Intervention de Jacques Grosperrin

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 2 décembre 2020 à 8h45
Audition de Mme Nathalie élimas secrétaire d'état auprès du ministre de l'éducation nationale et des sports chargée de l'éducation prioritaire

Photo de Jacques GrosperrinJacques Grosperrin :

Madame la ministre, j'ai relu avec beaucoup d'intérêt le rapport Azéma-Mathiot, mais également le rapport de nos collègues Lafon-Roux, qui évoque les nouveaux territoires de l'éducation. Je pense qu'il est important que vous vous en inspiriez, car ils traitent de la ruralité et de certaines priorités impliquant les acteurs territoriaux dans un travail collégial.

L'éducation prioritaire repose depuis de nombreuses années sur deux branches, la justice sociale et l'élévation du niveau de connaissances des élèves. Le premier article du code de l'éducation dit bien qu'il faut répartir les moyens en tenant compte des différentes situations économiques et sociales.

Maintes réformes ont été mises en place depuis 1981. L'expérimentation de 2015 concerne une quarantaine de départements. Les évaluations ne sont pas toujours effectives, et la Cour des comptes estime elle-même que les choses ne se sont pas autant dégradées qu'on le prétend mais se sont stabilisées.

On ne peut que se réjouir de la mise en place d'un secrétariat d'État. J'espère que ce n'est pas qu'un équilibre politique destiné à permettre à certaines formations de se retrouver au sein de la majorité, et que les choses iront plus loin.

Le temps de l'éducation, madame la ministre, n'est pas le temps politique. Il s'agit d'un temps long. Vous évoquez la prochaine rentrée et l'expérimentation qui doit avoir lieu. Ce sera la dernière rentrée du ministre de l'éducation et la première pour ce qui vous concerne. Vous avez parlé de l'évaluation des pratiques, mais celle-ci est assez compliquée à mettre en place. Le temps est trop court.

Vous auriez pu agir différemment en intervenant sur les primes pour les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), les assistants d'éducation (AED), les conseillers pédagogiques de circonscription, les chefs d'établissement, les « écoles orphelines ».

Une clarification apparaît nécessaire : il existe 350 REP+. Vous avez dit que vous n'y toucheriez pas. Vous faites bien, car ces REP+ correspondent en effet à 350 réseaux sinistrés.

On compte actuellement 700 écoles en REP. 30 % de celles-ci n'ont pas lieu à y figurer. Il faudra faire preuve de courage politique, car on pourrait imaginer que la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) dispose de ses pilotages nationaux avec, au niveau local, ce qu'on pourrait appeler une « académisation » de leur gestion. Je crois que celle-ci passera uniquement par les dotations horaires globales (DHG). Il conviendra d'attribuer des moyens supplémentaires aux recteurs afin qu'ils puissent mener la politique qui réponde à l'ambition que vous avez évoquée tout à l'heure.

Il est important que le recteur puisse accorder une labellisation sur une durée d'au moins quatre ans. Il faut soutenir les bons chefs d'établissement.

Je pense par ailleurs qu'il serait bon de classer les établissements REP en quatrième catégorie, d'accorder des bonifications aux professeurs, de prévoir davantage d'infirmières et de mettre en place un vade-mecum. Les collectivités locales, le ministère de l'éducation nationale, l'agriculture ont aussi un rôle à jouer dans ce domaine.

Je voudrais également parler d'argent, même si c'est un peu vulgaire. S'il s'agit d'un simple affichage, on n'arrivera pas à régler le problème de l'éducation prioritaire. On ne peut accepter que moins de 3 % de 2 milliards d'euros soient utilisés pour la formation initiale et la formation continue. Il faut être formé pour enseigner dans un établissement REP. Or ce n'est pas le cas. Il faut donc allouer de nouveaux moyens aux académies et non les redéployer. Ce serait un signe fort pour les enseignants. Tout le monde sera vigilant sur ce point.

Un indicateur de position sociale (IPS) a été mis en place par la DEPP (direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance). Il faut l'utiliser. Je ne suis pas sûr que la Bretagne ait besoin d'établissements classés en REP, même si certains élus mènent une action politique en ce sens. Je ne vais pas me faire que des amis, mais si on veut sortir de cette grande détresse et de cette souffrance, il faudra procéder à des choix politiques.

Par ailleurs, pourquoi avoir choisi ces quatre académies pour l'expérimentation ? On aurait très bien pu retenir la Seine-Saint-Denis ou la région lyonnaise...

Enfin, je crains que les conditions politiques et sanitaires ne soient pas réunies pour mener à bien cette expérimentation. Êtes-vous en phase sur la suppression des 70 REP, l'« académisation » et les choix concernant les éducateurs physiques et sportifs (EPS) ?

Des moyens supplémentaires - le nerf de la guerre - seront-ils alloués ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion