Tout d'abord, je partage ce qui a été dit par M. Tabarot sur le sous-investissement chronique qui affecte l'ensemble de nos réseaux. Il est vrai que le transport fluvial a peut-être été l'un des grands oubliés de ces vingt dernières années. On se retrouve un peu, dans ce secteur, dans la même situation que pour les petites lignes ferroviaires.
La LOM a déjà permis des avancées considérables : nous avions acté en 2017 un budget de 75 millions d'euros, en très forte augmentation en matière de régénération des canaux. Il est de 100 millions cette année, nous ambitionnons de parvenir à 140 millions d'euros en vitesse de croisière.
L'effort réalisé sur ce réseau est tout à fait conséquent par rapport à ce qu'il est possible de réaliser sur le plan technique et opérationnel.
Nous ajoutons au plan de relance 175 millions d'euros pour le grand et le moyen gabarit. En termes de volume budgétaire, il s'agit d'un effort considérable, à la hauteur de l'ambition que nous avons pour ce secteur.
S'agissant des ETP, j'ai déjà eu cette discussion avec Laurent Hénart, président de VNF, il y a quinze jours. Des efforts importants de productivité ont été réalisés. Des projets de regroupement ou de digitalisation peuvent faire sens, la philosophie que j'ai proposée à Laurent Hénart consistant à se donner la chance, par bassin - comme nous l'avons fait pour les petites lignes ferroviaires, mais avec une dimension moins régionale - de construire, en lien avec les collectivités, le même type de contrat qu'en matière de fret, de façon à se fixer des perspectives à dix ans.
Les sujets qui concernent le fret semblent davantage d'intérêt national. Dans ce cas, l'État peut apporter une contribution plus forte. Les sujets relatifs à la plaisance sont peut-être davantage d'intérêt local.
Cette philosophie pourrait s'appliquer aux réseaux de canaux. C'est le travail que j'ai proposé à Laurent Hénart. Je souhaite que nous avancions en ce sens.
Sur les 4, 9 milliards d'euros dédiés au ferroviaire, 1,5 milliard d'euros d'argent nouveau est consacré à la sécurisation des ponts que vous avez évoquée, mais aussi à de nouvelles priorités politiques, qu'il s'agisse du fret, des petites lignes ou des trains de nuit. Cette somme permettra, sans dénaturer la trajectoire de régénération du réseau, d'accélérer le développement ou de rattraper le retard que nous avions pris dans le secteur ferroviaire.
J'ajoute que les crédits consacrés aux petites lignes figurent bien dans les CPER jusqu'en 2022. Ils feront également partie de la future contractualisation.
Monsieur Jacquin, la question du modèle économique des transports en commun est compliquée. Nous avons subi un premier confinement très strict, avec des fréquentations qui ont très largement diminué. Nous avons à l'époque cherché à nous assurer que nous pouvions opérer en toute sécurité sanitaire. Ceci a nécessité des investissements importants en matière de nettoyage et de désinfection, de nouvelles compétences. S'y ajoutent des dépenses nouvelles en matière de sécurité sanitaire et de sécurité tout court, dans un contexte que vous connaissez parfaitement.
Les modèles économiques sont donc quelque peu chahutés - et le mot est faible.
Nous avons, dans le cadre de la troisième loi de finances rectificative pour 2020, commencé à compenser une partie du versement mobilité pour l'ensemble des collectivités, après remontée des données. Dans le PLFR 4, nous allons compenser le reliquat de versement mobilité au regard des pertes réelles, ainsi que, sous forme d'avances remboursables, les pertes de recettes tarifaires.
C'est la logique qui prévaut et que nous avons négociée avec les collectivités. Tout cela devra évidemment être considéré au regard des conséquences du deuxième confinement et des nouvelles pertes qui pourraient apparaître. Je n'ai pas de réponse définitive s'agissant de la possible désaffection des transports en commun sur le temps long.
En mai et juin, au moment du déconfinement, la fréquentation était comprise entre 60 et 65 % par rapport à la période d'avant-crise, ce qui nous donne des indications intéressantes sur le comportement des usagers.
