Intervention de Christèle Gautier

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 20 janvier 2021 à 9h35
Sport et santé — Audition du dr albert scemama chef de projet au service évaluation de la pertinence des soins et amélioration des pratiques et des parcours de la haute autorité de santé de M. Matthieu Schuler directeur de l'évaluation des risques et de Mme Irène Margaritis chef de l'unité évaluation des risques liés à la nutrition de l'anses du dr alain frey médecin du sport et urgentiste président de la société française de traumatologie du sport et de Mme Christèle Gautier cheffe de projet stratégie nationale sport-santé au ministère des sports

Christèle Gautier, cheffe de projet Stratégie nationale sport-santé au ministère des sports :

Nous sommes tous conscients de l'impact lié à la gestion de la crise sanitaire, bien documenté, et nous faisons le maximum pour le minimiser par des ajustements pour chaque public, des sportifs de haut niveau aux personnes qui se voient prescrire une activité physique adaptée dans le cadre d'un parcours de soins. C'est la raison pour laquelle une mesure dérogatoire, dans le cadre du confinement, a été prise pour toutes les personnes justifiant d'une prescription d'APA. Une réunion interministérielle se tient aujourd'hui, au cours de laquelle ces points seront évoqués, qu'il s'agisse des personnes en situation de handicap ou de celles qui bénéficient d'une prescription d'APA. Nous essayons de trouver les meilleurs ajustements, et c'est complexe.

Nous avons un important effort de communication à faire. La sédentarité est considérée comme un fléau comparable au tabagisme : sitting is the new smoking ! Avec la direction générale de la santé, le ministère des sports et l'ensemble des parties prenantes, en interministériel mais aussi avec les mutuelles, les représentants des professionnels de santé du sport et d'autres, nous avons décidé de mettre en place une action d'information, de sensibilisation et de communication large, à l'instar du mois sans tabac : le mois de l'activité physique et sportive. Ce mois devait avoir lieu, dans sa première édition, au lendemain des jeux Olympiques et Paralympiques, c'est-à-dire l'été dernier. L'idée était d'avoir chaque année un effet massif d'information, de sensibilisation et d'accompagnement des différentes populations par les professionnels concernés et par toutes les parties prenantes. Il faut imprimer dans le quotidien des gens un changement d'attitude, et promouvoir un droit à trouver des solutions autres dans notre quotidien. Pour cela, nous voulions prendre par la main les personnes, en leur disant de manière non culpabilisante qu'elles doivent et qu'elles peuvent trouver une solution, et qu'elles ne sont pas seules pour la trouver. Nous n'avons pas pu le faire l'année dernière. Nous prévoyons la première édition pour 2021, vraisemblablement au mois de septembre. Nous y travaillons avec Santé publique France, avec le Comité national olympique et sportif français et avec les agences sanitaires, et toutes les parties prenantes seront mobilisées.

Les bénéficiaires, qu'il s'agisse des représentants des patients ou du public, seront intégrés aux réflexions que nous menons, afin que nous appréhendions vraiment la situation réelle, sur le terrain, des personnes que nous voulons emmener.

Nous rencontrons une difficulté pour amener l'ensemble des médecins traitants, qui sont majoritairement des médecins de ville, à prescrire l'APA. Quel premier bilan faisons-nous de la loi de 2016 ? Il y a un avant et un après cette loi et les textes réglementaires qui l'ont suivie. On a vu le développement sur les territoires de dispositifs spécifiques, qui mobilisent à la fois les acteurs de la santé, les acteurs du sport, et ceux de l'APA. Il s'agit des médecins traitants, mais aussi des masseurs-kinésithérapeutes, des infirmiers, bref de toute cette communauté professionnelle, sans oublier les pharmaciens. C'est une véritable évolution, qui a nécessité une forte structuration sur le territoire, parce que les cultures professionnelles sont différentes.

Sous l'impulsion de la HAS et des expertises de l'Inserm demandées par le ministère chargé des sports, avec les travaux de l'Anses, ceux des sociétés savantes et professionnelles, avec les études menées par l'Observatoire national de l'activité physique et de la sédentarité (Onaps), nous avons pu documenter la question et accompagner les acteurs, organisateurs sur les territoires de ces structurations, qu'il s'agisse des ARS, des directions régionales de la jeunesse et des sports, et nous tenons cette communauté pluriprofessionnelle pleinement informée.

