Intervention de Denis Masseglia

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 4 novembre 2020 à 9h35
Audition de M. Denis Masseglia président du comité national olympique et sportif français cnosf

Denis Masseglia, président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) :

Pour répondre à Mme Dumas sur la Journée olympique du 23 juin, nous avions pris la décision de la reporter à septembre. Au vu des difficultés qui sont apparues en septembre, finalement nous avons annulé les plus grandes manifestations prévues. Nous pouvons imaginer qu'avec les JO, l'impact de ces journées soit de plus en plus important, qu'elles puissent être suivies. Au-delà de la Journée olympique, nous avons aussi la Semaine olympique et paralympique à l'école la dernière semaine de janvier. Enfin, nous souhaitons mettre en place, dès 2021, des Jeux des jeunes, éventuellement avec le concours des fédérations sportives et scolaires et du mouvement sportif. Cette ambition correspond bien à l'objectif commun d'intéresser davantage de jeunes à la pratique sportive et si possible dans un club.

Pour ce qui est des transports, le COJO dit que l'organisation ne sera pas affectée. Il est préférable que les travaux prévus initialement soient menés à terme, mais les conditions actuelles ne le permettent pas et nous devrons en tenir compte.

Enfin, pour ce qui est de la Place de la Concorde, une réflexion globale a été engagée. Je ne peux pas répondre sur tel ou tel sport à cet endroit, sachant qu'un certain nombre de sports sont encore en discussion et que je suis tenu à la réserve tant que rien n'est officiel. Les discussions continuent aussi avec certains acteurs des collectivités territoriales qui attendent pour la plupart qu'un équipement soit construit ou qu'un événement puisse se dérouler sur leur territoire. Merci de comprendre que je ne puis rien dire.

Madame Alexandra Borchio, pour le problème des équipements sportifs relatifs à votre département, le CDOS s'est mobilisé pour assurer l'immédiateté. Nous ne pouvons que sensibiliser nos représentants qui participent à la commission équipement pour qu'il y ait un effort sur le 06. D'autres départements victimes de catastrophes naturelles ont bénéficié de telles mesures par le passé, nous pouvons imaginer que cela puisse être le cas aussi dans les prochaines attributions. Je ne m'engage pas autrement qu'à dire que les acteurs du mouvement sportif seront sensibilisés à cet aspect.

Pour le sujet des enfants, nous avons été optimistes et nous avons un peu déchanté. Au moment du couvre-feu, il y avait continuité entre l'activité scolaire et l'activité sportive dans le club. Après, il a été décidé qu'il ne fallait plus de brassage de population chez les enfants, imposant que l'activité se déroule dans le cadre périscolaire avec une seule classe. Cela ne mobilise pas le mouvement sportif de la même manière que s'il avait pu recevoir tous les enfants. En tous cas, s'il doit y avoir un allègement des contraintes sanitaires, je crois qu'il faut qu'elle touche les enfants, en particulier ceux du primaire ou des collèges, pour qu'ils puissent reprendre une activité sportive dans les clubs, indépendamment du brassage de classes.

Madame Billon, je reconnais que le sport féminin est un vrai sujet. Il était déjà très mal en point avant parce qu'on ne peut pas décréter une égalité de traitement ni imposer une égalité de salaires, sauf éventuellement au niveau des fédérations en équipe nationale. Cependant, dans les clubs, l'économie du foot masculin et celle du foot féminin sont tout à fait différentes, tout comme pour le rugby hommes et femmes.

Sur le handball et le basket, les sports en salle, nous sommes déjà beaucoup plus proches d'une forme égalitaire. Je suis quand même un peu optimiste sur le fait que, que ce soit l'ASCAN en volley précédemment, Metz en handball ou Bourges en basket, des clubs emblématiques se sont fait une image à partir du sport féminin. Ces villes et ces clubs doivent servir d'exemple, montrer que le sport féminin peut entraîner un véritable engouement et une véritable économie sur le plan des territoires. Ce plan de relance féminin devrait être un plan de soutien permanent. Tant que le sport féminin n'aura pas trouvé une place plus importante, il faudra l'aider, sinon nous n'aurons pas de sport féminin. Un débouché doit être proposé aux jeunes filles qui font du sport, afin qu'elles puissent pratiquer de manière professionnelle ou semi-professionnelle. Nous n'irons pas chercher chaque fois des athlètes étrangères pour pratiquer du basket, du hand ou du volley. La question de la formation s'impose dès lors.

Vous avez parlé de continuité pour les jeunes par rapport au lycée et à l'université, alors que celle-ci est déjà problématique et constitue une vraie fracture entre collège et lycée. Par ailleurs, dans une université américaine ou anglo-saxonne, le terrain de sport est d'abord mis en avant, ce qui n'est pas le cas dans une université française, du fait d'une différence de culture. Je m'appuierai sur un exemple qui me semble important. La ville de Medellín est en effet connue pour son trafic de drogue et d'autres problématiques moins intéressantes que la pratique sportive. Pourtant, il y a vingt ans, la Ville a misé sur le triptyque éducation/culture/sport. Elle a ainsi consacré 40 % de son budget à ces trois aspects. Alors que la population a augmenté, les incivilités ont reculé. Le pari de l'éducation de la culture et du sport est donc un pari gagnant à long terme. Il faudrait dès lors que tous les décideurs politiques économiques et sportifs soient d'accord pour un plan à long terme, sachant que ceux qui en bénéficieront ne seront pas les mêmes. C'est peut-être là que repose une partie de la difficulté.