Parmi les 30 % des personnes qui n'ont plus fréquenté les transports, la moitié s'est reportée sur la marche et le vélo et la moitié sur la voiture, certains disant vouloir reprendre leurs habitudes assez vite, notamment lorsqu'un vaccin ou traitement sera disponible, d'autres assurant être durablement passés à d'autres moyens de transport. Le vélo, dans ce contexte, a été très largement plébiscité.
Nous allons continuer à étudier cela de façon extrêmement précise, mais il me semble que de nouveaux modes d'organisation du travail se sont mis en place - notamment le télétravail - qui auront probablement un impact durable.
On a pu entendre ici et là, en s'appuyant sur les chiffres de l'immobilier, qu'il y avait un début de phénomène de « démétropolisation ». Si c'est le cas, cela pourrait questionner les investissements dans les transports sur la durée. Il faudra évidemment être en phase avec la réalité.
S'agissant de la vente des véhicules, le bonus fonctionne très bien pour les véhicules électriques. Nous avons non seulement souhaité maintenir un haut niveau de bonus, tout en soutenant le marché de l'occasion, mais également permis aux ménages les plus modestes d'en bénéficier. C'est l'objet des 1 000 euros de bonus pour l'achat d'un véhicule électrique d'occasion annoncés il y a quelques semaines.
Nous avons également voulu favoriser les ménages d'outre-mer, confrontés à un coût d'achat beaucoup plus important.
Le malus au poids a été étudié au regard de l'offre automobile française. La Convention citoyenne pour le climat proposait de le fixer à 1,4 tonne. D'autres proposaient des seuils de poids bien supérieurs. Nous avons considéré que le critère de 1,8 tonne permettait de maintenir la compétitivité de l'appareil productif français et d'avoir une incitation cohérente avec nos ambitions environnementales. C'est ce qui a présidé à cette décision.
S'agissant des ponts, 60 millions d'euros sont dédiés aux collectivités. Nous pourrons vous adresser le détail très précis des investissements. Nous allons par ailleurs accompagner de façon plus structurelle les projets de ponts connectés, sur lesquels des capteurs sont placés afin d'assurer une maintenance préventive. Nous payons en effet un certain surcoût en maintenance curative par rapport à ce que nous aurions dû dépenser s'il s'agissait d'une maintenance en conditions opérationnelles.
Quant au vélo, il a été plébiscité à l'occasion de la grève des transports en commun de décembre dernier, mais aussi lors du déconfinement. Nous avons amélioré les aides pour les vélos à assistance électrique. Le vélo fait partie des dépenses éligibles au forfait mobilités durables qui, la semaine dernière, a été porté à 500 euros par an.
Par ailleurs, 200 millions d'euros sont mobilisés dans le plan de relance pour permettre de réaliser 600 pistes cyclables et un certain nombre d'abris à vélos, notamment à proximité des gares. C'est une des conditions du développement du vélo.
Au niveau européen, nous sommes en train de négocier un fonds qui permettra de mobiliser 150 millions d'euros supplémentaires, qui s'ajouteront aux 350 millions d'euros sur sept ans votés à l'occasion de la LOM.
Quant au quatrième appel à projets concernant les transports collectifs en site propre (TCSP), 450 millions d'euros lui sont consacrés dans la LOM, en plus des 100 millions d'euros du plan de relance. Cet appel à projets sera lancé dans les prochaines semaines.
Pour répondre enfin à Mme Perrot, nous avons mis en place des tests rapides il y a quinze jours au départ de l'aéroport de Nice, en lien avec les services municipaux de la ville. Nous avons débuté la semaine dernière à l'aéroport d'Orly une campagne de tests antigéniques et PCR, visant notamment à protéger l'outre-mer. Demain commence à l'aéroport de Roissy une campagne de tests rapides, notamment antigéniques, qui permettent d'obtenir des résultats beaucoup plus rapides et de protéger, dans un contexte encore incertain, les voyageurs qui partent de France ou arrivent en France, notamment en provenance de pays où le virus circule beaucoup.
