Intervention de Jean-Yves Le Drian

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 21 octobre 2020 à 16h40
Audition de M. Jean-Yves Le drian ministre de l'europe et des affaires étrangères sur la situation internationale en téléconférence

Jean-Yves Le Drian, ministre :

Les trois coprésidents du groupe de Minsk sont garants du statu quo de 1994, ils travaillent ensemble pour avancer. Le problème, c'est que nous avons été trop passifs face à cette situation bloquée depuis le départ, il ne s'est quasiment rien passé depuis le début - il faut reprendre l'initiative, parvenir à un cessez-le-feu et mettre en place un outil de vérification du cessez-le-feu. Une troisième discussion est imminente à Washington, on va essayer d'avancer.

Je suis tout à fait disposé à ce que des formations relevant de la JDC puissent être dispensées par des outils numériques ; j'ai créé il y a un an le collège des hautes études de l'Institut diplomatique (Cheid), c'est un outil à utiliser également, en plus de l'IHEDN.

Monsieur Vaugrenard, je ne partage pas vos préventions contre l'imam Mahmoud Dicko, il n'est pas dans le Gouvernement malien, il a pris ses distances avec la politique depuis la chute d'IBK, il est moins acteur qu'il ne l'a été dans la protestation contre IBK. Je m'interroge plutôt sur le fait de savoir si le dispositif actuel, avec un gouvernement large, va tenir dans les mois qui viennent. C'est ce que je veux voir en m'y rendant demain et après-demain.

Nous avons suspendu le traité d'extradition avec Hong Kong et nous avons bien fait. Pour le moment, il n'est pas à l'ordre du jour de suspendre le traité d'extradition avec la Chine. Comme je l'ai dit lors des questions d'actualité, je crois qu'avec la Chine nous devons tenir trois axes. Une coopération sur les questions d'intérêt commun, et il y en a de très importantes, comme le climat, où nous pouvons faire avancer des dossiers essentiels ; une concurrence dans un grand nombre de domaines, en particulier sur la définition et la régulation des normes qui régissent le commerce, les investissements, la production elle-même, les échanges - et dans cette concurrence, où nous demandons plus de transparence, plus de réciprocité, chacun marque des points, alternativement, c'est ce qui arrive avec Huawei, où nous acceptons qu'il n'y ait pas de discrimination contre cette entreprise, mais exigeons qu'elle ne compromette en rien notre sécurité nationale ; enfin, une rivalité idéologique majeure entre deux systèmes idéologiques, dans laquelle nous ne devons plus avoir aucune naïveté. Le sommet UE-Chine a été reporté, mais il y a eu une réunion en visio-conférence, où les échanges ont été très fermes. Nous souhaitons une rencontre à 27+1, je le dis à mes homologues, l'hypothèse antérieure à 17+1 n'est pas la bonne solution, il faut que l'Union s'exprime à 27. On doit se battre sur les normes et sur la transparence. Quant au combat idéologique, il est majeur, la Chine vise le premier plan mondial en 2047. Quel que soit le résultat de l'élection américaine, la radicalisation de l'affrontement entre les États-Unis et la Chine va continuer dans les années à venir.

Nous ne reconnaissons pas Taïwan, chacun le sait, mais nous sommes soucieux du dialogue et du partenariat économique avec l'île, nous soutenons la participation de Taïwan à des instances internationales, par exemple à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) - c'est dans l'intérêt sanitaire général.

Dans la lutte contre le terrorisme, notre politique étrangère et de défense comprend cinq aspects : l'aspect militaire - voyez notre présence au Mali, en Irak - où il nous faut tenir nos coalitions et nous avons des alliés, bien plus qu'au début des opérations ; l'aspect renseignement, où la coopération internationale est significative et où nous disposons d'un outil de qualité, nous l'avons démontré en prévenant des attentats en France et à l'étranger ; l'aspect financement du terrorisme : nous avons progressé sur les sanctions contre toute source de financement, avec l'initiative No money For Terror, avec des rencontres régulières entre experts; l'aspect numérique, je vous en ai parlé ; enfin, le développement des pays d'où proviennent les terroristes. Les cinq aspects vont de pair, il faut qu'ils progressent ensemble pour réussir contre le terrorisme. Les choses prennent du temps, parce que l'enjeu Sud est apparu bien plus tard que celui de l'Est, le dispositif oriental est donc bien plus développé, mais les choses sont appelées à s'équilibrer.

Dans le cadre d'un rapprochement opéré depuis 2013, des discussions ont été ouvertes entre le Saint-Siège et Pékin. Le Vatican espère, semble-t-il, faire respecter la communauté chrétienne chinoise. Il y a de nombreux témoignages attestant de la répression des chrétiens en Chine, en particulier de violences contre les prêtres et les évêques. Nous suivons les événements de très près. Une mission parlementaire est en cours sur la diplomatie du Saint-Siège, qui intègrera cette dimension particulière.

Sur le Venezuela, les conditions de l'élection prévue le 6 décembre prochain sont tout à fait discutables, nous avons diligenté sur place Josep Borrell. Il y a des divergences de vue dans l'opposition elle-même sur la tenue des élections à l'Assemblée nationale, alors qu'elle est la seule entité légale. Le groupe de contact que nous avons créé il y a deux ans s'est réuni le 17 septembre, il a constaté que les garanties de transparence n'étaient pas réunies pour cette élection : c'est la position de la France et celle de l'Union européenne, elle est parfaitement claire.

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