Vous avez raison de faire un lien entre le développement du risque de pandémies et la crise écologique. La réforme de la PAC apporte déjà une contribution essentielle à l'effort de transition écologique : la mise en place des écorégimes, que la France a soutenue, constitue une avancée ; ils représentent 20 % des paiements dans le compromis du Conseil et nous souhaitons encore aller au-delà avec le Parlement au cours de la suite de la négociation. L'idée d'une PAC plus verte est donc largement partagée.
Il y a une position très claire qui consiste à renforcer le caractère écologique ou climatique des accords commerciaux de l'Union. Pendant longtemps, nous étions les seuls à porter cette idée. C'est maintenant une composante intégrée dans le Green Deal, le « Pacte vert » qu'a présenté la présidente de la Commission, notamment pour que le respect effectif de l'accord de Paris soit une condition essentielle de tout accord commercial futur de l'Union. Concernant les accords en cours, comme avec le Mercosur, il est hors de question de les appliquer tant que nous ne constatons pas d'améliorations de cette nature. Je suis très clair sur ce point.
Ce serait une erreur d'abandonner le groupe de Minsk. Au contraire, il faut renforcer notre rôle en son sein. L'Azerbaïdjan et la Turquie nous poussent à le quitter, justement parce qu'ils voient bien que l'absence de la France dans la suite des négociations politiques se traduirait par un affaiblissement de la position arménienne. Nous ne le voulons pas. Ce sujet ne sera pas directement abordé au Conseil européen, mais j'en prends bien note.
Monsieur Requier, je partage votre idée selon laquelle les mesures visant à atteindre l'objectif de réduction des émissions doivent être accompagnées de mécanismes justes, de financement ou de taxes à nos frontières.
La priorité concernant la pêche est d'obtenir un accès sur la longue durée et le plus large possible. En toute transparence, nous n'aurons certainement pas 100 % des espèces sous quota aujourd'hui, mais il faut cependant viser des chiffres très élevés. Ce que proposent les Britanniques est, évidemment, très loin du compte.
Oui, nous avançons sur l'autonomie sanitaire, comme le montre l'exemple des vaccins. Mais la question revêt également une dimension industrielle. La Commission a fait un certain nombre de propositions, que nous soutenons. D'abord, l'augmentation du budget de l'Union en matière de santé est un point que le Parlement européen a permis de faire avancer dans la négociation budgétaire. Ensuite, on a l'idée d'une agence européenne de la santé, qui financerait à la fois la recherche, mais aussi une meilleure préparation aux pandémies, avec l'achat d'équipements communs : respirateurs, kits de test, ou encore matériel de protection. Nous avions d'ailleurs commencé à travailler sur ce sujet au niveau européen avant cette deuxième phase de l'épidémie.
Le vaccin à destination des Européens sera produit quasiment intégralement en Europe. Les sites de production des grands laboratoires, même non européens, sont présents sur le territoire européen, et nous les utiliserons en priorité. Par ailleurs, Sanofi fait partie des contrats qui ont été signés par la Commission européenne. Certes, le vaccin proposé par l'entreprise ne fait pas partie des deux premiers qui sont disponibles, mais je l'ai dit : c'est un marathon, qui doit être bien organisé. La vaccination s'étendra sur au moins un semestre, et nous aurons besoin de tous les vaccins, y compris des quatre autres pour lesquelles la Commission a déjà signé des contrats. Parmi eux se trouvent AstraZeneca, Sanofi, et d'autres encore.
Faire du vaccin un bien public mondial (BPM) correspond à notre position et à notre action. Pour rendre tangible cet engagement, nous avons même proposé qu'une partie des doses européennes soit réservée aux pays en difficulté, notamment en Afrique, dès lors que l'accès au vaccin sera sécurisé pour la population européenne. C'est une question d'humanité et de justice, mais aussi une question sanitaire. En effet, si l'on veut être efficace face à une pandémie, il faut combattre le virus partout dans le monde. Aider les pays qui n'ont pas les moyens d'acquérir ce vaccin constitue aussi une manière de nous protéger.
La question de l'autonomie industrielle ne se pose pas qu'en matière de santé, et elle fait partie de ce que nous défendons, y compris à travers le nouveau budget européen. Pendant la crise, nous avons constaté avec stupeur que la production d'éléments aussi basiques que le paracétamol était effectuée aux deux tiers en Inde ou en Chine... Nous devons être capables de faire mieux. Il s'agit donc d'une stratégie industrielle et financière, mais aussi de protection des secteurs stratégiques. Le domaine sanitaire en fait partie.
Les moyens consacrés à l'écologie dans les plans de relance européen et français seront d'au moins 30 %. Sur les questions de la protection des particuliers et de la rénovation thermique des logements, 7 milliards d'euros sont mobilisés dans notre plan de relance.
Le risque de délitement de l'Europe est toujours là. Le Brexit a été un choc salutaire à cet égard, puisqu'il nous a montré que la marche en avant n'avait rien d'acquis ou d'automatique. L'idée de la Conférence sur l'avenir de l'Europe est donc de prendre un moment pour discuter de notre avenir. Nous ne le faisons pas à l'occasion des Conseils européens, qui sont trop focalisés sur l'urgence, et qui sont par ailleurs des cénacles plus restreints. La France, soutenue par le Parlement européen, souhaite la mise en place de panels citoyens dans cette Conférence, tout au long de l'année 2021, afin d'en faire émerger des idées et des contributions. La Commission européenne s'est engagée, à notre demande, à intégrer un certain nombre d'idées issues de ces consultations à son agenda législatif.
J'ai moi-même prévu, dès le début de l'année 2021, d'organiser un certain nombre de débats locaux et régionaux sur les questions européennes, afin d'ouvrir les portes et les fenêtres de ce débat européen. Nous en avons besoin, surtout après la crise de la covid.
L'accord de juillet a été douloureux à plusieurs égards, avec un certain nombre d'aspects qui ne nous plaisaient pas. Toutefois, nous sommes parvenus, et ce en quatre jours, à accepter à l'unanimité un plan de relance de 750 milliards d'euros ! C'est le meilleur signal d'unité et d'efficacité que nous puissions donner. Mais ce « non-délitement » est un combat quotidien. Il faut parfois choisir entre l'unité immédiate, qui peut aboutir au plus petit dénominateur commun, et l'avancée de quelques-uns. Cela ne délite pas l'Europe, au contraire : cela la tire dans la bonne direction. L'histoire de la construction européenne nous le démontre : nous avons lancé Schengen à quelques-uns, nous avons lancé l'euro à quelques-uns, nous avons commencé les communautés européennes à quelques-uns. Ainsi, l'idée d'une ambition initiale qui s'élargit ensuite ne doit pas être exclue, même si je ne considère pas que commencer le budget européen à 25 au lieu de 27 soit un succès. Cependant, il serait pire encore de renoncer à nos valeurs et à nos ambitions.