Nous voici au cœur du débat, dès l’engagement de la discussion des articles : cet amendement, à l’instar d’autres, porte sur la question des taux d’intérêt des prêts à la consommation, notamment des prêts non affectés.
Malgré les réponses d’ores et déjà apportées par M. le rapporteur et par M. Marini, je vais développer mon argumentation.
Le débat concerne donc le taux d’usure, mais aussi, plus généralement, la formation des taux, telle qu’elle existe dans notre pays et qui conduit aux taux effectifs globaux, que nous pouvons observer dans de nombreux cas.
La crise financière récente a induit, rappelons-le, une raréfaction du crédit bancaire ordinaire et souvent du crédit affecté, crédits destinés aux entreprises comme aux particuliers.
Cette raréfaction, a priori combattue par les mesures de sauvetage du secteur financier prises par les États dits « développés », a été accompagnée d’une course en avant vers la réduction du loyer de l’argent, course menée notamment par les banques centrales. Pour la Federal Reserve américaine comme pour la banque centrale du Japon, le taux directeur est aujourd’hui proche de zéro, tandis que la Banque centrale européenne, animée quoique un peu tardivement du même souci, a fixé son taux directeur à 1 %. Le crédit interbancaire a d’ailleurs suivi la même évolution, se situant désormais aux alentours des 4 %, conduisant les banques françaises à faire de moins en moins appel aux services de la Société de financement de l’économie française, mise en place dans le plan de sauvetage bancaire du mois d’octobre dernier, comme je l’ai rappelé tout à l’heure.
Pour autant, les taux d’intérêt pratiqués dans le domaine des prêts à la consommation, et singulièrement des crédits renouvelables, demeurent particulièrement élevés, flirtant souvent avec des niveaux de 15 % à 18 % et appliquant, parfois, la limite autorisée pour la fixation du taux d’usure.
Nous proposons donc que le taux d’usure soit immédiatement réduit, parce qu’il convient d’envoyer un signe, notamment aux consommateurs : il est en effet nécessaire de réduire les charges d’intérêt découlant de la pratique de ces instruments financiers.
Nous restons évidemment ouverts à toute proposition visant à encadrer les pratiques de crédit mises en œuvre par les organismes spécialisés dans ces domaines. Un tel encadrement pourrait notamment se faire par référence aux taux du crédit interbancaire, en abandonnant, par exemple, le recours à la spécificité de chaque produit et en se dirigeant vers une limitation par prise en compte effective du coût de collecte de la ressource, du risque encouru par le prêteur, et des contraintes, souvent fort limitées, liées à la distribution.
Évidemment, d’aucuns soutiendront que s’attaquer ainsi aux pratiques opaques des établissements de crédit et de leurs filiales spécialisées dans le crédit renouvelable est un obstacle au développement et à la croissance.
Ainsi peut-on lire dans un article de Nicolas Bouzou, économiste libéral attitré : « On nous rétorquera que la baisse du taux d’usure sur certains types de prêts doit permettre de lutter contre le surendettement. C’est se tromper à deux titres. D’une part, selon les chiffres de la Banque de France, le surendettement trouve son origine essentiellement dans un accident de la vie, à savoir une perte d’emploi, un divorce ou une maladie. Le seul excès de crédits n’explique que 14 % des cas de surendettement, et ce taux est en recul depuis plusieurs années. D’autre part, il est absurde de réduire le surendettement en diminuant l’accès au crédit et, au passage, en sacrifiant la croissance économique, c’est-à-dire en augmentant un peu plus le chômage. »
Mais il faudra bien, un jour, que l’on nous explique pour quelle raison et de quelle manière se forment les taux dans notre pays.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter l’amendement n° 59 rectifié.