Intervention de Alain Griset

Délégation aux entreprises — Réunion du 6 novembre 2020 à 8h30
Audition de M. Alain Griset ministre délégué auprès du ministre de l'économie des finances et de la relance chargé des petites et moyennes entreprises

Alain Griset, des Finances et de la Relance, chargé des Petites et Moyennes Entreprises :

ministre délégué auprès du ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance, chargé des Petites et Moyennes Entreprises. - Je vous remercie, Monsieur le président. Dans mes fonctions précédentes, j'avais entretenu des contacts réguliers avec Mme Lamure et votre délégation. Je vous confirme ma disponibilité quand vous le souhaitez afin de pouvoir aborder les différents sujets.

Comme confirmé une nouvelle fois hier par Olivier Véran, la circulation du virus est très importante sur notre territoire. Ce paramètre a amené le Président de la République à décider ce confinement, différent de celui du mois de mars puisque les collèges et les lycées ont été laissés ouverts bien que le ministre de l'Éducation ait indiqué hier que des modifications seraient instaurées. Naturellement, l'objectif prioritaire est de garantir la sécurité sanitaire des Français mais aussi d'éviter un effondrement de l'économie. Il est pour ce faire permis, dans des conditions sanitaires satisfaisantes, à une majeure partie de l'économie de fonctionner, en dépit de la décision de fermeture d'un certain nombre de commerces ne vendant pas des produits de première nécessité. Vous avez eu raison, Monsieur le Président, de rappeler qu'un débat s'est tenu à ce sujet avant l'annonce de la décision prise dimanche par le Premier ministre.

Concernant les mesures de soutien, nous partons du principe que les commerces fermés n'ont aucune responsabilité avérée sur la propagation du virus. Notre objectif n'est ni de les stigmatiser, ni de les accuser. Ce sont des hommes et des femmes qui, entre mars et aujourd'hui, ont investi de l'argent et pris beaucoup de précautions pour respecter les gestes barrières, notamment en fournissant du gel hydroalcoolique, afin d'adapter leur commerce. Je souhaite ici leur rendre hommage car leur situation est compliquée. Avec Bruno Le Maire, nous avons proposé au Premier ministre, au regard de cette situation compliquée, des dispositifs tout à fait inédits, extrêmement puissants et uniques au monde. Comme le Président de la République l'avait souligné dès le mois de mars, ces dispositifs ont pour objet de maintenir le tissu économique français en vue du redémarrage de l'économie lorsque la propagation du virus s'affaiblira. À cet égard, suite au déconfinement le 11 mai, la reprise économique a été plus importante que prévue. Au moins d'août dernier, l'activité économique atteignait 95 % de celle enregistrée au mois d'août 2019.

Ceci étant, je suis conscient que certains secteurs économiques sont particulièrement affectés, à savoir la restauration, l'hôtellerie, l'événementiel, la culture et le sport. En l'absence de tourisme, ces secteurs font l'objet d'un suivi particulier. J'ai personnellement reçu les représentants de l'ensemble de ces branches, à l'exemple des traiteurs. Ces derniers ont perdu 90 % à 95 % de leur chiffre d'affaires. J'ai ainsi décidé de mettre en place pour près de 200 traiteurs un suivi individualisé par les structures spécifiques de Bercy de façon à les accompagner en fonction de la situation de leur entreprise.

Plus généralement, les quatre dispositifs ayant montré leur efficacité depuis le début de la crise restent en vigueur, à savoir : le Fonds de solidarité, l'exonération des cotisations, l'activité partielle et les Prêts garantis par l'État (PGE). Je peux détailler ces quatre dispositifs et leur évolution depuis le premier confinement.

Concernant le Fonds de solidarité, deux niveaux étaient distingués. D'une part, le niveau 1 qui permettait, via le site « info.gouv », aux entrepreneurs déclarant un chiffre d'affaires en baisse de 50 %, de percevoir, en 72 à 96 heures, jusqu'à 1 500 euros. Comptabilisant 1,7 million de bénéficiaires, ce dispositif de niveau 1 a été extrêmement efficace. En accord avec les régions, un niveau 2 a par la suite été mis en place afin de concevoir un dispositif anti-faillite assez complexe, reposant sur un certain nombre de critères. Dans mes fonctions précédentes, j'avais oeuvré à la simplification de ce dernier car sa gestion par les régions le rendait, du point de vue des entrepreneurs, plus compliqué. Le constat a été clair, seulement 45 000 bénéficiaires du niveau 2 ont été recensés.

