Intervention de Monique Lubin

Commission des affaires sociales — Réunion du 13 janvier 2021 à 8h35
Proposition de loi relative aux droits nouveaux dès dix-huit ans — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Monique LubinMonique Lubin, rapporteure :

En ce qui concerne la compensation du RSA par l'État, nous connaissons tous la problématique et je comprends parfaitement les questionnements. S'agissant du financement de cette mesure, je pense que des propositions se feront jour lors de l'examen du texte en séance publique.

Nous pouvons tous auditionner les associations et organismes concernés, nous arriverons aux mêmes constats. Si l'on se contente de mesures ponctuelles, on n'en sortira pas. Il faudra bien un jour poser des questions courageuses et obtenir des réponses tout aussi courageuses en matière de financement.

Je suis une fervente partisane de la Garantie jeunes, expérimentée en 2013 dans mon département. À mes yeux, il s'agit du meilleur dispositif d'insertion des jeunes les plus éloignés de l'emploi depuis bien longtemps. Il doit sa réussite aux moyens alloués, notamment en termes d'accompagnement. On arrive à des taux de réussite proches de 50 %.

Le Gouvernement propose de doubler le nombre de bénéficiaires de la Garantie jeunes. C'est un premier pas, mais ce dispositif ne peut être l'alpha et l'oméga de l'insertion des jeunes. On peut ne pas être « NEET », avoir moins de 25 ans et se retrouver sans ressources sans remplir les conditions pour entrer dans ce dispositif. Cette proposition de loi vise donc à répondre à l'urgence, aux besoins de subsistance de ces jeunes.

En ce qui concerne le revenu de base et son expérimentation, monsieur Vanlerenberghe, vous prêchez une convaincue. Mon département fait également partie de ceux qui souhaitent une telle expérimentation. La mise en place d'un revenu de base constituerait la meilleure solution pour des raisons d'universalité, d'automaticité.... Les associations de jeunes que nous avons auditionnées nous ont répondu qu'il fallait d'abord répondre à l'urgence et que le RSA avait le mérite d'exister. D'un point de vue technique, et même si la question du financement reste posée, il est plus facile de verser immédiatement un RSA à un jeune de moins de 25 ans.

Les nombreux dispositifs existants s'adressent souvent aux plus éloignés de l'emploi. Il faut commencer par eux, mais cela ne répond pas à toutes les problématiques.

Nous pourrions longtemps débattre du choix entre accompagnement et assistanat. Dans mon esprit, il n'est pas question d'attribuer une allocation sans accompagnement. Le RSA prévoit d'ailleurs un accompagnement, qui varie selon les départements.

Nous savons que certaines catégories de bénéficiaires du RSA n'entreront pas dans l'emploi durable. Je pense, par exemple, à la question du handicap. Dans les commissions d'attribution du RSA, on rencontre des personnes qui devraient plutôt relever de l'AAH, mais qui n'y ont pas droit pour diverses raisons et qui ne sont pas employables au regard des conditions actuelles de l'emploi. Que faire ? Je pense aussi aux seniors : plus personne ne veut des personnes de plus de 58 ans, pourtant encore capables de travailler. Notre système de solidarité nous permet de les accompagner jusqu'à leur retraite.

La société ne permet pas à tout le monde de s'insérer dans le monde du travail et on n'a pas le droit de laisser ces personnes sans aucun revenu de subsistance. L'accompagnement doit rester le fil conducteur.

Comme l'a souligné l'Observatoire des inégalités, un jeune de 18 ans n'est pas forcément dans la même situation qu'un jeune de 25 ans. Il faut donc mettre des accompagnements en place pour ceux qui ont besoin d'autre chose que d'un simple revenu de subsistance immédiat.

Les études récentes, notamment celles menées par Esther Duflo, montrent que le fait d'accéder à un minimum social ne désincite pas à la recherche d'un travail. J'aimerais que l'on dépasse cette idée. Quel jeune aujourd'hui aurait envie de s'inscrire durablement dans une situation de bénéficiaire du RSA ?

Lors de son audition, la déléguée interministérielle à la lutte contre la pauvreté m'a également opposé la responsabilité familiale. Bien évidemment, les parents ont une responsabilité vis-à-vis de leurs enfants, tout comme les enfants en ont une vis-à-vis de leurs parents seniors. Mais alors, on tombe toujours sur les mêmes : certaines familles vont pouvoir accompagner leurs enfants et leur offrir le gîte et le couvert jusqu'à 30 ans, mais d'autres ne le peuvent plus. Et d'autres encore considèrent que, compte tenu de leurs propres difficultés, dès lors qu'un jeune majeur a terminé son cursus scolaire, il doit se débrouiller. Chacun doit être rappelé à ses propres responsabilités, mais on ne peut absolument pas s'arrêter là.

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