Intervention de Christine Lavarde

Réunion du 19 novembre 2020 à 14h30
Loi de finances pour 2021 — Discussion générale

Photo de Christine LavardeChristine Lavarde :

Nous proposerons une hausse des crédits de la prime à la conversion, un encouragement au télétravail et un déblocage anticipé de l’épargne salariale pour l’achat d’un véhicule propre ou la réalisation de travaux de rénovation thermique.

Il nous semble également que l’accès à l’excellence environnementale ne doit pas être ouvert uniquement aux plus aisés. Je donnerai deux exemples. Pour un foyer dont le revenu fiscal de référence par part est inférieur à 13 489 euros, le montant maximal d’aide publique pour l’achat d’un véhicule électrique est de 12 000 euros. J’ai eu beau consulter les catalogues de plusieurs constructeurs, je n’ai pas pu trouver de voiture dont l’achat représenterait, pour un tel ménage, un reste à charge inférieur à une année de son revenu fiscal de référence par part. Je me demande comment ce foyer passera à l’acte d’achat…

Par ailleurs, l’incitation à la rénovation thermique reste faible pour les propriétaires bailleurs, car elle est fortement conditionnée, notamment par un encadrement des loyers. Et ce ne sont pas eux qui paient ensuite les factures de chauffage des logements…

Ce budget, vous l’aurez compris, ne nous rassure pas et ne donne pas confiance dans l’avenir. Les contribuables s’effraient de l’envolée de la dette de l’État et de la dette sociale ; ils savent qu’il faudra bien les rembourser. Ils s’attendent tôt ou tard à voir leurs impôts augmenter – j’ai bien noté que Bruno Le Maire s’était engagé à ce que tel ne soit pas le cas tant qu’il serait ministre ; mais je suis bien obligée de constater aussi qu’il est en CDD… §L’épargne forcée du premier confinement va de plus en plus devenir une épargne de précaution.

Les entreprises, elles, s’inquiètent des effets de stop and go : les milliards pleuvent aujourd’hui… mais demain ? Un acteur économique raisonnable ne s’engage pas dans des dépenses de recherche et développement ou dans une révolution de son organisation s’il ne sait pas de quoi demain sera fait.

Quant aux élus, ils se sentent de plus en plus dépossédés. Une nouvelle catégorie de sous-préfets est apparue, et je note que seule une dizaine de sous-préfets ont été nommés à la mi-novembre, ce qui m’inquiète s’agissant du calendrier de la relance.

Année après année, les collectivités perdent leur autonomie fiscale au profit d’une hausse des reversements d’impôts d’État, qui pourront demain faire partie des variables d’ajustement.

La parole de l’État, elle, est sans cesse remise en cause. Je citerai trois exemples tirés de ce seul projet de loi de finances : la remise en cause des dispositions votées l’année dernière quant à la compensation de la perte des recettes de taxe d’habitation des départements ; la remise en cause des contrats d’achat d’énergie photovoltaïque signés avec l’État avant 2011 ; la remise en cause de la trajectoire du malus, le seuil de déclenchement baissant de 7 grammes par an alors que l’engagement portait sur une baisse de 5 grammes par an seulement sur le quinquennat.

Contrairement à ce que le Gouvernement indiquait dans le cadre du débat d’orientation des finances publiques, nous n’avons pas aujourd’hui un « budget de relance et de souveraineté au service des priorités écologiques et sociales ». Nous n’avons pas un budget qui donne confiance dans l’avenir.

Rien ne sera possible, pourtant, sans un changement de comportement des consommateurs, qui doivent être incités à dépenser l’épargne de précaution qu’ils ont accumulée depuis plusieurs mois. Tant que les Français n’auront pas confiance dans la reprise de l’économie, l’épargne forcée du premier confinement continuera à se transformer durablement en une épargne de précaution. Nous vous le disons : sans confiance, pas de croissance !

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