La Fédération nationale des unions de jeunes avocats (FNUJA) a vocation à regrouper de jeunes avocats, mais pas uniquement. Nous comptons des confrères qui exercent une activité judiciaire et des avocats ayant une activité de conseil, dans des barreaux de différentes tailles. La population de nos adhérents est très diversifiée et représente bien la population des avocats.
Sur le rapport Perben, nous avons plusieurs observations à formuler. La mission confiée à notre confrère Dominique Perben était très ambitieuse ; malheureusement, il n'a peut-être pas eu le temps de conduire sa mission dans les meilleures conditions en raison de la crise sanitaire, puisqu'il a été missionné le 9 mars et a remis son rapport en août.
La manière dont Mme la garde des sceaux a analysé notre profession me paraît intéressante. Elle indique dans sa lettre de mission que son objectif est de « garantir aux avocats, dont la spécificité professionnelle est le fondement de notre démocratie, leur indépendance, leur liberté d'exercice, leur autonomie de fonctionnement, la viabilité de toutes les structures ». Elle identifie donc bien la spécificité de la profession, liée à notre statut de profession réglementée soumise à une déontologie, qui encadre tous nos actes, dans notre exercice professionnel et dans notre vie personnelle. Ces règles n'existent pas pour nous contraindre ; elles sont surtout là pour protéger nos clients.
Je ne vous cache pas qu'après avoir lu ce rapport avec beaucoup d'intérêt, nous y avons vu un manque d'ambition, ou à tout le moins nous aurions aimé qu'il aille plus loin. Certes, certaines propositions demandées depuis de nombreuses années par la profession sont reprises, notamment celles relatives à l'acte d'avocat, à l'exécution provisoire de la taxation des honoraires ou encore à la revalorisation de l'aide juridictionnelle.
Concernant la proposition de créer un observatoire de l'égalité homme-femme au sein de la profession, je voudrais dire que nous sommes déjà allés beaucoup plus loin en pratique. Par exemple, nous avons pris des mesures quant à l'égalité, non pas simplement homme-femme, mais par exemple en faveur des personnes en situation de handicap. De nombreux travaux ont été faits à cet égard au cours de la mandature précédente. Il faut donc nous écouter en amont : la profession a déjà avancé sur de nombreux sujets et elle est allée plus loin que les préconisations du rapport Perben, qui nous semble manquer d'ambition.
Par ailleurs, nous regrettons que cette réflexion sur l'avenir de la profession aborde la question de la collaboration uniquement sous l'angle de la rupture de contrat. Certes, nous sommes une profession d'indépendants et libéraux et ne bénéficions pas de l'assurance chômage. Et, en effet, se pose la question d'une assurance collective de la profession. Mais la collaboration, période de début d'activité, permet de mettre le pied à l'étrier des jeunes confrères pour le développement de leur activité.
En ce qui concerne la situation économique des confrères, d'autant plus compliquée durant l'année 2020, le rapport pointe une incapacité récurrente à nous imposer sur de nouveaux champs d'activité. Il me semble, au contraire, que la profession a multiplié son offre. La vision de notre profession est donc très critique et pessimiste. Les avocats sont pourtant novateurs : nous accompagnons nos clients dans l'évolution de leurs activités et nous savons également faire évoluer la nôtre, dans la cadre de nos règles déontologiques. C'est l'un des objectifs de chaque assemblée générale du CNB, nous oeuvrons pour qu'il y ait un avocat dès qu'il y a un besoin de droit.
En revanche, je suis en accord avec Dominique Perben sur le constat d'un accès limité à la justice, en raison des faibles capacités d'accueil. En effet, nous ne pouvons pas être satisfaits des délais de procédure : nous les subissons, tout comme les justiciables. Mais la capacité du système judiciaire à recevoir et à traiter les demandes de justice dans des délais acceptables n'est pas un paramètre que la profession peut maîtriser, puisque cela relève des pouvoirs publics. Nous sommes confrontés, chaque jour, à la carence des moyens de la justice, qui est la cause de notre absence de fonctionnement durant le premier confinement. La profession était prête à fonctionner, mais pas les juridictions - je ne jette pas la pierre aux magistrats. L'amélioration des moyens de la justice permettra de ne pas décourager certains justiciables de saisir la justice.
En matière de développement de l'activité, il me semble que nous avons su investir : nous sommes allés chercher d'autres marchés. Par ailleurs, se pose la question des financements au sujet desquels le rapport préconise l'ouverture à des capitaux. La FNUJA soutient depuis de nombreuses années cette proposition dans des conditions strictement encadrées. Cette mesure a été votée en assemblée générale lors de la dernière mandature du CNB. S'il faut aller dans ce sens, il existe également d'autres moyens comme l'apport d'affaires. C'est l'occasion pour la profession d'obtenir des ressources supplémentaires.
Un point extrêmement important, pourtant non repris dans le rapport Perben, est celui du maillage territorial - la FNUJA y est extrêmement attachée. Nous sommes, aujourd'hui, en mesure d'assurer un service de qualité aux justiciables, car nous sommes à côté d'eux. Nos clients ont besoin d'avocats à proximité. Pour maintenir la vie des barreaux, il faut maintenir celle des juridictions. Moins il y aura de juridictions, plus loin les justiciables auront à se déplacer. L'accès de proximité au droit nous paraît donc un élément primordial.
Nous partageons les inquiétudes du syndicat des avocats de France quant à l'intervention croissante des pouvoirs publics, notamment en matière de formation des avocats. Nous sommes très attachés aux prérogatives du CNB et au fait que la profession gère la formation.