Intervention de Pierre Ouzoulias

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 16 décembre 2020 à 9h32
Restitutions des oeuvres d'art — Présentation du rapport d'information

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias, co-rapporteur :

Nous avions effectivement avec Alain Schmitz une véritable communion dans notre approche, sans doute liée à nos fonctions professionnelles antérieures, qui ont rendu ce travail conjoint très agréable. Il maniait le marteau et moi la truelle. Je n'ai pas dit la faucille !

Aujourd'hui, les demandes de restitution ne concernent pas uniquement la France. Le retour des biens culturels est une revendication portée par de nombreux pays, dont des pays africains, sur la scène internationale, notamment des instances comme l'Unesco. Cette question pose des problèmes éthiques, diplomatiques, historiques et politiques dans un enchevêtrement complexe.

Un certain nombre de pays, notamment ceux de l'Europe du Nord, sont aujourd'hui pleinement investis dans une politique vis-à-vis de ces demandes de restitution qui ne prend pas nécessairement les mêmes formes que chez nous. Chaque pays a des traditions muséales différentes. Au Royaume-Uni, par exemple, c'est à chaque institution muséale de définir sa ligne de conduite par rapport aux demandes.

À l'échelon international, il y a peu d'outils juridiques pour traiter des demandes de restitution qui portent sur des biens culturels acquis de manière ancienne, par exemple pendant la période coloniale. Relativement récentes, les conventions internationales, même la convention d'Unidroit de 1995, un peu plus complète, ne peuvent pas leur être appliquées car elles n'ont pas de portée rétroactive. Il faut donc traiter les demandes en fonction de l'état du droit à l'époque des guerres coloniales. Cela n'empêche pas qu'il me paraîtrait utile de comprendre pourquoi le processus de ratification de la convention d'Unidroit n'est pas allé jusqu'à son terme et s'il ne serait pas utile de le reprendre.

En droit français, nous sommes les héritiers d'une tradition ancienne qui veut que les collections publiques soient inaliénables. Ce principe d'inaliénabilité des collections a été fermement réaffirmé au moment de la Révolution française à l'occasion de la constitution du patrimoine de la Nation. Il constitue un obstacle pour permettre de répondre de façon simple et automatique aux demandes de restitution. Il y en a eu quelques-unes, comme l'a rappelé Catherine Morin-Desailly, mais elles concernaient, en fin de compte, des domaines bien particuliers.

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