de la France représenterait environ 1 % du total des contributions : c’est bien peu !
Je ne veux pas me résoudre à ce que se répète, une à deux fois par an dans cette assemblée, ce qui pourrait s’apparenter à un dialogue de sourds dont les répliques paraîtraient être écrites comme pour le théâtre.