En vue de ce nouveau confinement, seul le Fonds de solidarité de niveau 1 sera utilisé, comme décidé avec le président Muselier, à part pour les discothèques. Le gouvernement a en outre décidé d'élever le Fonds de solidarité de 1 500 à 10 000 euros par mois de compensation de chiffre d'affaires non réalisé, ce qui est absolument considérable. Pour le mois de novembre uniquement, le coût de ce dispositif est évalué à 6 milliards d'euros, comparable au montant atteint entre mars et juin derniers. J'espère que ce dispositif, qui m'apparaît également comme indispensable et justifié, pourra couvrir 85 % à 90 % des indépendants, c'est-à-dire les artisans, les commerçants et les professionnels libéraux. Le critère relatif au nombre de salariés a en outre été modifié, ce dernier peut désormais s'élever à 50 contre 10 précédemment. Les limitations en termes de chiffre d'affaires ont par ailleurs été supprimées.

Une distinction entre les secteurs d'entreprise S1 et S1 bis doit toutefois être prise en compte. Le secteur S1 regroupe les entreprises les plus affectées de manière directe par la crise, à savoir celles liées au tourisme, à la culture ou au sport et celles fermées par décision administrative, pour qui il est automatiquement possible de percevoir les 10 000 euros. Le secteur S1 bis rassemble, quant à lui, les entreprises pouvant aussi bénéficier des 10 000 euros de compensation à condition de justifier d'une baisse de 50 % de leur chiffre d'affaires pendant le confinement. Pour ces entreprises, le chiffre d'affaires réalisé grâce au « click and collect » (« retrait commande ») sera décompté du chiffre d'affaires pris en compte pour bénéficier des 10 000 euros.

Les entreprises fermées bénéficieront en outre d'une exonération des cotisations sociales. L'activité partielle à 100 % est, quant à elle, garantie jusqu'à la fin de l'année et pourrait être prolongée au-delà du 31 décembre. Le gouvernement, qui mène des discussions à ce sujet, ne s'interdit pas de présenter au Parlement un projet de prolongation de cette mesure. Concernant les prêts garantis par l'État (PGE), 125 milliards d'euros des 300 milliards d'euros alloués ont été utilisés jusqu'à présent. 95 % de ces 125 milliards d'euros ont été versés aux entreprises de moins de 20 salariés. Au total, 600 000 entreprises ont bénéficié d'un PGE. L'enveloppe n'ayant pas totalement été utilisée, l'accès aux PGE est prolongé jusqu'au 30 juin prochain. Par ailleurs, dans le cadre des négociations avec les banques, ces dernières pourront accorder au cas par cas une deuxième année de différés de remboursement. À cet égard, votre concours sera extrêmement utile au gouvernement, les entrepreneurs devant signaler à la fin de la première année les banques qui imposent un remboursement immédiat au lieu d'un étalement pouvant aller jusqu'à six ans. Nous avons négocié une fourchette de taux avec les banques entre 1 % et 2,5 %, toutes garanties confondues. Le taux de 1 % s'appliquera par exemple pour l'entrepreneur choisissant de rembourser sur deux ans.

Depuis le 14 octobre, les entreprises de moins de 50 salariés peuvent bénéficier en quasi fonds propres d'un prêt participatif par l'intermédiaire de la Banque publique d'investissement (BPI) de 10 000 à 50 000 euros. Nous avons travaillé avec Bruno Le Maire pour qu'à partir du 1er janvier, les PME plus importantes puissent également bénéficier de prêts participatifs, dont les taux sont en cours de discussion avec les banques, et qui pourraient s'échelonner sur 7 ans sans rentrer dans le bilan des dettes des entreprises.

Le ministère de l'Économie travaille par ailleurs branche par branche et secteur par secteur en vue de se projeter dans l'avenir en dépit de cette crise sanitaire qui risque de durer encore plusieurs mois. Or il est extrêmement difficile pour un entrepreneur d'ouvrir et de fermer son commerce successivement. Nous oeuvrons donc à l'amélioration des garanties à la fois pour le consommateur et les salariés mais aussi pour le ministère de la Santé afin de préserver une activité économique malgré la présence du virus. Cette équation représente tout l'enjeu du travail actuellement mené avec l'ensemble des branches dans le but de déterminer les solutions et les garanties que chacune d'entre elles peut proposer.

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