Intervention de Guillaume Gontard

Réunion du 9 décembre 2020 à 15h00
Aménagement numérique des territoires — Rejet d'une proposition de résolution

Photo de Guillaume GontardGuillaume Gontard :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, hasard du calendrier, hier, Paul-Henry Martin, habitant Pierre-Châtel dans le sud de l’Isère, m’interpellait pour me signaler les difficultés que rencontre sa commune pour être raccordée à la fibre optique.

La semaine dernière, un maire de ma région, le Trièves, m’indiquait qu’un jeune couple avait renoncé à s’installer dans sa commune, faute de liaisons internet et mobile.

Voilà quelque temps, un artisan me racontait qu’il était obligé de prendre sa voiture pour télécharger un dossier d’appel d’offres depuis un village mieux desservi.

Je pourrais vous donner bien d’autres exemples, monsieur le secrétaire d’État. C’est – hélas ! – le quotidien de nombreux habitants en zones rurales, et plus encore en montagne.

Selon les données de l’Arcep du mois de juillet 2020, près d’un tiers des foyers français n’ont toujours pas accès à la fibre. Son déploiement est devenu un enjeu de politique locale ; la réalisation est assurée en grande partie par les départements. Or, force est de le constater, malgré les millions d’euros de fonds publics européens, régionaux, intercommunaux et même communaux engagés, les résultats ne sont pas au rendez-vous.

Les problèmes sont parfois techniques, parfois financiers, mais ils signent surtout l’échec d’un modèle privé qui ignore la cohérence, l’équité territoriale et la mission de service public, un modèle basé sur la rentabilité et la concurrence au détriment du service rendu aux habitants.

Corriger ce modèle défaillant, c’est tout l’objet de la présente proposition de résolution, que j’ai l’honneur d’avoir cosignée avec la présidente Éliane Assassi. Je remercie d’ailleurs vivement nos collègues du groupe CRCE d’avoir inscrit ce texte à l’ordre du jour de nos travaux.

L’État doit redevenir moteur en matière d’aménagement du territoire. Comme d’habitude, les opérateurs privés s’intéressent seulement aux zones denses qui leur assurent un retour sur investissement. On ne peut nullement compter sur eux pour équiper les 43 % d’habitants des zones peu denses et non conditionnées.

Comme pour le rail, on aurait pu imaginer, même si ce n’est pas la panacée, un modèle où l’État déploie les réseaux, en détient la propriété et les loue aux opérateurs privés. Sans cohérence et sans faire d’économie, on a laissé les opérateurs déployer les réseaux, souvent sans concertation et sans assurer la couverture totale du territoire.

Pis, pour le déploiement de l’internet mobile, on a laissé les trois grands opérateurs installer chacun leurs propres antennes relais, sans incitation à la mutualisation, multipliant ainsi inutilement les infrastructures. Quelle aberration écologique ! Quel gâchis économique ! Et je ne parle même pas du déni démocratique puisque les habitants ne sont même plus informés en amont de l’installation de ces antennes…

Afin de stabiliser ce système hybride et bancal, l’État et les collectivités doivent investir des milliards d’euros pour se substituer aux opérateurs privés et compléter la couverture du pays. C’est l’objet du plan France Très haut débit, lancé en 2013. On mesure vingt ans plus tard toute la vision politique des gouvernements qui ont privatisé France Télécom ! Faute d’opérateur national, d’une stratégie nationale cohérente et d’une expertise publique suffisante, voilà la France incapable de fibrer correctement son petit territoire en moins d’une décennie.

Monsieur le secrétaire d’État, la promesse présidentielle de parvenir à la fin de l’année 2020 au 100 % de haut et très haut débit n’a pas connu plus de succès que celle de sortir du glyphosate à la même échéance.

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