Depuis de nombreuses années, nous sommes d'accord sur le fond : il serait temps de parler stratégie avant de parler moyens. Je me souviens notamment du rapport présenté l'an dernier par Jean-Pierre Leleux - à qui j'adresse au passage une pensée de sympathie -, et de l'intervention de David Assouline, qui avait commencé de la même manière que celle de cette année, rappelant qu'il partageait le constat sévère du rapport sans être favorable au vote des crédits. Mais il faut dissocier le rapport et les crédits, même si cela peut sembler frustrant. Le budget de la culture est en hausse, tandis que celui de l'audiovisuel en baisse, mais n'oublions pas l'effort incontestable consenti par le Gouvernement pour venir en aide à l'audiovisuel dans cette période difficile. Nous sommes finalement sur la même longueur d'onde, si je puis dire, même si nous ne l'exprimons pas de la même façon.
Sur la critique de la suppression de France 4, le Gouvernement a été dans l'obligation de faire marche arrière après l'apparition du virus. En effet, la chaîne est devenue plus importante que jamais, notamment dans le contexte de lutte contre l'épidémie. La date d'août 2021 a néanmoins été confirmée pour sa disparition, bien que le ministre de la santé soit incapable de nous dire quand bars et restaurants pourront rouvrir.
Il y a deux ans, nous avons entendu un ministre affirmer que le sujet de la CAP serait réglé pour le PLF 2021, mais rien ne s'est passé. Et cela ne risque pas de changer, puisque la ministre actuelle a déclaré : « Il n'y a pas d'urgence, travaillons. » Au Sénat, nous travaillons sur ces sujets depuis des années, et nous avons déjà mis sur la table des propositions, que l'on pourrait critiquer ou amender, mais qui donnent une vision de ce que pourrait être la CAP. Une réforme aurait pu être conduite avant la fin du quinquennat, mais rien n'a été fait, tant sur la CAP que sur la stratégie. L'échec est patent, et nous sommes une grande majorité à partager ce constat.
Cependant, il s'agit aujourd'hui de voter des crédits. Si je respecte l'avis défavorable de certains d'entre vous, je ne le partage pas, car les crédits prennent en compte la situation exceptionnelle dans laquelle nous nous trouvons, et sont cohérents avec ce que nous défendons depuis deux ou trois ans. Ne pas les voter serait donc une erreur.
Au sujet des mini-contrats d'objectifs et de moyens, la réforme étant repoussée aux calendes grecques, il n'y aura pas de holding, mais une simple harmonisation des COM. Il s'agit donc d'un changement structurel, qui permettra aux chaînes de travailler sur des mêmes périodes d'amplitude, mais en aucun cas d'un changement dans le management, qui nécessiterait un réel travail de mutualisation. De plus, les syndicats n'ont pas été associés à ces travaux, ce qui constitue une véritable erreur de méthode. Il y a donc aujourd'hui, dans les deux entreprises les plus exposées à la crise que sont Radio France et France Télévisions, un véritable risque pour des personnels déjà fatigués, et chez lesquels les risques psychosociaux sont élevés.
La question de la triple tutelle est l'un des points principaux de dysfonctionnement. Et nous pourrions même parler de quadruple tutelle quand on évoque l'audiovisuel extérieur. En effet, le ministère de la culture est attaché à la question de l'exception culturelle, le CSA nomme les dirigeants, Bercy finance, et le Président de la République affirme la volonté de rayonnement de la France. Comment rayonner avec un outil qui s'affaiblit de jour en jour, alors qu'il fonctionne pourtant avec des moyens relativement faibles ? Il y a là une contradiction majeure.
Cette autre injonction contradictoire a été notée : la demande de contenu et de qualité, en même temps que les exigences d'audience.
Quant à la plateforme Salto, elle a enfin été lancée, et cette présence était nécessaire, particulièrement pendant la période de crise que nous traversons. S'agit-il d'un navire de guerre face à une flotte mondiale puissante ? Vous connaissez la réponse, mais sa création était essentielle.