La discussion de ce projet de loi présente un caractère assez technique, une bonne part des dispositions qu’il contient étant la transposition, pas toujours intégrale d’ailleurs, de la directive communautaire d’avril 2008 sur le crédit à la consommation.
Cette apparente technicité du texte est immédiatement utilisée pour justifier un discours gouvernemental tendant à culpabiliser ceux qui seraient tentés de ne pas vouloir adopter le projet de loi.
Nous avons, madame la ministre, sur cette question comme sur bien d’autres, de profondes divergences d’appréciation avec le Gouvernement.
Nous devons replacer la discussion de ce texte dans le contexte économique et social où elle se situe.
La France connaît une crise majeure, économique, financière et sociale, dont la traduction concrète est connue : progression du chômage, ralentissement de l’activité, difficultés croissantes pour les plus modestes et dérèglement progressif des circuits de financement de l’économie, notamment du crédit, qu’il s’agisse du crédit aux entreprises ou des crédits aux particuliers.
Le débat public est largement ouvert sur le constat, mais aussi sur les issues de la crise.
En fait, la politique gouvernementale vise, depuis l’automne dernier, à faire en sorte que l’on revienne à la situation antérieure, c’est-à-dire à permettre que l’on reprenne au plus tôt les mauvaises habitudes qui ont eu cours jusqu’au déclenchement de la crise.
Le projet de loi n’a pas d’autre objet que de faire la promotion d’un « crédit soutenable », fondé sur l’illusion de l’égalité entre les parties contractantes et permettant de soutenir la croissance « molle » que l’on nous promet et que vous espérez pour le début de l’année 2010 par le développement de l’endettement des ménages.
Il ne vise aucunement à moraliser, comme il conviendrait de le faire, les pratiques agressives et excessives des organismes de crédit ; il tend plutôt à les rendre admissibles, parce que ses finalités sont ailleurs.
La préoccupation du Gouvernement, dans ce contexte de crise, est que le taux d’épargne des ménages ne connaisse pas de réduction sensible et que la prudence prime sur une consommation débridée.
En fait, le projet de loi a clairement pour objet de contribuer à la réduction de l’épargne et d’inciter les Français à s’endetter de manière plus importante qu’aujourd’hui, entre autres motifs parce que ne pas consommer pèserait sur la croissance et donc sur l’emploi.
Cela n’empêchera pas le Gouvernement de procéder aux mêmes choix politiques qu’auparavant, c’est-à-dire notamment au choix de la modération salariale dans le secteur public, en limitant la hausse des salaires au seul « glissement vieillesse technicité » et en encourageant les chefs d’entreprise à suivre le même chemin, qu’ils empruntent d’ailleurs déjà puisque rien dans la politique menée par le Gouvernement depuis quelque temps ne les incite à faire autrement.
Nous pensons que cette logique du « crédit soutenable » finira par occasionner des difficultés majeures aux familles et aux ménages salariés.
Modifier, comme nous vous y invitons avec certains de nos amendements, les termes du projet de loi est donc plus que nécessaire, ne serait-ce que pour éviter que les banques et leurs filiales de crédit ne fassent payer à d’autres les errements qui les ont conduites à acquérir quelques créances douteuses longtemps présentées comme profitables.
C’est ce qu’il convenait ici de rappeler.