Je n'ai pas de réponse s'agissant du remboursement des billets par les compagnies aériennes en cas de test positif. La politique commerciale des compagnies aériennes consiste aujourd'hui essentiellement à procéder à des reports ou à des échanges de billet sans frais.
S'agissant du fonds de garantie, les compagnies étant en situation de faillite, nous avons dû les soutenir pour qu'elles survivent et faire en sorte que les passagers qui avaient payé leurs billets puissent récupérer leurs deniers ou bénéficier de reports.
Savoir comment compenser les faillites des compagnies aériennes sur un temps long n'est pas simple. À l'échelle d'un pays, on trouve en général une grande compagnie nationale, comme en France, et de petits opérateurs.
J'observe qu'au niveau européen, cela fait sens d'avoir un processus mutualisé de garantie des paiements en cas de faillite d'une compagnie aérienne. En fonction de la reprise du trafic, ce sera un sujet important à développer. C'est un débat que nous avons avec nos collègues allemands, espagnols, italiens et portugais, au sein d'un groupe informel que nous avons constitué.
Concernant le mécanisme Corsia et le verdissement de l'aéronautique, je suis toujours un peu marri de voir que ce secteur a fait beaucoup d'efforts, et souvent très tôt, mais qu'il est aujourd'hui toujours très critiqué dans le débat public. Le mécanisme Corsia remonte à 2016 et représente le premier acte de régulation environnementale mondiale. Il a certainement été victime d'une mauvaise communication du secteur, mais il a constitué une avancée considérable.
L'aéronautique civile a aujourd'hui franchi le pas sur le plan de la transition industrielle. La filière des biocarburants est lancée. Plusieurs centaines de millions d'euros sont mobilisées. Les objectifs de taux d'incorporation de biocarburants sont ambitieux. Le verdissement industriel est en marche. La première étape se situe autour de 2027, avec des avions hybrides pour le marché régional.
L'ensemble de la filière hydrogène s'organise pour réaliser ce saut technologique vers des avions très sobres en carbone, en lien avec les autres secteurs du transport.
Cet acte très ambitieux en matière de verdissement industriel nous permettra de reconstituer des avantages géopolitiques face aux Chinois et aux Américains. Nous avons en Europe toutes les compétences et toutes les capacités pour le faire. C'est pourquoi nous investissons 1,5 milliard d'euros sur trois ans pour amorcer cette filière et être à l'avant-garde des nouvelles technologies, afin de reconstituer nos avantages comparatifs industriels.
S'agissant de la régulation environnementale, mis à part le mécanisme Corsia, il existe également le système européen d'échange de quotas carbone ETS, pour lequel il est prévu de faire disparaître les quotas gratuits. Nous disposons également d'outils de compensation nationale, notamment utilisés par le groupe Air France. Il s'agit d'un continuum parfois mal connu, parfois critiqué, mais qui constitue une bonne base de régulation environnementale.
Nous aurons certainement à mieux communiquer sur ce sujet, mais il ne faut pas dire que le secteur aérien ne prend pas sa juste part à la lutte contre le changement climatique.
Concernant la taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires, l'engagement du Gouvernement est évidemment de maintenir les travaux d'insonorisation. Des échanges sont encore en cours avec Bercy sur les montants et les modalités, mais les choses avancent.
Pour finir, nous augmentons cette année de 5 millions d'euros le budget prévu pour les lignes d'aménagement du territoire, qui répondent à des critères spécifiques définis au niveau européen. Nous ne pouvons pas qualifier de lignes d'aménagement du territoire celles où l'offre aérienne viendrait à diminuer ou à disparaître. Cela renvoie au sujet de la restructuration de l'offre d'Air France, que nous menons en lien avec les régions.
J'animerai prochainement un conseil ministériel sur la question des dessertes aériennes. Nous avons aujourd'hui un groupe qui se recompose, des opérateurs régionaux qui s'intéressent à la reprise de certaines lignes, et des risques de prédation ou de concurrence déloyale de la part de différents acteurs.
Le ministère a réalisé un véritable travail de cartographie que nous avons présenté aux différentes parties prenantes pour maintenir autant que faire se peut les liaisons et ne pas tomber dans les chausse-trappes que nous avons trop connues ces dernières années.