Méfions-nous des images. Il faut parfois savoir reculer pour mieux pour remporter la bataille ! C'est une question de stratégie.
Quant aux moyens, les unités de maintien de l'ordre disposent de grenades lacrymogènes et de désencerclement. On peut mobiliser des canons à eau. Le maintien de l'ordre varie selon qu'on le fait à Paris ou à Laval, et les unités s'adaptent. Comme l'a dit le ministre, on travaille en permanence à faire évoluer nos dispositifs pour les adapter à des formes qui s'apparentent parfois à de la guérilla urbaine. Nous sommes face à des individus rompus à l'affrontement, parfaitement identifiés, qui connaissent les moyens de la police, ses limites d'action, ses stratégies, et qui s'adaptent très vite. Ces individus sont à l'ultragauche, ont des camps d'entraînement, sont aguerris et n'ont pas peur d'aller au contact. Nous devons donc répondre à une nouvelle forme de guérilla urbaine. À Paris, des unités ont su évoluer pour s'adapter au caractère agile de ces agitateurs. Ceux-ci changent d'habit entre le moment où ils arrivent à la manifestation et le moment où ils s'en prennent aux forces de l'ordre. Ils cachent à l'avance leurs projectiles et leur matériel dans des halls d'immeubles ou des caves pour échapper aux fouilles et pénétrer tranquillement dans le périmètre de la manifestation. Ils vont ensuite le récupérer, se changer, s'équiper ; une fois que l'affrontement a commencé, ils baissent leur capuche et se donnent des signaux de reconnaissance grâce aux réseaux sociaux ; lorsque le déchaînement de violence est terminé, ils quittent la manifestation en se débarrassant de leurs vêtements et rejoignent tranquillement la station de métro pour échapper à la police. Il est difficile de prévenir ce type de situations, mais nous y travaillons, nos services de renseignement sont mobilisés pour suivre ces mouvances qui n'ont d'autre objectif que de déstabiliser nos institutions, la République, et nous faire basculer dans des régimes autoritaires.
J'en viens à la question des suicides dans la police, question éminemment douloureuse qu'il est difficile de résumer par des chiffres : un suicide, c'est toujours un suicide de trop ! Les chiffres de 2019 étaient catastrophiques et nous ont tous touchés. Nous sommes parfois dans une forme d'impuissance face à ces phénomènes ; on essaie de comprendre, sans pouvoir expliquer. Les chiffres semblent en amélioration cette année : 31 suicides à ce stade, contre 59 l'an dernier. Un programme de mobilisation contre les suicides dans la police a été lancé : des plateformes téléphoniques peuvent être contactées nuit et jour, sept jours sur sept, par chaque fonctionnaire qui le souhaite, qui se trouve en difficulté ou qui constate qu'un autre fonctionnaire est en difficulté. Un dispositif de soutien prendra en charge la personne, avec la possibilité, c'est déjà arrivé, d'assurer une prise en charge médicale urgente. Le service de soutien psychologique opérationnel comporte des psychologues répartis sur tout le territoire, capables d'intervenir pour traiter des situations particulièrement difficiles, notamment quand des policiers sont blessés ou, pire, tués, pour accompagner l'entourage professionnel et familial. On a aussi confié à une société extérieure le soin d'auditer notre système de prévention contre le suicide pour voir ce que l'on pourrait améliorer.
Enfin, j'en viens à la question de la clef d'étranglement sur laquelle vous m'aviez déjà interrogé lors d'une précédente audition. M. Lauze a rendu son rapport. Je l'ai transmis au ministre, qui m'a demandé de lui faire des propositions d'ici à la fin de l'année, sur la base de ce rapport. Vous comprendrez donc que je ne puisse à ce stade m'exprimer que sur la méthode, tant que le ministre ne sera pas exprimé sur le fond.