Intervention de Raymonde Poncet Monge

Réunion du 9 décembre 2020 à 15h00
Création d'un pôle public du médicament et des produits médicaux — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Raymonde Poncet MongeRaymonde Poncet Monge :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, alors que la crise sanitaire se poursuit, que nous sommes encore dans le temps de l’action et que le rapport de la commission d’enquête sur la gestion de la crise sanitaire sera présenté demain, des premiers enseignements doivent dès à présent être tirés.

Résonnent encore, en effet, la détresse du monde médical et la mise en danger de tous les professionnels qui ont dû poursuivre leurs activités à l’acmé de la pandémie, malgré l’impuissance du Gouvernement à les protéger.

En effet – il faut encore et toujours y revenir, pour en analyser les causes –, ce sont des millions de masques, dont les FFP2, qui ont manqué durant des semaines, parce que les pouvoirs publics n’ont pas assuré le renouvellement des stocks stratégiques dont ils sont les garants et se sont montrés incapables tant d’équiper les personnels travaillant en première ligne que de se procurer des masques en urgence sans dépendre des aléas et des prix du marché mondialisé.

En Auvergne-Rhône-Alpes, les médicaments et les équipements de protection individuels ont longtemps manqué. Pendant les premiers mois, l’union régionale des pharmaciens a dû, par des moyens de fortune, dépanner les pharmacies en gel hydroalcoolique dans plusieurs des départements de la région, les services déconcentrés de l’État n’ayant pas de solutions ; et c’est une association qui a assuré les livraisons.

Nombre de déprogrammations d’opérations ont eu pour cause non seulement la pénurie des soignants, mais aussi celle des médicaments, notamment ceux qui sont utilisés en réanimation, les conséquences d’une telle pénurie étant encore à venir et restant à évaluer.

Le système de santé français se révèle donc vulnérable aussi aux ruptures d’approvisionnement en médicaments et dispositifs médicaux essentiels.

Ce constat ne date d’ailleurs pas de la crise du covid-19, puisque le Sénat et de très nombreux organismes alertent depuis des années sur ces ruptures d’approvisionnement.

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, estime que, en 2020, près de 3 200 médicaments essentiels auront été en rupture, contre 404 en 2013.

Des médicaments pour traiter le cancer, la maladie de Parkinson ou, dernièrement, la grippe saisonnière viennent à manquer… Près d’un Français sur quatre a souffert d’une rupture d’approvisionnement.

Selon la Ligue contre le cancer, 74 % des professionnels de santé ont déclaré avoir déjà été confrontés à des pénuries de médicaments ; ils sont 45 % à estimer que cette situation a dégradé la survie à cinq ans des patients concernés par cette interruption du traitement, d’où s’ensuivait une perte de chances manifeste.

Dès lors, la création d’un pôle public du médicament, outil régulateur, contribuerait au recouvrement par la France de sa souveraineté sanitaire, permettant à sa population d’être protégée en temps de crise, mais aussi, hors crise, d’être soignée sans rupture.

Ce projet s’inscrit dans les recommandations du Parlement européen en faveur de la mise en place d’établissements pharmaceutiques à but non lucratif, capables de produire des médicaments stratégiques pour les soins de santé ; ses auteurs se sont emparés du sujet sans attendre que l’Union européenne se saisisse de cette recommandation.

De tels établissements existent au Brésil, en Inde, en Suisse, …

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