Intervention de Marie-Noëlle Lienemann

Commission des affaires économiques — Réunion du 17 novembre 2020 à 16h30
Projet de loi de finances pour 2021 — Audition de Mme Emmanuelle Wargon ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique chargée du logement

Photo de Marie-Noëlle LienemannMarie-Noëlle Lienemann :

Madame la Ministre, Mme Valérie Létard ayant fait le point sur Action Logement, je n'aborderai pas cette question, sur laquelle nous sommes d'accord. Concernant les APL, nous nous situons dans une période ou la contemporanéité va se mettre en place. Il reste à savoir si vous disposez d'estimations sur le nombre de personnes qui ne vont plus recevoir les APL dans le cadre de ce mécanisme. D'après ce que j'ai compris, les économies prévues portent sur un montant d'environ 800 millions à un milliard d'euros, mais elles seront finalement réduites à la moitié au regard de la situation sociale.

Par ailleurs, ne pensez-vous pas qu'il faut tirer les leçons de cette crise ? Les APL sont non seulement un élément de solvabilité fondamental pour nos concitoyens modestes, mais également pour les propriétaires qui, dans les périodes difficiles comme celle que nous avons connue, touchent les loyers au travers du système de paiement direct. Cela produit un effet de stabilisation du système très important. Ne pensez-vous pas qu'il faut revenir sur la volonté de réduire le champ et l'ampleur des APL ? Nous avions déposé un projet de loi pour l'efficacité des APL qui a été voté par le Sénat. Pensez-vous y donner une suite ? Concernant la relance du logement social, il faut que les loyers de sortie correspondent aux revenus des Français, ce qui est de plus en plus difficile dans l'équilibre budgétaire actuel. Ne croyez-vous pas que l'un des éléments de la relance, à défaut d'une baisse générale de la TVA qui a donné lieu à un débat en Allemagne, mais pas en France, est qu'il serait urgent de fixer une TVA à 5,5 % pour le logement social ? Je vous rappelle que cette règle a été maintenue pendant très longtemps et ne s'oppose en rien aux règles européennes. Dans ce cadre, ne faut-il pas accélérer le bail réel solidaire (BRS) et aider au maximum les organismes pour le foncier solidaire ? Accepteriez-vous que les départements aient le droit de réaliser des garanties d'emprunt s'agissant des organismes de foncier solidaire (OFS) ? Évidemment, cela n'est pas une obligation, puisque les communes et les communautés y ont droit. En revanche, les départements n'ont pas le droit de garantir les prêts des OFS et les communes n'en ont pas les moyens. Même s'il y a d'autres débats techniques, il me semble important de souligner ce point. Par ailleurs, l'accession sociale à la propriété est en crise. Elle a plutôt augmenté dans notre pays, mais nous ne parvenons pas à solvabiliser la partie sociale qui concerne les foyers rémunérés à hauteur de deux fois le SMIC.

Nous entendons dire tous les ans que le prêt à taux zéro sera prolongé d'un an, mais ce stop and go est complètement délirant. Si la vente d'une maison ou d'un appartement intervient en milieu d'année, il n'est pas possible au regard du temps de financement de s'assurer d'un accès au PTZ l'année suivante. Ce système a donc un effet négatif sur la production de l'accession sociale. Ne croyez-vous pas qu'au regard des mesures prises par les banques qui restreignent l'accès au crédit, il faudrait expérimenter pour les catégories les plus modestes l'idée d'une prime d'accession sociale, quitte à la localiser pour éviter l'étalement urbain et permettre le renouvellement des centresvilles ? Je rappelle qu'aujourd'hui, le souhait de réaliser une opération d'accession sociale dans les centres-villes se heurte à de tels surcoûts qu'il n'est pas possible d'en rester à un prix raisonnable, à moins d'une perte de confort qui ne rend plus l'opération attractive. Nous assistons à une paupérisation de nos centres-villes.

Enfin, nous craignons un manque d'ambitions quant au bilan carbone. Il existe une grande différence entre le bilan carbone en valeur énergétique et le bilan global, qui englobe les matériaux, la nature des chantiers et les éléments de construction. La France entend réduire le niveau des gaz à effet de serre, mais il faut tenir compte des politiques d'importation. Par conséquent, je plaide pour que nous soyons très attentifs à la nécessité de renforcer la part du bois dans la construction et dans les travaux. Il s'agit d'un point important dans le soutien à la mise en oeuvre d'un bilan carbone offensif dans la construction, notamment dans le logement social.

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