Intervention de Jean-François Rapin

Commission des affaires européennes — Réunion du 8 décembre 2020 à 8h15
Institutions européennes — Débat préalable au conseil européen des jeudi 10 et vendredi 11 décembre 2020 en présence de m. clément beaune secrétaire d'état auprès du ministre de l'europe et des affaires étrangères chargé des affaires européennes

Photo de Jean-François RapinJean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes :

Nous nous réunissons ce matin pour le traditionnel débat préalable au Conseil européen qui se tiendra jeudi et vendredi prochain - à cet égard, j'ai demandé au président Larcher de modifier à l'avenir l'organisation de nos travaux en vue de tenir ce débat en séance publique plutôt qu'en commission.

Ce débat préalable, qui devait se tenir jeudi dernier, a été décalé car, Monsieur le ministre, vous étiez ce jour-là en déplacement, accompagné du Premier ministre notamment, sur les terres du Pas-de-Calais, pour dresser un état des lieux des conséquences du Brexit sur la pêche et les enjeux économiques liés à la traversée de la Manche.

Ce Conseil européen devait être principalement consacré à la question climatique, puisque les chefs d'État ou de gouvernement étaient convenus de reporter à cette réunion du 10 décembre leur décision de fixer un nouvel objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l'horizon de 2030. L'Union européenne entend en effet actualiser sa contribution à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques avant la fin de cette année. Mais l'urgence climatique peine à s'imposer face aux autres urgences : d'abord, celle de la pandémie, qui continue à faire des ravages en Europe, où elle a déjà frappé 14 millions de personnes et fait 350 000 morts. Quels progrès attendre de ce Conseil européen concernant une levée progressive des restrictions ? Comment s'organise la coordination européenne pour le déploiement des vaccins contre la covid-19 ?

Ensuite, ce Conseil européen traitera de l'urgence de la relance de l'économie européenne, terrassée par la pandémie. Comment dépasser le blocage persistant du plan de relance par quelques-uns sans renoncer à conditionner l'octroi des fonds au respect de l'État de droit ? Monsieur le ministre, allons-nous avancer sans ces États réfractaires, comme vous l'envisagiez et comme semble désormais s'y résoudre le commissaire Gentiloni, ou rouvrir le débat sur le mécanisme de conditionnalité afin de rendre moins arbitraire son déclenchement ? L'important est assurément d'éviter tout report dans la mise en oeuvre du cadre financier pluriannuel et du plan de relance, mais, à plus long terme, nous sommes inquiets sur l'avenir européen des États que nous laisserions en chemin... J'ai eu l'occasion de le dire hier sur la chaîne Public Sénat : je ne souhaite pas, pour ma part, une Europe à la carte.

J'évoquerai également l'État qui a déjà décidé de tracer sa route sans nous, à savoir le Royaume-Uni. La période de transition expire dans trois semaines, et il paraît de moins en moins possible que la négociation de la relation euro-britannique qui débutera au 1er janvier se conclue sur un accord, même si les échanges s'intensifient. En ce moment critique, l'unité des Vingt-Sept est-elle en train de se fissurer ? Nous sommes particulièrement soucieux : que sont prêts à lâcher ceux qui dénoncent la fermeté française ?

Le Conseil européen devra aussi répondre à l'urgence de la menace terroriste dont l'Autriche et la France ont été victimes le mois dernier. Lors de son audition, M. Gilles de Kerchove, coordinateur de l'Union européenne pour la lutte contre le terrorisme, a indiqué qu'aujourd'hui, l'essentiel de la menace en Europe est de type endogène. Elle provient d'individus isolés qui se radicalisent sur internet ou en prison, sans liens formels avec Daech ou Al-Qaïda. À ses yeux, l'attentat de Nice constitue une exception de ce point de vue. Comment le Conseil européen entend-il traiter cette situation pour que les États membres, notamment ceux de l'espace Schengen, coopèrent mieux pour prévenir la radicalisation et détecter les individus dangereux ?

Enfin, le Conseil européen devra s'accorder sur la réaction à adopter quant aux manoeuvres de la Turquie, qui souffle le chaud et le froid afin d'éviter les sanctions européennes - mais le vice-président de la commission des affaires étrangères, Pascal Allizard, vous interrogera sur ce sujet.

Un mot pour finir sur le sommet de la zone euro, qui suivra ce Conseil européen dont l'ordre du jour est déjà très chargé. Ce sommet sera consacré à l'union bancaire et à l'union des marchés de capitaux : c'est un enjeu stratégique pour notre économie, sa stabilité, sa résilience et son autonomie. Le président de la commission des finances, Claude Raynal, ne manquera pas d'évoquer l'accord intervenu sur la réforme du mécanisme européen de stabilité (MES) et du Fonds de résolution unique (FRU) destinée à améliorer le cadre de résolution de crises.

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