Merci de votre invitation. C'est une année exceptionnelle que nous vivons et continuerons à vivre, dans un contexte de crise sanitaire et de relations franco-allemandes qui ont connu une intensité et une coordination particulières.
La pandémie nous a obligés à réduire les contacts physiques. En mars, la décision douloureuse de fermeture des frontières reflétait l'inquiétude, voire la panique devant la pandémie. L'absence de compétences européennes sur la santé a amené à des décisions nationales sans concertation. Cette expérience douloureuse nous a rendus raisonnables et vigilants. Nous n'avons pas eu de problèmes particuliers durant la seconde vague.
Au total, 120 patients français ont été accueillis dans les hôpitaux allemands. Inversement, quelques patients allemands, en dernière phase de convalescence, sont venus cet automne en France.
Le plan de relance européen est symbolique du travail commun réalisé cette année. Annoncé le 18 mai par le Président de la République et la chancellière, il était soutenu par la Commission européenne et a été amplifié par l'accord historique du 21 juillet de 750 milliards d'euros, dont 390 milliards par endettement commun. Cela montre la très forte solidarité et la volonté de trouver des moyens pour sortir ensemble de la crise, et a mis en évidence le besoin de moyens renforcés pour rendre l'Union européenne plus autonome dans ses capacités d'action.
Cet accord était possible, car, en amont, la coopération était très forte entre nos deux gouvernements. La crise sanitaire a accéléré un processus en cours et la chancelière Merkel a montré sa capacité à saisir l'opportunité historique pour franchir le pas vers une action d'endettement. C'est important, quand on sait que ce concept génère des inquiétudes fortes en Allemagne. La crise a été un catalyseur de l'évolution de la position allemande.
Dans un contexte international compliqué avec les grands partenaires américains et chinois, il faut se concentrer sur le marché intérieur et renforcer la solidarité européenne, car sinon, les intérêts allemands et les nôtres seraient mis en danger. C'est aussi l'expression de cette notion d'une Europe qui protège les citoyens, que nous défendons depuis trois ans. L'Allemagne a montré qu'elle comprenait combien sa bonne santé économique était dépendante de la nôtre et de ses voisins, en particulier l'Espagne et l'Italie, et qu'il fallait renforcer le marché intérieur.
Nous avons engagé des travaux bilatéraux dès le printemps, pour être prêts à mettre en oeuvre rapidement le plan de relance. Ce n'était pas évident, car la crise pousse chacun à regarder d'abord chez soi comment s'en sortir avec les aides nationales. Nous avons essayé de penser les étapes suivantes, franco-allemande et européenne.
Au-delà du plan de relance, il y a tout l'agenda de souveraineté au plan européen. Le 20 août, le Président de la République et la chancelière ont identifié plusieurs domaines clés pour surmonter les défis industriels et technologiques et positionner l'Europe de manière plus forte dans le contexte géopolitique, sur le cloud, l'intelligence artificielle, le numérique, l'hydrogène... Des projets phares sont ainsi portés par le Président de la République et la chancelière, en étroite collaboration avec le commissaire Thierry Breton.
La semaine dernière, Bruno Le Maire était à Berlin pour faire le point avec Peter Altmaier et Olaf Scholz sur les sujets économiques et industriels. Un groupe de travail conjoint a été créé pour identifier les moyens d'améliorer la compétitivité et l'efficacité du secteur spatial, majeur pour la souveraineté européenne. Nous progressons donc de façon extrêmement concrète. Nous avons soutenu la présidence allemande et continuerons de travailler avec les présidences portugaise et slovène avant la présidence française. Nous voulons que les sujets qui ne seront pas encore aboutis sous la présidence allemande puissent l'être en 2022 sous la présidence française, dont les maîtres-mots sont : reconstruction, puissance, appartenance. La relation franco-allemande est nécessaire pour la stabilité de l'Union européenne et la relance de son marché intérieur, et pour accroître sa crédibilité à l'échelle internationale, dans un contexte toujours plus instable.
Nous sommes pleinement concentrés sur les grands enjeux d'avenir, notamment le numérique et le Green Deal. La Commission européenne est engagée sur les évolutions énergétiques, la lutte contre le réchauffement climatique et l'adaptation de nos modèles économiques et sociaux à ces évolutions.
Nous poursuivons en parallèle la mise en oeuvre des priorités bilatérales du traité d'Aix-la-Chapelle, qui comprend déjà ces sujets prioritaires. Il faut une meilleure intégration de nos économies, et cela devrait être le cas dans toute la zone frontalière, priorité du traité.
Cela se fera aussi par un travail beaucoup plus fort et coordonné entre les sociétés civiles. Différents projets sont engagés, comme le forum franco-allemand pour l'avenir, lieu de réflexions concrètes sur les évolutions actuelles et qu'il faut accompagner par le plan de relance.