Madame Garriaud-Maylam, votre conviction et votre enthousiasme à défendre notre diplomatie féministe en dehors de nos frontières sont les mêmes que les miens. J'ai eu la chance de travailler dans différents pays dans le monde, et de vivre sur différents continents. Vous ne pouvez imaginer ma fierté lorsque je vois combien les valeurs que nous portons en tant que pays des droits de l'homme sont reconnues et appréciées. Ma volonté de les faire rayonner de par le monde n'a aujourd'hui de limite que le coronavirus... Nous aurions pu mener tant d'actions que nous ne pouvons malheureusement pour le moment pas réaliser, sauf de manière virtuelle ! Je ne veux pas limiter mon propos à ce qui ne va pas. Il y a des avancées certaines dans notre diplomatie. Je citerai par exemple le soutien que nous apportons au Docteur Mukwege, dit « le docteur qui répare les femmes », ou le travail mené pour organiser un grand évènement international sur l'égalité entre les femmes et les hommes dans le cadre du Forum Génération égalité qui devait avoir lieu en 2020, 25 ans après la Conférence mondiale sur les femmes de Pékin. Cela montre la volonté de notre Gouvernement de porter haut et fort nos valeurs, et de les défendre en termes de diplomatie féministe. Nous y sommes totalement engagés. Je le suis en tant que ministre, mais également à titre personnel. Quand le monde ne va pas bien, comme c'est le cas aujourd'hui, nous devons apporter des valeurs positives, qui sont celles des droits de l'homme. Nous suivons les engagements pris lors du G7 à Biarritz en août 2019. Nous allons tout faire pour être fiers du Forum Génération égalité que nous organiserons, je l'espère, au mois de juin 2021.
Madame Schalck, il existe deux moments clés dans le processus de traitement des violences faites aux femmes : l'accueil de leurs plaintes dans les gendarmeries et commissariats, mais aussi leur venue à l'hôpital pour recevoir les soins nécessaires. Les victimes n'ont pas toutes la volonté de déposer plainte. Les médecins sont capables d'entendre, de comprendre et d'aider ces femmes. Il est donc crucial de faire en sorte qu'elles aient accès aux services de police et gendarmerie au sein des établissements hospitaliers. J'ai visité récemment trois UMJ de ce type à Saint-Denis, dans le Morbihan et à Angers, où un travail remarquable est réalisé avec des médecins excessivement engagés et motivés. J'ai échangé à ce sujet avec le ministre chargé de la santé. Nous avons l'intention d'étendre cette formule à l'ensemble du territoire. Cette mesure vise à encourager les femmes hospitalisées n'osant pas porter plainte, ou n'en ayant pas envie, à le faire auprès d'officiers de police judiciaire au sein même des hôpitaux. À ce jour, trente conventions avec des établissements hospitaliers ont été répertoriées. La circulaire du 23 septembre 2020 incite les tribunaux à favoriser cette démarche dans le cadre de l'amélioration de l'accueil et de la prise en charge des victimes de violences conjugales. Au 13 octobre 2020, 53 préfectures avaient signé la convention intégrant le dépôt de plaintes à l'hôpital. Dix autres conventions devraient être signées d'ici la fin de l'année. Malheureusement, la crise sanitaire a mobilisé nos médecins, infirmiers et aides-soignants. Nous serons toutefois très attentifs au déploiement territorial de cette mesure, notamment dans les territoires ultramarins et les zones rurales.
Madame Jasmin, nous sommes conscients du fait que les femmes de La Réunion reçoivent trois fois plus de propositions sexuelles lourdement insistantes, malgré leur refus, qu'en métropole. En Martinique et en Guadeloupe, une femme sur cinq est victime de violences conjugales. Ces chiffres ont attiré notre attention. Je connais bien les territoires ultramarins, y ayant longtemps travaillé. Le programme 137 bénéficie en 2021 d'un effort budgétaire important. Il permettra une meilleure couverture d'aide et d'accompagnement des territoires ultramarins. Nous allons renforcer les aides financières apportées aux associations. Nous allons enfin étendre l'accès à la ligne 3919, le décalage horaire compliquant son accès aux femmes ultramarines. Fin 2020 et en 2021, les outre-mer feront l'objet d'une attention particulière. 98 places d'hébergement y seront créées.
Je serai également très attentive au sujet d'Action logement. De plus, une partie importante des postes d'intervenants sociaux sera créée au sein des commissariats et gendarmeries. Nous poursuivrons l'effort commencé en 2020. Nous avons également décidé de créer trois centres de prise en charge des hommes violents, à La Réunion, en Guyane et en Martinique. Vous noterez donc notre volonté de ne pas oublier les outre-mer dans ce combat.
Madame Monier, vous évoquiez l'éducation à la sexualité dans le cadre scolaire. Je suis intimement convaincue que l'égalité entre les femmes et les hommes doit être abordée au plus tôt, dès l'école. Les questions relatives à l'égalité entre les filles et les garçons ont fait l'objet d'un renforcement dans le cadre des mesures prises lors du Grenelle des violences conjugales. Le ministre de l'éducation nationale a prévu dans son budget la prise en charge d'un module de formation initiale et continue sur l'égalité, rendu obligatoire pour tout le personnel de l'Éducation nationale. Chaque année, un conseil de vie collégienne ou lycéenne réalisera un diagnostic de l'égalité entre les filles et les garçons en milieu scolaire. Enfin, nous allons prochainement lancer une mission relative à l'évaluation de l'éducation à la sexualité du CP au lycée pour apprécier l'efficacité de ces séances et identifier les freins ou obstacles rencontrés dans leur mise en place. Forte de ses constats, la mission formulera des recommandations pour lever les obstacles rencontrés et rendre plus visible l'ensemble des actions relatives à ce sujet.
Vous mentionniez également les actions menées sur le logement et les places d'hébergement pour les femmes. J'insiste sur le caractère prioritaire de cette action. Nous devons éloigner les femmes victimes du foyer où vit leur agresseur. Monsieur Belin indiquait tout à l'heure ne pas comprendre pourquoi c'était aux femmes de partir. Nous éloignons les hommes lorsque c'est nécessaire, ou les femmes lorsqu'elles le souhaitent. Certaines ne veulent pas rester dans leur foyer, où elles se heurtent dans chaque pièce au souvenir douloureux des coups et des insultes. Nous voulons donc leur donner la possibilité de choisir. Lorsqu'elles le décident, nous devons être en mesure de leur offrir un logement digne pour qu'elles puissent se reconstruire. Nous avons là aussi donné une importance particulière aux territoires ultramarins. Nous avons de plus augmenté la prise en charge des nuitées d'hôtel à 35 euros en Ile-de-France et en outre-mer, les tarifs y étant plus élevés. Nous réexaminerons le rehaussement du forfait de 25 euros, la qualité des hébergements étant importante. Nous y serons particulièrement attentifs en 2021.
Sur la question des transports en zone rurale, nous avons financé des bons de taxi durant le premier confinement, pour que les femmes puissent être mises à l'abri lorsqu'elles n'étaient pas véhiculées. Nous reconduisons ce dispositif, qui complète le partenariat construit avec Uber.