En matière de pratique handisport, nous avons un lien étroit avec le comité paralympique. Nous échangeons en permanence et faisons en sorte que le handisport soit considéré simplement comme du sport. Là aussi, la place du handisport est à revoir. Ainsi, le programme EPS n'est pas forcement adapté pour que les élèves en situation de handicap puissent pratiquer au même titre que leurs camarades. Dans la plupart des clubs, une solidarité naturelle émerge entre athlètes valides et athlètes en situation de handicap. Les gestes civiques élémentaires y sont naturels. Je pense que là aussi, le milieu sportif s'engage dans l'épanouissement des personnes en situation de handicap. Il faut le valoriser davantage. Je tiens à vous rassurer pour ce qui est de notre position, même si nous représentons le comité olympique sportif français tandis qu'un comité paralympique français existe par ailleurs. Nous discutons d'un rapprochement ; il sera inéluctable, mais je ne sais pas à quelle échéance. Je tiens à préciser que je suis un inconditionnel de la limitation d'âge et qu'elle s'applique à moi-même au prochain mandat. Je ne serai plus président du CNOSF à partir du 29 juin 2021.

Quant aux trois dernières questions, madame Sylvie Robert, j'ai un peu répondu tout à l'heure sur l'organisation territoriale de l'agence. J'ai envie de dire aussi qu'il revient aux acteurs de s'emparer du dispositif. Ils devront partir du principe qu'ensemble, nous sommes plus forts qu'individuellement. Je crois qu'il faut du recul pour faire le bilan alors que les décrets viennent de paraître.

Quels dispositifs sont-ils efficaces pour aider dans l'urgence ? Pour la relance, nous avons parlé du pass sport. Dans l'urgence, j'aimerais répondre dans 15 jours, après les résultats de l'enquête. J'ai besoin de savoir ce qui en ressortira. Cette enquête a l'avantage d'avoir des questions ouvertes ; j'espère connaître un peu mieux les attentes des clubs amateurs. La question du sport professionnel ou semi-professionnel rejoint celle posée sur la détresse de certains sports semi-professionnels. S'il n'y a pas une aide pour compenser la perte de billetterie et de recettes commerciales pour les sports semi-professionnels, il est certain que le championnat de basket ne pourra se dérouler qu'avec l'ASVEL et mon accord. Si les autres clubs sont prêts à mettre les clés sous la porte, il n'y aura plus de championnat. Il faudra en prendre conscience, nous ne pouvons mettre les clubs entre le marteau et l'enclume. Il est urgent de prendre une décision de soutien sur le sport semi-professionnel, encore plus sur le sport semi-professionnel féminin.

J'ai bien noté ce que disait Olivier Paccaud sur le pass sport, qu'il fallait prouver que l'incitation à la pratique conduit à davantage de licenciés. Faut-il un chef de file ? La priorité est d'abord d'obtenir le pass sport. L'impulsion doit venir de l'État. Je pense que ce sujet sera suivi par les collectivités territoriales et sans doute d'autres collectivités qui ne participent pas encore. En revanche, l'outil technique ne devra pas être compliqué. Il faudra trouver un système efficace, donc simple.

En réponse à Jacques Grosperrin, je préférerais que le CNOSF soit mieux entendu. Mon prédécesseur disait que quand les présidents de fédération ont besoin de quelque chose, ils appellent le ministre. S'ils l'obtiennent, ils ne disent rien, s'ils ne l'obtiennent pas, ils nous appellent pour nous demander ce qu'il convient de faire. J'ai tout résumé.

Les éducateurs qui ne peuvent plus travailler doivent bénéficier de l'aide de l'État. Je ne vois pas ce que nous pourrions faire de plus.

Pour ce qui est de la conférence régionale du sport, il ne s'agit pas de partager ce qui est mis en place par chaque collectivité, laquelle doit rester maître de son financement. Il s'agit d'écouter ce que chacun peut mettre pour mieux agir ensemble ; les conférences régionales du sport sont vouées à cette écoute.

Je terminerai par le juste retour du monde professionnel vers le monde amateur. Il s'agit plutôt du juste retour de ce que le sport français apporte à la Nation. Contrairement à ce qui se passait il y a 20 ans, des produits viennent des paris sportifs, conséquents, des droits de télévision, des 180 000 emplois dont 100 000 équivalents temps plein et des activités sportives liées à la TVA. L'activité sportive atteint ainsi 2 % du PIB. Comparés à ce qui est donné au budget du ministère des sports - 830 millions d'euros en incluant la Solideo -, les apports du sport français à la Nation peuvent être estimés à 10 ou 12 milliards d'euros, soit un rapport de 1 à 10. Des progrès sont à faire, ce qui pourrait justifier davantage le fait de nous aider. Je ne connais pas l'apport de la culture, mais il serait intéressant de faire le lien entre les recettes et les dépenses.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à midi.

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