Je rejoins grosso modo les propos qui ont été tenus. Nous constatons la déferlante de réformes que le justiciable et la profession a connue, tout spécialement depuis la mandature du Conseil national des barreaux de 2018 à 2020. Je ne compte pas la période de crise sanitaire, pour laquelle nous avons comptabilisé une cinquantaine d'ordonnances en moins d'un an. Je ne compte pas non plus les réformes de la justice venues amender celles, toujours pas digérées, de décembre 2019. Une autre réforme prise par voie réglementaire vient de tomber au mois de novembre dernier.
Je rappelle que la profession d'avocat a une double activité : le conseil et l'action judiciaire. La première est extrêmement importante pour les contentieux. Le règlement national des avocats nous définit comme des « partenaires de justice ». Nous devons travailler avec les magistrats tant les problèmes que rencontre la justice sont importants. Toutefois, on l'a bien compris, la profession d'avocat ne va pas se substituer au budget de l'État. En revanche, plutôt que de multiplier des procédures pour pallier cette carence, il est indispensable de pouvoir avancer avec des textes intelligibles par la profession et surtout par le justiciable. En effet, celui-ci est notre principal client en matière de conseil, qu'il soit un particulier ou une société. Nous défendons une valeur entrepreneuriale qui a son importance. L'absence d'accès aux tribunaux durant le confinement a mis nos clients - qu'il s'agisse des entreprises, des sociétés ou des particuliers - dans une extrême détresse. Pourtant, nous avons réussi à maintenir notre activité, car nous avons été forts et unis.
Beaucoup de choses positives ont été avancées dans le rapport Perben et l'ACE y est majoritairement favorable, même si certains travaux complémentaires doivent être menés. Si on écoute le justiciable et l'avocat qui ne travaille que pour le justiciable, au titre des valeurs fondamentales de la profession que sont son caractère libéral et son indépendance, les axes majeurs du rapport sont bien définis. Le secret professionnel doit être absolument préservé dans tous les domaines d'activité de l'avocat, ainsi que la souplesse économique nécessaire au fonctionnement des cabinets.
Souplesse économique, innovation, réflexion ne sont pas antinomiques avec le respect de nos garanties fondamentales et de notre socle déontologique. C'est la raison pour laquelle nous sommes favorables à certaines préconisations du rapport Perben : la pluridisciplinarité, l'ouverture des capitaux pour permettre, sinon une survie économique, l'ouverture de nouveaux horizons, naturellement sous le contrôle de nos règles déontologiques.
En matière de formation, il est important de souligner que la formation initiale n'est pas une redite universitaire. Nous avons besoin que nos jeunes avocats soient formés au management et à la dimension entrepreneuriale. Cette dernière vaut pour tous et pas seulement pour les gros cabinets d'affaires. Le collaborateur libéral ou l'avocat indépendant entrepreneur doit savoir gérer, communiquer, facturer, conclure des conventions d'honoraires, parler, rédiger, etc. Cette formation doit donc revêtir une dimension pratique plutôt que théorique, cette dernière étant du ressort de l'université.
Enfin, il nous faut nous rapprocher des magistrats. Peu importent les clivages, notamment politiques. La question est de travailler de concert pour la justice avec nos magistrats, les réformes que nous avons connues ne pouvant permettre la préservation de l'accès au droit. Le résultat des cinquante réformes en moins de dix ans pour la cour d'appel est quasi nul par rapport aux objectifs escomptés. Je ne pense pas que la solution judiciaire soit acceptable, dans l'intérêt du justiciable. Le rapport Perben propose ainsi de rallonger les délais couperets de caducité ou d'irrecevabilité, alors que nous pourrions revenir à la loyauté des débats du code de procédure civile, principe malheureusement modifié.
L'article 700 de ce code est également extrêmement important en ce qu'il responsabilise les protagonistes dans le procès : il est dans l'intérêt du justiciable d'avoir tenté, avant le procès, des modes de règlements alternatifs à l'amiable ou en ayant évité le litige par un conseil en amont plus efficient. Nous sommes également favorables à la définition de la consultation juridique à condition qu'elle soit définie sans être sans cesse évolutive. Je m'oppose, à cet égard, au fait de se fonder sur la jurisprudence qui n'est pas un texte normatif.