Nous sommes heureux d'accueillir, par visioconférence, Mme Anne-Marie Descôtes, ambassadrice de France en Allemagne. Il nous a semblé important de vous entendre à ce moment où s'achève la présidence allemande du Conseil de l'Union européenne. Votre présence à Berlin vous permet de connaître de l'intérieur la façon dont l'Allemagne a vécu cette présidence, particulièrement compliquée par la pandémie, et quel bilan elle en tire.
L'ambassadeur d'Allemagne en France, que nous avions entendu en juillet dernier, nous avait indiqué que la priorité de cette présidence était de faire adopter par le Conseil européen, avant l'été, le cadre financier pluriannuel et le paquet de relance : pari tenu, mais de haute lutte, puisque, la semaine dernière, l'accord de juillet restait suspendu au veto polonais et hongrois et nous ne savions pas encore si une issue serait trouvée.
La deuxième priorité qu'il annonçait était de voir comment apporter une réponse européenne aux crises sanitaires : c'est un dossier engagé, mais au long cours. Vous pourrez peut-être nous en parler et évoquer notamment la performance allemande en matière de gestion de la pandémie, comparée à la France.
La troisième priorité qu'affichait l'ambassadeur d'Allemagne concernait le rôle de l'Europe dans le monde et ses relations avec la Chine, l'Afrique et les États-Unis : les choses ont effectivement avancé en ces domaines, mais la Turquie s'est imposée en haut de l'agenda. L'Allemagne a joué un rôle de poids sur ce sujet, particulièrement sensible pour elle, et le dernier Conseil européen a renvoyé à mars prochain les décisions difficiles.
Concernant le Brexit, l'ambassadeur indiquait que l'Allemagne souhaitait évidemment aboutir à un accord, mais jugeait qu'il devait être signé avant la fin du mois d'octobre pour que les procédures parlementaires puissent s'appliquer en bonne et due forme... Le scénario ne s'est finalement pas déroulé ainsi et l'issue reste encore incertaine à cette heure sur ce dossier épineux. Comment l'Allemagne vit-elle cette incertitude persistante, qu'elle ne concevait même pas début juillet ? Cela vient-il selon vous ternir le bilan de sa présidence ?
Nous avions aussi interrogé M. Meyer-Landrut sur les suites de l'arrêt de Karlsruhe de mai dernier concernant la politique accommodante de la Banque centrale européenne (BCE) : depuis, l'échéance fixée en août par la cour constitutionnelle allemande est passée et le débat semble s'être éteint en Allemagne. Pourrez-vous nous dire comment, et s'il persiste un malaise allemand sur la frontière entre l'espace juridique national et l'espace juridique européen ?
Nous serions aussi intéressés par votre perception de la politique intérieure allemande, notamment dans la perspective du départ de Mme Merkel et du prochain congrès de la CDU mi-janvier.