Nous savions tous, depuis l’annonce du deuxième confinement, que ce budget était mort-né. Nous regrettons cependant qu’une saisine trop tardive du Haut Conseil des finances publiques ne permette pas au Gouvernement de nous donner à débattre, d’ici quelques minutes, d’un texte cohérent, et qu’il faille donc attendre, peut-être, la fin de l’examen de la première partie, voire le vote définitif, pour avoir quelque chose qui « marche » dans la situation que nous vivons.
Pourtant, nous sommes aujourd’hui face au dernier « vrai » budget du quinquennat. Avons-nous devant nous un budget de relance, comme le dit le Gouvernement, ou plutôt un plan de rattrapage, comme l’a si justement qualifié M. le rapporteur général ? Ce budget ne présente-t-il pas l’avantage de faire plaisir à tout le monde à dix-huit mois de l’élection présidentielle – à cette fin, vous ressortez des tiroirs, ou des armoires, des dossiers qui s’y étaient perdus ?
Il nous semble qu’il y a dans ce plan de relance, qui vise pourtant à toucher tout le monde, des oubliés, notamment les plus démunis – cela a déjà été dit à plusieurs reprises. L’augmentation générale des minima sociaux, réclamée sur certaines travées, doit selon nous s’inscrire dans un vrai débat sur la redistribution et l’architecture de nos prélèvements et transferts destinés aux plus précaires. Nous soutiendrons, dans le cadre de ce texte, des mesures exceptionnelles et temporaires, pour favoriser l’emploi des jeunes notamment.
Je note aussi une absence de mesures d’économies structurelles, visant certainement à ne pas déplaire. Les crédits des missions baissent facialement… pour mieux se retrouver dans le plan de relance. Le groupe Les Républicains n’a pas peur de dire qu’il va falloir collectivement faire des efforts. Je pense à l’augmentation du temps de travail dans la fonction publique d’État, à la réforme de l’aide médicale de l’État (AME), ainsi qu’à l’allongement de la durée de cotisation, que nous avons votée lors de l’examen du PLFSS.
« Le meilleur temps pour réparer sa toiture, c’est lorsque le soleil brille », disait John Fitzgerald Kennedy.
Nous sommes entrés fragilisés dans cette crise. En 2019, la France était le seul pays de l’Union européenne, avec la Roumanie, à avoir un déficit supérieur à 3 % de son PIB, quand les deux tiers des États européens étaient en excédent.
J’ai déjà dénoncé, par le passé, le recul de la majorité sur la réduction des effectifs de la fonction publique : d’une réduction de 50 000 équivalents temps plein (ETP) dans le programme présidentiel, nous étions passés à 10 500 ETP en moins ; aujourd’hui, dans le PLF que vous nous proposez, nous constatons une baisse de 157 ETP…
Cette relance que vous nous annoncez, nous considérons qu’elle débute avec six mois de retard. En juillet, notre groupe avait déjà proposé un certain nombre de mesures ; 90 % des dispositions présentées par le Gouvernement n’entreront en vigueur qu’en 2021 ou en 2022 ! C’est beaucoup trop tard ; l’Allemagne, par exemple, a commencé bien avant nous.
Certaines des mesures que vous nous avez refusées en juillet ont été reprises par le Gouvernement en septembre. Je citerai, entre autres, la baisse des impôts de production, les mesures en faveur des jeunes et de l’apprentissage, ou encore l’extension de la prime remplaçant le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) pour les neuvième et dixième déciles.
Je relève donc avec malice que nous n’avons pas toujours de mauvaises idées !
Nous soutiendrons bien évidemment l’ensemble des dispositifs qui visent à baisser les impôts de production. Il n’est question en la matière, malheureusement, que d’une goutte d’eau : même en comptant ces mesures, nous resterons encore très loin de l’Allemagne et des autres pays de l’Union européenne.
Cette relance, je constate par ailleurs que vous la financez majoritairement par la dette. Le ministre de l’économie – je vais le citer à plusieurs reprises ; je regrette qu’il ne soit pas là pour nous répondre – l’a dit le 2 septembre : « C’est le temps de la dépense publique. » Un de ses prédécesseurs avait pourtant eu le courage de dire, en avril 1998, à l’Assemblée nationale : « Il nous faut abandonner l’idée qu’en matière de dépenses publiques, “plus” est synonyme de “mieux”. » Vous aurez tous reconnu là les propos de Laurent Fabius…