Pour ce qui concerne l'impact du couvre-feu et du reconfinement sur les administrations de sécurité sociale, pour l'heure, le Gouvernement n'a anticipé dans le PLFSS examiné à l'Assemblée nationale que les conséquences liées à l'accélération de la deuxième vague de l'épidémie. Il table ainsi sur une majoration des dépenses de 2,4 milliards d'euros, cette somme intégrant notamment une majoration des rémunérations des personnels hospitaliers. La majoration de l'Ondam doit permettre d'avancer au 1er décembre 2020 la deuxième tranche de revalorisation salariale des personnels soignants initialement prévue en mars 2021 ; de mettre en place une gratification exceptionnelle pour les agents qui seraient amenés à augmenter leur temps de travail pour faire face à la deuxième vague ; d'augmenter les moyens des établissements de santé de façon à compenser les surcoûts. Il est également prévu de déléguer une enveloppe de 100 millions d'euros aux agences régionales de santé (ARS) afin d'organiser la gestion en temps de crise.
S'agissant des recettes, il n'y a pour le moment aucune modification de la trajectoire, ce qui rend le texte caduc. La commission des comptes de la sécurité sociale estime qu'un ralentissement de la masse salariale de 1% équivaut à 2,06 milliards d'euros de pertes de cotisations, ce qui est énorme. Le ralentissement de la masse salariale était estimé à 7,9 % lors de la présentation du texte en raison des mesures du premier confinement. Il y a fort à craindre que ce taux ne soit aujourd'hui obsolète en raison du deuxième confinement. Les dépenses sont estimées, mais pas les baisses de recettes ; nous allons droit dans le mur...
Pour ce qui concerne l'évolution de la dette sociale et la stratégie d'endettement de l'Acoss, la prolongation de la CRDS devrait accompagner la prorogation du mandat de la Cades. Il en va de même pour l'affectation d'une partie de la CSG. Reste que la loi du 7 août 2020 prévoit de réaffecter à la branche autonomie une partie de la fraction de contribution sociale généralisée (CSG) actuellement versée à la Cades. Par ailleurs, afin de pérenniser le prolongement de la durée de vie de la Cades, le versement, par le Fonds de réserve pour les retraites (FRR), de sa contribution annuelle de 2,1 milliards d'euros a été prorogé. Les réserves de ce fonds étant cependant insuffisantes pour maintenir le montant de ce versement jusqu'en 2033, la contribution annuelle sera ramenée à 1,45 milliard d'euros à partir de 2025. Au total, en 2025, les ressources de la Cades seront donc amputées de 3 milliards d'euros, soit 16 % de ses recettes actuelles.
Plus généralement, s'agissant de l'évolution des ressources affectées à la Cades sur la période 2020-2033, les hypothèses macroéconomiques retenues pour définir la trajectoire peuvent paraître irréalistes. Le Gouvernement tablait, en effet, en août dernier, sur une progression des recettes de CSG et de CRDS de près de 2 % par an, en moyenne, sur 2020-2033. La poursuite de la crise sanitaire rend une telle progression totalement aléatoire à court terme.
Il n'est pas étonnant dans ces conditions que le PLFSS 2021 prévoie une chute du résultat net de la Cades, soit le montant des ressources minoré des charges, de 12,6 % entre 2019 et 2024. Dans ces conditions, l'hypothèse d'un amortissement de l'intégralité de la dette sociale reprise par la Cades à l'horizon de 2035, et non plus 2033, peut apparaître plausible.
S'agissant de l'Acoss, sa stratégie illustre la fuite vers l'endettement dont je parlais dans mon intervention. L'article 23 du PLFSS prévoit en effet de maintenir le plafond d'emprunt de l'Acoss à 95 milliards d'euros, soit le niveau atteint après le déclenchement de la crise sanitaire.
Ce plafond élevé est supposé répondre à une logique de prudence. Il tient compte du changement de politique de financement mis en oeuvre en avril dernier. Le financement, désormais opéré par l'Agence France Trésor, n'est plus opéré à cinq ou sept jours, mais sur une période plus longue afin de faire face à une éventuelle fermeture des marchés financiers en raison de nouvelles mesures de confinement. Compte tenu de cette nouvelle politique, l'Acoss disposait, au 21 octobre dernier, d'un financement lui permettant de couvrir ses échéances jusqu'au 27 novembre 2020. De fait, il existe une réelle décorrélation entre les besoins de financement du moment et le niveau de financement. En dépit de cette révision de leur politique de financement, le président et directeur général de l'Acoss, auditionnés récemment, sont pourtant relativement optimistes,...
J'en viens à la fraude sociale. La Cour des comptes estimait en 2019 la fraude sur les prestations à 771 millions d'euros, et celle sur les cotisations entre 6 et 8 milliards d'euros. Le coût du Ségur de la santé est estimé à 8,8 milliards d'euros pour 2021.
Christine Lavarde, nous examinerons la question de l'AME dans le cadre de l'examen de la mission « Santé ».
Jérôme Bascher, j'ai répondu à votre question sur la solution choisie pour la dette.
Philippe Dallier, on cherche l'argent là où il y en a...