Intervention de Gérald Darmanin

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 25 novembre 2020 à 8h30
Projet de loi de finances pour 2021 — Audition de M. Gérald daRmanin ministre de l'intérieur

Gérald Darmanin, ministre :

Il l'est, oui. Mais des tranches additionnelles sont prévues, qui seront déclenchées le jour où le Parlement aura voté la proposition de loi. Cela me permettra, si le Parlement met du temps à voter, de tenir la promesse du Président de la République et d'avoir, au 1er juillet 2021, 10 000 caméras piétons pour toutes les brigades de police et de gendarmerie. Et puis, si la loi devait être votée en juillet ou en août, ou si elle n'était pas votée mais qu'un autre gouvernement choisissait de la mettre en place, nous pourrions déclencher les possibilités ouvertes par le marché.

Sur la question du stockage des images, nous travaillons à en définir les modalités, qui doivent respecter les préconisations de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), ces questions étant très encadrées. Par ailleurs, les images ne doivent pas pouvoir être modifiées, ni enregistrées sur des serveurs personnels, et il nous faut avoir recours à un terminal exclusivement professionnel. Enfin, il ne pourra s'agir d'un code étranger. Nous attendons les propositions mais comme nous avons beaucoup travaillé sur cette question avec plusieurs entreprises, j'espère que l'appel d'offres ainsi lancé trouvera preneur dans les conditions les plus françaises possibles. Cependant, je ne peux me prononcer sur un marché aussi important.

Au sujet des carences ambulancières, la rémunération des interventions est aujourd'hui de 124 euros et je comprends les difficultés créées. Certes, le ministre de l'intérieur est coresponsable sur ce sujet, mais celui-ci relève avant tout du ministre de la Santé, qui travaille en ce moment à la question du secours d'urgence dû aux citoyens. Néanmoins, votre question est tout à fait légitime et intéresse le ministre des pompiers que je suis, notamment en prévision du débat sur le potentiel numéro unique d'urgence. Le ministre de la santé fera bientôt des propositions au Premier ministre et nous aurons des réunions sur ce point, notamment sur une possible revalorisation financière - mais cela ne figurera pas dans le budget pour l'année 2021.

Quant à la question sur les effectifs de la police aux frontières, nous avons bien, conformément aux annonces du Président de la République, augmenté de façon considérable les effectifs de la police aux frontières au cours des trois dernières années, avec le déploiement de 1 000 policiers supplémentaires. Vous le savez, entre le temps des décisions budgétaires, des concours, de la sélection et de la formation les recrues, nous n'atteindrons que l'année prochaine les objectifs pour 2020. Une partie des 1 000 policiers supplémentaires ont été déployés pour répondre aux conséquences du Brexit, notamment à Calais où nous faisons face à une situation qui sera peut-être moins difficile que prévu, en raison d'un potentiel accord et d'une diminution du nombre de passages liée à la covid. Cependant, l'essentiel de ces policiers seront déployés aux frontières, notamment dans les aéroports et les ports.

De plus, je propose - et je l'ai annoncé lors de la prise de fonction de la nouvelle directrice centrale des CRS - d'utiliser une unité de gendarmes mobiles et une unité de CRS supplémentaires, pour assurer l'ordre public bien sûr, mais aussi aux frontières. Enfin, 300 militaires de l'opération sentinelle contribuent à la tenue de nos frontières. Nous obtenons ainsi un doublement des effectifs, sans créer de postes supplémentaires. En effet, je souhaite que les 1 500 policiers supplémentaires prévus pour l'année prochaine - hors renseignements territoriaux et DGSI - soient des postes créés en sécurité publique, dans les commissariats de notre pays. Nous aurons d'autres occasions de parler ensemble de la façon dont nous redéploierons des effectifs sur le terrain, en supprimant notamment les tâches indues, et j'en aurai une à présenter dans quelques instants à Mme la rapporteure, dans le cadre de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».

Au sujet de la loi de programmation, je la prépare, à la suite de la parution du Livre blanc et de ma lettre d'accompagnement. Des mesures réglementaires sont prévues, que je prendrai sans attendre la loi. Par ailleurs, la proposition de loi de M. Fauvergue et de Mme Thourot a été présentée, qui couvre une partie des propositions, notamment en matière de sécurité privée et de police municipale.

Certains sujets relèvent donc de la négociation. Vous avez mentionné le cycle horaire, monsieur le sénateur, mais c'est aussi le cas de la hiérarchie dans la police ou de la réforme de la préfecture de police de Paris.

Et puis, il y aura la loi de programmation dans laquelle il sera notamment question de la fameuse répartition entre gendarmes et policiers, qui passionnera sans doute tous les élus de France et le ministre de l'intérieur. Je souhaite que ce sujet soit abordé tranquillement, tout au long de l'année 2021, de manière à réfléchir à l'évolution de cette carte importante. La question du cyber a également son importance pour la police nationale et la gendarmerie, comme celles de l'intelligence artificielle et du numérique - en ce qui concerne les nouveaux formats mais aussi les réseaux, et notre ministère a un retard à rattraper dans ce domaine. Ces questions feront aussi l'objet d'une négociation tout au long de l'année 2021 et, pour répondre au sujet évoqué pour M. Leroy, je souhaite qu'une fois prête, cette loi soit discutée avec le Parlement, avec les syndicats et avec les élus. Il appartiendra ensuite au nouveau gouvernement de la République, issu des élections de l'année 2022, de choisir s'il reprend à son compte cette loi de programmation qui sera prête, s'il la modifie ou s'il l'abandonne - ce qui sera son droit le plus strict -, mais le travail sera fait, sur le modèle de ce qui a été réalisé pour les armées. J'insiste sur la nécessité de prendre le temps de cette longue et importante concertation. En effet, depuis le rattachement il y a plus de dix ans de la gendarmerie nationale au ministère de l'intérieur, aucune grande réforme de la police et de la sécurité de nos policiers et gendarmes n'a été mise en oeuvre, et nous devons donc prendre le temps de faire ce travail qui touche à la vie de ces femmes et de ces hommes, mais concerne aussi toutes les Françaises et tous les Français. Je crois avoir répondu à l'ensemble de vos questions et suis prêt désormais à présenter la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».

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