Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avec une augmentation de 18 % de ses crédits pour 2021, la mission « Santé » semble pleine de promesses. Mais une lecture plus attentive douche rapidement les espoirs.
Sur 200 millions d’euros de crédits supplémentaires, plus de 70 % vont à l’aide médicale de l’État et 25 % viennent en soutien à l’agence de santé de Wallis et Futuna.
Consacré à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l’offre de soins, le programme 204 perd chaque année un peu plus de sa substance, en l’absence de véritable vision stratégique.
Alors que le financement des opérateurs sanitaires concentrait près de 48 % de ses crédits en 2014, il en représente désormais moins du quart.
De plus, le transfert du financement des agences à l’assurance maladie autorise le Gouvernement à fixer le montant des dotations des opérateurs sanitaires par arrêté, sans possibilité pour le législateur d’en prendre connaissance lors de l’examen du PLFSS. La crise sanitaire actuelle a pourtant démontré que la veille et la sécurité sanitaires constituaient des missions plus que jamais régaliennes. C’est pourquoi la commission des affaires sociales réclame le rapatriement des crédits de Santé publique France et de l’ANSM au sein du budget de l’État.
Enfin, je veux m’attarder sur l’aide médicale de l’État, dont la dépense devrait franchir le seuil symbolique de 1 milliard d’euros en 2021. Depuis plusieurs années, le Sénat plaide pour une réforme structurelle du dispositif qui sécurise sa soutenabilité et le recentre sur sa vocation. Or l’AME continue de faire l’objet de détournements.
Le rapport établi en 2018 par les inspections confirme le vécu de nombreux professionnels sur le terrain : il existe bien un phénomène de tourisme médical, en vertu duquel des personnes qui se font diagnostiquer dans leur pays viennent poursuivre leur traitement en France. À cela s’ajoutent des mécanismes de fraude organisée qui se manifestent notamment par la « mégaconsommation » de psychotropes et de stupéfiants ou encore par l’attribution de fausses attestations de résidence.
L’encadrement des conditions d’accès à l’aide médicale de l’État, introduit par le Gouvernement à la fin de l’année 2019, ne constitue qu’un ensemble de demi-mesures qui ne permettront pas de juguler ces abus.
C’est la raison pour laquelle notre commission a souhaité recentrer le panier de soins de l’AME sur sa vocation initiale, à savoir la prise en charge des soins urgents et la prévention, dans le cadre d’un dispositif renommé « aide médicale de santé publique ». Elle entend également favoriser l’accès à cette aide pour les personnes qui en ont véritablement besoin, par la création d’un programme de soutien aux initiatives permettant d’aller à leur rencontre pour leur proposer des soins de prévention.
Dans ces conditions, sous réserve de l’adoption de ses deux amendements, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2021.