L’affaire est grave au regard du fonctionnement de nos institutions et de la République.
La solitude du juge d’instruction est une question ancienne. Déjà, en 1985, Robert Badinter avait présenté une loi allant dans le sens de la collégialité des juges d’instruction. Hélas ! le gouvernement qui a suivi n’a pas donné suite.
Dans la loi de 1993, le législateur a considéré qu’il devait y avoir cosaisine « lorsque la gravité ou la complexité de l’affaire le justifie ». En pratique, la cosaisine fut peu utilisée. Je ne reviendrai pas sur les torts respectifs des gouvernements du passé, monsieur Fauchon.
À la suite du drame d’Outreau, l’Assemblée nationale a constitué une commission d’enquête parlementaire. Au terme de débats qui ont été très largement suivis et d’un immense travail, elle a présenté des propositions, la principale étant l’instauration de la collégialité des juges d’instruction.
Il en est résulté la loi du 5 mars 2007, qui a été votée dans les conditions qui ont été rappelées. Cette loi, monsieur le secrétaire d'État, c’est le gouvernement précédent, dont vous êtes proche, qui l’a élaborée, proposée, soutenue et qui s’est engagé à la mettre en œuvre.
Et aujourd’hui, au détour d’un projet de loi de simplification du droit, le Gouvernement présente tout à coup un amendement, qui n’a donné lieu à aucune concertation : il a été déposé non pas pour les raisons que vous avez exposées, monsieur le secrétaire d’État, mais parce que le Président de la République a décidé, un beau jour, qu’il ne devait plus y avoir de juge d’instruction, comme il avait annoncé la suppression de la publicité sur les chaînes publiques de télévision devant une ministre de la culture très surprise.