Ayant dit l’essentiel au cours de la discussion générale, je me contenterai de rappeler les différentes raisons pour lesquelles nous avons déposé cette motion tendant à opposer la question préalable. Ce projet de loi de finances contient des mesures macroéconomiques, de portée générale, et un certain nombre de mesures plus sectorielles, comme cela a été souligné par certains d’entre vous, mes chers collègues, et à l’instant par Jérôme Bascher, avec une forme de poésie nouvelle.
Monsieur le ministre, permettez-moi de saluer votre présence constante, votre éternelle bonne humeur, mise entre parenthèses pendant un court instant.Je crois que nous avons construit des choses intéressantes. Toutefois, j’appelle votre attention sur ce goût amer d’inachevé qui nous gagne lorsque nous nous penchons sur le fonctionnement du bicamérisme, notamment à l’occasion de cette discussion.
Des travaux ont abouti, parfois d’ailleurs avec une grande précision. Je pense à la mission « Plan de relance » ou à d’autres sujets. Reste, monsieur le ministre, que le Gouvernement et sa majorité à l’Assemblée nationale devraient être plus attentifs à mieux les prendre en compte et à mieux les intégrer. En effet, et vous ne le niez pas, ceux-ci sont aussi défendus par les territoires, c’est-à-dire l’ensemble des collectivités territoriales, depuis la commune, « petite République dans la grande ».
À cet instant, j’appelle notre attention à tous, et plus encore celle du Gouvernement, sur la responsabilité importante que celui-ci pourrait avoir dans cette forme de défiance qui risque de s’installer entre les décisions de l’État et le goût d’inachevé que ressentent les élus des territoires, notamment des communes.
On oublie souvent la force exceptionnelle que constituent ces 550 000 élus locaux dont je me plais à répéter que plus de 90 % sont des bénévoles. Ils sont le plus beau bouclier démocratique au service du pays. Lorsque le Sénat s’exprime sur un certain nombre de sujets, qu’il s’agisse de politiques sectorielles ou d’ambitions, il relaie, à travers sa diversité, les points de vue de la grande région parisienne, des grandes et plus petites métropoles de province, des agglomérations, des bourgs-centres et des petites communes de quelques poignées d’habitants. Le Gouvernement s’honorerait, avec sa majorité à l’Assemblée nationale, à mieux prendre en compte ces propositions, surtout en ces temps inédits.
Monsieur Rambaud, nous aurons tout de même examiné quatre PLFR et un PLF. À l’occasion de l’examen de chacun de ces textes, l’esprit de responsabilité a prévalu. Avoir des avis divergents ne signifie pas balayer le point de vue des uns et des autres d’un revers de manche : la démocratie consiste à accepter les différences et à faire en sorte de trouver des convergences.
Dans cette période très complexe, nous devons éviter une troisième vague de flambée sociale. Je l’ai rappelé lors de la discussion du projet de loi de finances, nous avons assisté à l’épisode douloureux des « bonnets rouges », sur fond de non-acceptation de mesures à caractère écologique, puis à celui des « gilets jaunes », là encore sur fond de non-acceptation de mesures à caractère écologique, mal vécues par un certain nombre de Français.
L’écologie est aujourd’hui insuffisamment prise en compte par le Gouvernement. Des mesures concrètes seraient à même d’écarter le risque de flambée de violence qui pourrait advenir et que nous ne souhaitons évidemment pas. C’est pour cette raison que les débats qui se sont tenus dans cet hémicycle ont été soutenus. Il m’est même arrivé, en tant que rapporteur général, de n’être pas suivi.
Tout cela fait la richesse de la démocratie.
Vous pouvez en être sûr, monsieur le ministre, mais je sais que c’est votre conviction : le Sénat est le cœur battant de la démocratie et de cette France attachée à la réussite de tous. Je le répète, ce contexte particulièrement difficile de crise sanitaire et de difficultés économiques pourrait entraîner de grandes difficultés sociales en 2021.
C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cette motion tendant à opposer la question préalable, pour tenter de trouver, dans le peu de temps qui nous restait, un dernier compromis avec un Sénat mieux entendu par le Gouvernement.