Intervention de Danièle Hérin

Commission mixte paritaire — Réunion du 9 novembre 2020 à 15h00
Commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur

Danièle Hérin, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale :

Il nous appartient de trouver un accord sur les points sur lesquels nos assemblées respectives ont exprimé des divergences, de forme ou de fond, sur les dispositions du projet de loi déposé par le Gouvernement.

Nous avons eu, tout au long de la semaine dernière, des échanges nourris et fructueux entre nous, ainsi qu'avec la ministre, qui nous ont permis de présenter aujourd'hui à la commission mixte paritaire, comme nous le souhaitions tous, un projet de texte équilibré et satisfaisant, qui retient les principaux apports de l'Assemblée nationale et du Sénat, et prend en compte nos préoccupations respectives, moyennant des concessions réciproques.

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté les grandes lignes du texte proposé par le Gouvernement en l'enrichissant considérablement sur nombre de points importants. Je pense aux dispositions introduites sur le suivi de l'exécution de la loi par le Parlement ou l'actualisation régulière de la programmation. Je pense aussi aux différentes mesures prises pour renforcer l'attractivité des carrières, aux contrats doctoraux ou à la sécurisation des contrats à durée indéterminée (CDI) de mission, à la reconnaissance des docteurs et aux simplifications apportées au fonctionnement des établissements d'enseignement supérieur et de recherche.

S'agissant de l'évaluation, l'Assemblée nationale a profondément révisé l'article 10 sur le Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (HCERES), qui sera désormais une autorité publique indépendante, dotée de la personnalité morale, aux missions renforcées. Les députés ont également apporté des améliorations aux mécanismes de financement de la recherche et à l'articulation du monde de la recherche avec la société. Enfin, l'Assemblée nationale a considérablement étoffé le rapport annexé.

Sans vouloir empiéter sur ce que dira Laure Darcos dans un instant, je crois pouvoir dire qu'il y a eu une réelle convergence entre l'Assemblée nationale et le Sénat sur l'essentiel des dispositions proposées par le Gouvernement. Ce n'était bien sûr pas le cas sur tout, notamment la durée de la trajectoire budgétaire que le Sénat a souhaité réduire à sept ans au lieu de dix. Nous y reviendrons, mais pour le reste, le Sénat s'est surtout attaché à renforcer encore un certain nombre de sujets sur lesquels les députés avaient porté leur attention.

Les discussions que nous avons eues ces derniers jours nous permettent de vous proposer aujourd'hui un texte de nature à faire consensus au sein de notre commission mixte paritaire.

Je veux notamment saluer le fait que le rapporteur du Sénat soit d'accord sur la durée de la programmation, et nous vous proposerons, en conséquence, de nouvelles rédactions des articles 1er et 2, qui reviennent à la fois à la durée initiale de dix ans et prennent aussi en considération des préoccupations exprimées par le Sénat, en intégrant notamment les crédits du plan de relance dans la programmation et en précisant l'effort budgétaire au cours des premières années. Ainsi, la rédaction que nous vous proposons renforce les financements de l'ANR dès les premières années et accroît le choc budgétaire attendu par la communauté scientifique.

Sur le titre II, relatif à l'attractivité des métiers, le Sénat a adopté la plupart des dispositions du projet de loi, en particulier les chaires juniors de professeur et de directeur de recherche, la création d'un contrat à durée déterminée (CDD) pour des doctorants effectuant leurs travaux de recherche dans une entreprise privée, l'encadrement du contrat post-doctoral ou la mensualisation de la rémunération des vacataires.

Nous sommes ainsi parvenus à un compromis sur l'article 3 relatif aux chaires juniors, qui pourront représenter 20 % maximum des recrutements pour les directeurs de recherche et 15 % pour les professeurs - c'est la limite votée par le Sénat.

Le Sénat a ajouté des dispositions intéressantes auxquelles nous souscrivons : le fait que les maîtres de conférences puissent être nommés professeurs sans qualification du Conseil national des universités (CNU) ; l'expérimentation pour les universités de la possibilité de recruter des maîtres de conférence hors liste de qualification du CNU - cela peut être utile dans des spécialités qui n'y sont pas représentées ; la facilitation du recours au CDI de chantier pour les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) et les fondations ayant une activité de recherche.

S'agissant du titre III, nous vous proposerons des améliorations rédactionnelles, à la fois concernant le HCERES et les questions d'intégrité scientifique, avec la suppression de l'article 10 A introduit par le Sénat, étant entendu que ce sujet majeur reste traité au sein de l'article 10. Nous avons également amélioré le dispositif prévu à l'article 12 en renforçant les précisions introduites par le Sénat en matière de destination du préciput.

J'en viens aux deux dernières parties du texte, les articles 13 et suivants. Je tenais d'abord à remercier le sénateur Pierre Ouzoulias, dont l'amendement sur les possibles conflits d'intérêts des chercheurs a introduit l'article 13 A. Ce sujet avait également préoccupé les députés, mais nous n'étions pas arrivés à une formulation satisfaisante. Celle-ci permettra à la loi d'aborder ce sujet important.

Nous sommes également d'accord avec votre commission de la culture au sujet des articles 22 ter et 22 quater, adoptés en séance publique par le Sénat malgré un avis défavorable du rapporteur. Le souci du bien-être animal procède assurément de bonnes intentions, mais les mesures proposées nous entraîneraient dans une fausse direction. Il est opportun de les supprimer.

Enfin, le Gouvernement nous avait demandé plusieurs habilitations pour prendre des ordonnances. Les débats à l'Assemblée nationale avaient déjà mis au jour les réticences des députés à les lui accorder toutes. Je pense notamment aux interventions en séance publique de notre collègue le recteur Patrick Hetzel. Nous reconnaissons que les sénateurs ont su, sur la question de l'enseignement supérieur privé, faire preuve d'une fermeté plus grande encore que la nôtre. Certes, on peut regretter que la disparition des dispositions correspondantes rende à l'exécutif la tâche plus difficile pour opérer, dès la rentrée de septembre 2021, la remise en ordre qu'il appelle de ses voeux. Mais il serait inélégant de notre part de ne pas saluer ce succès du Sénat dans sa défense des droits du Parlement.

Il nous appartient donc de trouver un accord sur les points pour lesquels nos assemblées respectives ont exprimé des divergences, de forme ou de fond, sur les dispositions du projet de loi déposé par le Gouvernement.

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