Introduit par un amendement gouvernemental en commission des affaires économiques, cet article complète l’article 102 de la loi du 30 septembre 1986 en instituant un deuxième fonds dit « d’aide complémentaire » pour aider sans condition de ressources les foyers qui ne seront pas couverts par la TNT à acquérir et à installer un équipement de réception satellitaire.
Nous ne pouvons que nous réjouir de l’instauration d’un tel fonds puisqu’il rejoint une préoccupation que nous avions exprimée par un amendement, déposé en première lecture, réclamant la remise d’un rapport gouvernemental au Parlement sur le soutien financier pouvant être apporté aux foyers ne résidant pas dans une zone de couverture et obligés de s’équiper de moyens d’accès alternatifs au très haut débit.
L’instauration de ce deuxième fonds d’équipement parabolique nous laisse cependant quelque peu perplexes. C’est pourquoi nous avions souhaité préciser, par amendement, qu’il compenserait intégralement les dépenses d’équipement parabolique des ménages habitant dans des zones non couvertes.
Cet amendement a malheureusement subi les foudres de l’article 40 ! Je tiens néanmoins à faire part de mes interrogations quant à la mise en œuvre effective de cette seconde aide aux foyers.
D’abord, comment sera financé ce fonds « 102 » ? Si j’ai bien compris, il y aurait 96 millions d’euros pour les deux fonds, soit 56 millions d’euros supplémentaires par rapport aux 40 millions d’euros budgétés pour 2010, pour financer le GIP et le fonds d’aide sous condition de ressources, mis en place par la loi du 5 mars 2007 – article 102 de la loi du 30 septembre 1986. Je tiens à souligner que les 40 millions d’euros initiaux n’étaient pas intégralement affectés au premier fonds, le GIP devant inévitablement faire face à des frais de fonctionnement.
Ensuite, comment seront financés les 56 millions d’euros supplémentaires annoncés pour la mise en œuvre du deuxième fonds ? Ils ne sont pas, à ma connaissance, budgétés au titre de la loi de finances pour 2010. J’ose espérer qu’ils ne seront pas ponctionnés sur le programme 313 de la mission « Médias », initialement dédié à la compensation de la perte de recettes publicitaires des chaînes publiques et dont les crédits – 457 millions d’euros en 2010 – sont en baisse de 15 millions d’euros par rapport à 2009 et, de surcroît, doivent assurer une nouvelle dépense, les 40 millions d’euros finançant le GIP et le premier fonds !
J’espère néanmoins que les crédits sont budgétés pour assurer, dès le 2 février prochain, la prise en charge de la nécessaire réception satellitaire des foyers alsaciens qui basculeront à cette date, suivis de très près par ceux de Basse-Normandie.
Par ailleurs, je m’interroge sur le nombre de foyers appelés à être pris en charge par ce fonds « parabole ». Vous avez indiqué que l’aide serait de 250 euros par foyer. Je suppose que Bercy a fait fonctionner sa calculette avant de faire cette annonce ! En tout cas, moi, je l’ai fait : cela correspond à quelque 384 000 foyers.
Cela me semble bien peu lorsque l’on sait qu’environ 26 millions de foyers français disposent d’un téléviseur et que quelque 5 %, soit 1, 3 million d’entre eux, ne bénéficieront pas d’une couverture TNT. Pas même un tiers de ces foyers non couverts disposeraient de l’aide à la parabole.
Sauf à ce que les chaînes soient appelées à contribuer aussi au financement de ce fonds – je rappelle qu’elles participent déjà au financement du GIP au prorata de leurs voix –, il me semble difficile de demander aux chaînes un effort supplémentaire soudain, non prévu par le contrat d’objectifs pour les chaînes publiques. J’en resterai donc au strict financement de 56 millions d’euros, attribué par l’État au deuxième fonds.
Certes, me direz-vous, certains foyers seront bénéficiaires du premier fonds, sous condition de ressources, mais ils seront bien peu si j’en juge par le faible montant dont est doté ce fonds.
Ensuite, il convient de retrancher les foyers des communes ayant bénéficié d’une compensation financière non intégrale pour mise en œuvre d’une solution permettant de recevoir la TNT dans les zones non couvertes, cette aide aux collectivités n’étant pas cumulable avec l’attribution du fonds parabole aux foyers de ces collectivités.
Nous avons déjà évoqué, lors du débat sur l’article 1er DC, nos craintes pour les foyers situés dans les zones de montagne, les zones d’habitat dispersé, qui seront exclus de toute aide, la commune ayant bénéficié d’une aide à l’installation d’un émetteur numérique qui, en fin de compte, ne couvrira pas les foyers situés sur son territoire, mais en zone retranchée.
Quelque 384 000 heureux élus pourront donc bénéficier de 250 d’euros !
Je ressors ma calculette et constate la difficulté à s’équiper pour une telle somme ! Le prix d’une parabole ordinaire permettant de capter les chaînes TNT dépasse le plus souvent 200 euros et peut même être voisin de 300 euros – 260 euros pour TCI Cabling, 299 euros pour Abix… –, voire supérieur : on en trouve à 341 euros ! Il va de soi que plus la réception est difficile, plus l’équipement est onéreux !
À ce coût d’équipement s’ajoutera celui de l’installation de la parabole, chacun n’étant pas en mesure de grimper sur son toit pour procéder à l’opération qui requiert des compétences techniques particulières : il est difficile de trouver un technicien procédant à l’installation pour moins de 100 euros, certains demandant jusqu’à 300 euros, voire 350 euros ! En Ardèche, par exemple, aucun équipementier n’est référencé. Il faut faire appel à des sociétés situées dans le département voisin, la Drôme.
En additionnant les coûts d’équipement à ceux d’installation de la parabole, on constate que les 250 euros seront vite dépassés !
Ce fonds a certes le mérite d’exister, mais il concernera très peu de foyers et ne prendra en charge qu’une partie de leur équipement satellitaire.