Intervention de Pedro Novo

Délégation aux entreprises — Réunion du 26 novembre 2020 à 8h30
Table ronde sur les réponses des acteurs de la politique d'aide aux entreprises apportées aux difficultés des entreprises françaises à l'étranger

Pedro Novo, directeur exécutif en charge de l'export de Bpifrance :

Il existe des inégalités selon les régions et les entrepreneurs concernés. Ces inégalités ont été renforcées par la crise, qui a sans doute eu un effet déclencheur. Des zones comme l'Asie ou l'Afrique se sont manifestées plus fortement que d'autres.

À travers la diplomatie française, les entrepreneurs français de l'étranger tentent de se rendre éligibles aux dispositifs locaux, même si cela ne règle pas tout. Ce travail de proximité dépend du droit local. Il nous est très difficile d'adresser une réponse globale avec un dispositif général. Un effort de simplification est donc nécessaire pour répondre aux difficultés rencontrées par les entrepreneurs. Il existe également un problème de définition et de recensement. Tant que l'enjeu n'aura pas été quantifié, il nous sera difficile d'adapter l'ingénierie financière. Le déploiement d'outils que nous pourrions mettre en oeuvre nous conduira à créer des produits et services mieux identifiés et adaptés, voire à innover. Nous répondrons après la crise dans une période de recouvrement qui sera plus ou moins longue. Les chefs d'entreprises installés en Chine nous rappellent que cette crise n'est que temporaire, malgré toute sa violence. Nous devrons donc adopter une vision de long terme en ce qui concerne la visibilité, l'adaptation et la création, plutôt que de se contenter de réagir à l'émotion du moment.

Les statuts de Bpifrance ne nous autorisent pas à proposer des financements à une entreprise locale sans lien direct avec une entreprise française. Les crédits export s'adressent à une clientèle de PME ou ETI. À cette ingénierie s'ajoutent les PGE. Il s'agit d'un outil qui concerne 115 milliards d'euros et 615 000 entreprises. Une partie du dispositif a permis d'irriguer des entreprises étrangères détenues par des entreprises françaises pour les soutenir dans leur besoin de trésorerie. Deux cas ont été identifiés : une logique de fonds de garantie ; la capacité de la France à financer ses entreprises internationalisées.

Beaucoup d'entreprises françaises présentent la spécificité d'avoir des modèles locaux, internationalisés et filialisés. Notre gamme existante doit être rendue plus visible, notamment à travers le PGE. Les prêts que nous développons, comme le prêt Croissance International permettent, au côté des financements bancaires, de financer un projet international de renforcement d'une filiale, quel que soit le pays, en Europe ou dans le grand export. L'idée est d'accéder à une aide en France pour l'injecter dans une filiale où l'accès au crédit local est plus difficile. Dans ces conditions, 600 millions d'euros sont déjà injectés chaque année dans des projets internationaux.

Un dispositif permet par ailleurs de garantir l'injection de cash d'une société française vers une de ses filiales en dehors de l'espace européen. Les États-Unis figurent en tête des destinations, suivis de la Chine puis l'ASEAN et l'Afrique. Le but est de se protéger contre l'échec économique. En cas de difficulté, une entreprise se trouvant dans l'obligation de liquider sa filiale sera indemnisée en France à hauteur de 50 % de ce qu'elle a injecté, dans la limite de 1,5 million d'euros de risque. Ce dispositif peu connu intervient auprès des entreprises internationalisées qui ont injecté du cash à travers un PGE ou un prêt sans garantie de Bpifrance. Il convient de faire évoluer les statuts de Bpifrance si nous souhaitons financer directement des acteurs locaux, ce que nous ne réalisons pas à l'heure actuelle sans un contrat commercial permettant de mettre en place un crédit export.

Dans la même logique, l'assurance prospection permet aux entreprises de se projeter. Le plan de relance assure sur les trois ans à venir un budget considérable pour que nos entreprises françaises poursuivent leurs actions sur les marchés internationaux. Ces entreprises seront indirectement au contact de certaines entreprises françaises à l'étranger (EFE). Nous devrions favoriser ce lien, dans une logique de tiers de confiance. Nous devons avoir un impact indirect sur les entreprises françaises qui exportent et sont présentes dans ces pays. Un travail doit donc être mené pour renforcer le lien entre les acteurs qui distribuent des produits agroalimentaires français et ceux qui leur vendent. Il est possible d'injecter du cash à ces derniers avec l'ingénierie existante, le lien doit être renforcé pour qu'il arrive à destination.

Dans le cadre de cette assurance prospection, nous entretenons des liens étroits avec Proparco. Une note des conseillers du commerce extérieur rappelle que 87 % des répondants à une enquête ne bénéficient pas d'aide Covid-19 dans le pays où elles sont implantées. Il s'agit très majoritairement de TPE et PME. L'assurance prospection a été adaptée pour soutenir les TPE en France qui pourraient devenir des relais pour les TPE locales. Celles-ci auront accès à une assurance prospection dédiée de 10 000 à 40 000 euros qui leur permettra de mettre en oeuvre des actions de développement international. Dans le cadre de ces actions, il convient de faire apparaître les destinations en souffrance. Bpifrance peut également soutenir une entreprise française qui souhaiterait accéder localement à du crédit. Dans ce cas, la banque locale se retourne vers la banque française de son client demandeur. Celle-ci peut à son tour se retourner vers Bpifrance pour bénéficier d'une couverture.

Beaucoup de demandes d'entrepreneurs remontent depuis l'Afrique. Ceux-ci avaient auparavant l'habitude de se débrouiller tout seuls. Le secteur public africain est déjà bien cadré mais nous avons renforcé nos activités vis-à-vis du secteur privé. Nous mettons en oeuvre des initiatives pour faciliter le financement du secteur privé africain, notamment par une relation renforcée avec la France. Il est nécessaire de favoriser les acteurs locaux du financement avec des garanties, pour qu'ils puissent travailler plus facilement avec les EFE présents sur place. Nous agissons directement auprès des entreprises détenues par des Français dans toutes les parties du monde, qui sont des TPE pour plus de 80 % d'entre elles. L'ingénierie requise n'est pas accessible à un financement direct. Une logique indirecte doit donc être adoptée. Il convient de renforcer les moyens, la gouvernance, la liquidité et les garanties auprès des acteurs en charge du financement local.

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