Je n'en doute pas, elle est tellement attendue !
Se posent des questions de recrutement, de formation, d'attractivité, de fidélisation. Quand on devient commissaire de police, c'est d'abord pour exercer ses fonctions au contact du terrain et des réalités quotidiennes de la sécurité des Français. Pouvoir être chef d'une circonscription aussi importante que celle de Cherbourg en sortie d'école est une opportunité formidable.
Il faut également inciter les commissaires de police à ne pas quitter leur affectation au bout de deux ans : ce délai est trop court. Certaines circonscriptions voient tourner des commissaires qui ne sont que de passage.
Vous avez étendu votre question à la revendication plus large d'avoir un corps unique, plutôt portée par les organisations syndicales d'officiers que par celles des commissaires. Le ministre de l'intérieur a demandé qu'on conduise en 2020 une réflexion approfondie sur la question du management et du commandement dans la police. À titre personnel, je suis très attaché à la présence des trois corps - chacun a une fonction bien précise. Il existe des passerelles internes qui permettent à des gardiens de la paix de devenir officiers, à des officiers de police de devenir commissaires de police, pour une part qui représente à chaque fois la moitié des recrutements. C'est un ascenseur hiérarchique important, qui produit ses effets. Les gradés ont un rôle d'encadrement bien précis, les officiers en ont un aussi et les commissaires en ont un autre.
Comme pour le redécoupage territorial, je ne suis pas certain que ce soit le moment de lancer le chantier de la fusion des deux corps.
Vous avez évoqué Coutances, mais je ne pense pas que ce soit forcément le moment d'en parler. Dans des départements ruraux, nous avons un éclatement des circonscriptions de sécurité publique. Il ne faut pas s'interdire de réfléchir à une meilleure organisation - cela ne signifie pas une diminution - des moyens de la police dans ces territoires.
Madame Brulin, vous m'avez interrogé sur la relation entre la police nationale et la police municipale. Ce qui constitue le socle de cette relation, c'est la convention de coordination qui détermine la manière dont les relations s'organisent entre les deux forces. Sur les 1 013 polices municipales, 921 ont signé une telle convention. Il est toujours utile que chaque force connaisse parfaitement son périmètre d'action et son niveau de responsabilité.
Vous avez évoqué le commissariat ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre : je n'ai peut-être pas été très clair, mais je voulais dire que, dans certains commissariats, l'activité est très réduite pendant la nuit. C'est plutôt un bon signe : il y a heureusement dans notre pays des territoires où la délinquance est très faible. Cela ne signifie pas qu'il faille fermer les commissariats la nuit et demander à la police municipale de prendre le relais.
Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de consacrer des effectifs en permanence aux CLSPD. Les élus doivent avoir en face d'eux des policiers qui ont des responsabilités sur le terrain, et non d'avoir des policiers chargés d'une fonction plus administrative qui feraient un « rapport » des problématiques identifiées sur le terrain. Cela ne nécessite pas forcément beaucoup de moyens : il faut se réunir, prendre les bonnes décisions et s'assurer qu'elles sont mises en oeuvre.
Sur l'article 24, nous ne sommes pas opposés à l'idée d'être filmés. Même si on le voulait, on nous l'imposerait, à juste raison. Des policiers souhaiteraient que les journalistes viennent voir leur manière de travailler, sous réserve du respect des règles relatives à l'anonymat et à la confidentialité de certaines opérations. Mais le code de procédure pénale limite cette possibilité, et une jurisprudence récente de la Cour de cassation a encore restreint cette capacité d'informer. J'ai régulièrement des exemples de procureurs de la République qui invoquent l'article 11 de ce code pour refuser que des journalistes assistent au travail quotidien de la police. Plus il y aura de transparence, mieux ce sera pour tout le monde : cela évitera les malentendus, les procès d'intention.
Alors oui à la diffusion des images, mais nous demandons que soient sanctionnés ceux qui diffusent ces images dans le but de nuire aux policiers. Il faut répéter qu'il y a une limite à ne pas franchir, même si je ne suis pas certain que cela découragera complètement ceux qui font ce type d'actes, parce que ce sont des militants, des activistes, qui acceptent d'être confrontés à la sanction.
De la même façon, nous revendiquons la possibilité pour les policiers de porter des caméras et de filmer les interventions. L'achat de 15 000 caméras pour la police est prévu dans le projet de loi de finances pour 2021, afin que, selon les engagements du Président de la République et du ministre de l'Intérieur, chaque patrouille puisse être équipée d'une caméra. Parfois, ces caméras provoquent une désescalade, quand la une personne s'arrête cesse de provoquer un policier lorsqu'elle voit qu'elle est filmée. Les images nous permettent d'établir la réalité des faits tels qu'ils ont pu se dérouler, sans se baser uniquement sur un compte rendu verbal ou écrit des opérations.
Nous ne voulons pas nuire à la liberté de la presse. Je me suis longtemps occupé de lutte antiterroriste. À une époque, l'organisation terroriste ETA était présente de manière très active sur notre territoire, et pas seulement dans le sud-ouest. L'ETA utilisait les articles de presse décrivant des arrestations pour faire des albums photo qu'elle diffusait en interne, non pas pour s'en prendre aux policiers, mais pour que ses membres sachent repérer ces policiers quand ils étaient en surveillance. C'est depuis cette date que nous avons décidé, pour les opérations de police judiciaire menées dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, de faire porter des cagoules à ces fonctionnaires.
Pour la police de voie publique, la police du quotidien, je n'envisage pas que les policiers soient un jour cagoulés. En contrepartie, ils doivent être protégés.