Intervention de Bernard Delcros

Réunion du 19 novembre 2020 à 14h30
Loi de finances pour 2021 — Discussion générale

Photo de Bernard DelcrosBernard Delcros :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances pour 2021 s’inscrit dans un contexte sanitaire, économique et social très compliqué – « exceptionnel », avez-vous dit, monsieur le ministre.

Cette situation fragilise des pans entiers de notre économie et expose les plus vulnérables de nos concitoyens, elle met à mal les finances de notre pays et limite notre capacité à tracer les perspectives dont nous aurions pourtant besoin.

Dans ce contexte inédit, le rôle de l’État est évidemment essentiel. Je le dis comme je le pense : l’État a été au rendez-vous pour maintenir le pays debout, grâce à un ensemble de mesures – on peut toujours discuter de telle ou telle de ces mesures, et nous le ferons, mais l’État a été globalement au rendez-vous.

Mais à côté de l’État, je veux insister sur le rôle tout à fait déterminant joué par les collectivités territoriales. Nous avons besoin de collectivités fortes pour soutenir l’activité économique et l’emploi dans les territoires et pour organiser la solidarité dans la proximité, au plus près de nos concitoyens.

Les collectivités territoriales constituent un point d’appui indispensable pour maintenir le pays en marche. C’est sur ce sujet des collectivités que je voudrais revenir à la lumière de cette première partie du projet de loi de finances ; mes collègues Sylvie Vermeillet et Vincent Delahaye évoqueront d’autres aspects de ce PLF.

Avec les articles 3 et 4, vous proposez un allégement des impôts de production à hauteur de 10 milliards d’euros : 7 milliards d’euros, par la suppression de la part régionale de CVAE, compensés par une part de TVA, et un peu plus de 3 milliards d’euros, avec la réforme des valeurs locatives des locaux industriels qui affecte le rendement de la CFE et de la taxe sur le foncier bâti du bloc communal, compensés par un prélèvement sur ressources.

C’est un pari pour favoriser la relocalisation de notre industrie et créer de nouveaux emplois, nos impôts de production étant deux fois plus élevés que la moyenne observée dans les pays de l’Union européenne. Toutefois, cette mesure affaiblit les recettes fiscales des collectivités et d’autres schémas seraient sans doute possibles – Sylvie Vermeillet reviendra sur cette question.

Quoi qu’il en soit, nous devons veiller sans faiblir à la dynamique et à la pérennité des modalités de compensation aux collectivités locales. Ces dernières doivent garder leurs marges de manœuvre, le pays en a besoin. Notre groupe sera très vigilant sur ce point et proposera plusieurs amendements en ce sens.

En ce qui concerne l’article 22 bis, j’étais favorable, dès lors que la taxe d’habitation était supprimée, à l’attribution d’une part de TVA aux départements et aux intercommunalités, comme l’avait proposé la commission des finances du Sénat. C’est un mécanisme pérenne et péréquateur alors qu’une compensation par une dotation de l’État, comme ce fut trop souvent le cas, reste aléatoire.

Toutefois, la crise que nous traversons révèle une faille non pas sur le principe d’une compensation par la TVA, mais sur le mécanisme voté l’année dernière et sur lequel s’appuie la dynamique de cette recette : il n’est sécurisé ni pour les collectivités ni pour l’État. Nous comprenons donc la disposition prévue à l’article 22 bis.

Je le dis tranquillement : l’effet d’aubaine, ici favorable aux départements et défavorable à l’État, pourrait demain s’inverser. C’est la raison pour laquelle nous devons trouver une solution équilibrée et durable. Celle que vous proposez à l’article 22 bis apporte une réponse justifiée et juste, mais seulement pour 2022, pas au-delà. Nous proposerons donc une autre solution afin de sécuriser durablement les recettes des collectivités et de l’État en cas de variation exceptionnelle des montants de la TVA perçue.

Par ailleurs, nous pensons que ces modalités de compensation de la réduction de la taxe foncière sur les propriétés bâties doivent être dissociées de la question des dérapages des dépenses sociales, notamment du RSA à hauteur de 1 milliard d’euros, à laquelle il convient bien évidemment d’apporter des solutions.

Nous proposerons également de corriger le traitement inéquitable entre les collectivités selon qu’elles subissent des pertes de recettes importantes, parce qu’elles gèrent leurs services et leurs équipements en régie, ou qu’elles ont délégué services et gestion des équipements à des délégataires qui, eux, peuvent bénéficier des aides de l’État.

Je voudrais enfin évoquer, de façon générale, la question des recettes des collectivités. Monsieur le ministre, cette année encore, nous modifions les recettes fiscales des collectivités locales. À chaque modification, et cela ne date ni d’aujourd’hui ni de 2018 – on pourrait parler de la taxe professionnelle, du Fonds national de garantie individuelle des ressources, le fameux FNGIR, dont il est encore question cette année dans le budget –, nous empilons des mécanismes de compensation plus ou moins fiables, plus ou moins durables, lesquels finissent par fragiliser les ressources des collectivités.

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