Intervention de Jean-François Rapin

Réunion du 19 novembre 2020 à 14h30
Loi de finances pour 2021 — Article 31 et participation de la france au budget de l'union européenne

Photo de Jean-François RapinJean-François Rapin :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je salue d’abord notre rapporteur spécial, Jean-Marie Mizzon, dont la présentation des enjeux liés au prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne est très éclairante.

La contribution prévue à l’article 31 matérialise la participation de la France au budget de l’Union européenne pour la première année du nouveau cadre financier pluriannuel, un CFP en discussion depuis le mois de mai 2018, et je sais de quoi je parle…

Ce nouveau CFP, complété par un instrument de relance en réponse à la crise de la covid-19, devait marquer une nouvelle étape pour l’Union européenne, une étape de solidarité, dont l’emprunt réalisé au nom de l’Union européenne est la marque symbolique.

Ce paquet budgétaire venait de faire l’objet d’un accord entre la présidence allemande du Conseil européen et le Parlement européen, qui a obtenu une rallonge, en l’occurrence une belle rallonge. Les signaux semblaient donc au vert. Mais la Hongrie et la Pologne, rejointes par la Slovénie, ont bloqué le processus, comme M. Mizzon l’a expliqué.

Le point de blocage est connu : c’est leur opposition au mécanisme de conditionnalité au titre de l’État de droit. Ce point de blocage n’est pas une surprise. Comme le Sénat l’avait souligné dès sa première résolution sur le CFP, la mise en œuvre d’une telle conditionnalité dans l’accès aux fonds européens suppose des critères objectifs et une méthode d’appréciation transparente. C’est aujourd’hui le cœur du sujet.

Ce blocage devrait être évoqué aujourd’hui au Conseil européen. Hier, lors des questions d’actualité au Gouvernement, le secrétaire d’État chargé des affaires européennes nous a indiqué que « des solutions pratiques pouvant passer par certaines clarifications techniques de ce mécanisme » étaient à l’étude. Mais, monsieur le secrétaire d’État, vous avez ajouté : « En dernier ressort, s’il le faut, nous regarderons comment avancer sans les pays qui bloquent, car l’Europe ne peut pas être retenue en otage par un certain nombre de gouvernements ne souhaitant pas respecter le socle essentiel de notre projet politique. » Je suis d’accord avec vous sur ce point.

Néanmoins, ce ne serait pas le moindre des paradoxes : au moment de la fin des négociations avec le Royaume-Uni et alors que l’Europe se veut plus solidaire, plus forte et plus résiliente, nous laisserions certains États membres au bord du chemin…

Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite donc que vous nous éclairiez sur les solutions pratiques à l’étude et que vous nous confirmiez qu’en tout état de cause, il n’y aura pas de décalage dans la mise en œuvre du CFP et du plan de relance français.

Mais ce qui compte plus encore à mes yeux, c’est de partager de nouveau la conviction que le tout est plus grand que la somme des parties, que l’Europe, fondée sur des valeurs communes, porte un projet d’avenir que nous assumons collectivement : un projet qui répond aux attentes et aux besoins de nos concitoyens en matière de sécurité, de gestion des frontières, de développement économique et social ; un projet qui répond aux défis actuels en matière de numérique et de lutte contre le changement climatique.

Tel sera l’enjeu essentiel de la Conférence sur l’avenir de l’Europe. Si nous ne parvenons pas à redonner du sens à l’ambition européenne et à le faire partager à nos concitoyens, nous irons au-devant de sérieuses difficultés.

Monsieur le secrétaire d’État, l’une des clés se trouve ici, au Sénat, et, plus largement, dans les Parlements nationaux. C’est à nous que reviendra la responsabilité de ratifier la décision sur les ressources propres. C’est à nous que reviendra la responsabilité de permettre l’introduction de nouvelles ressources propres sur la feuille de route qui a été négociée.

La commission des affaires européennes du Sénat prendra pleinement sa part dans ces débats au cours des mois à venir.

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