Au-delà de cette primo-information, il nous faut passer à la réalisation. Dans le cadre de la formation continue, nous allons poursuivre cette sensibilisation et la rendre plus concrète au quotidien et plus facile à mettre en oeuvre. De nombreux médecins nous ont dit que les éléments produits étaient très intéressants, mais qu'ils ne savaient pas comment les mettre en place.

Vous avez évoqué le non-remboursement. Beaucoup de praticiens m'ont demandé pourquoi il n'y avait pas une rémunération sur les objectifs de santé publique associée à la prescription. Ce n'est pas à moi de répondre... Beaucoup de médecins spécialistes - médecins du travail, médecins du sport, oncologues, cardiologues, pneumologues - se demandent aussi pourquoi ils n'ont pas le droit de prescrire. Le dispositif s'est étoffé ; accompagné par les deux ministères pilotes, il s'est déployé sur les territoires. Pour prendre toute sa mesure, nous devons le renforcer par des éléments permettant aux territoires de s'en emparer davantage. Il s'agit de donner la liberté aux acteurs pluriprofessionnels du territoire de s'organiser entre eux et de trouver les bons ajustements. Si un médecin traitant prescrit à son patient, qu'il connaît bien, vingt séances d'activité physique adaptée, avec des limitations fonctionnelles, et que le bilan de la condition physique est réalisé par un spécialiste de l'activité physique et sportive et de l'APA, nous avons des modalités opérationnelles pour une chaîne d'action plus efficiente.

Les médecins doivent être sensibilisés à la nécessité de recommander l'activité physique adaptée dès le plus jeune âge. Aux questions traditionnelles - fumez-vous, buvez-vous, etc. - il faut y ajouter : pratiquez-vous une activité physique ? Avec la direction générale de la santé, nous travaillons à un élargissement de la possibilité de prescrire à d'autres médecins que le médecin traitant, et à d'autres patients que les patients souffrant d'une affection de longue durée, notamment pour certaines maladies chroniques comme l'hypertension artérielle ou l'obésité chronique. En amont, un effort de sensibilisation de la population générale doit être ciblé là où l'on sait que les patients viennent, c'est-à-dire chez les pharmaciens, dans les officines, auprès des infirmiers, des masseurs-kinésithérapeutes. Et il faut tout prendre en charge beaucoup plus tôt, avec des recommandations, et pas seulement des prescriptions.

Pour les temps d'activité des enfants à l'école, le ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports met un certain nombre d'outils à la disposition des élèves et des enseignants, avec notamment la mise en place du programme « 30 minutes d'activité physique quotidienne », ciblé sur le niveau primaire pour, dès le plus jeune âge, renforcer le forfait horaire de trois heures. En périscolaire, nous arrivons également à accentuer l'activité afin de limiter l'impact sur la santé. Il existe aussi des apprentissages aux mobilités durables, comme le savoir rouler à vélo ou l'aisance aquatique.

Pour les actifs, nous avons un plan très important de déploiement de l'activité physique et sportive en milieu professionnel. Celle-ci sera intégrée à la fois au volet « qualité de vie au travail » et au volet « santé au travail ». Nous en sommes au quatrième plan « santé au travail » pour les entreprises et au premier pour la fonction publique : c'est une petite révolution !

Pour les aînés, il y a longtemps que le ministère chargé des sports réfléchit à la question. Plusieurs plans se sont succédé. Nous réfléchissons aux conditions dans lesquelles l'APA pourrait être reconnue comme une compensation à la perte d'autonomie. Ce volet complémentaire est déjà bien intégré dans les conférences des financeurs pour la prévention de la perte d'autonomie. Il nous faut aller plus loin, et beaucoup de programmes sont développés qui permettent, jusqu'à GIR 3, d'accéder à une activité spécifique, qui n'est pas une activité sportive. Il faut dire à tous que l'activité physique et sportive s'appréhende à tous les âges de la vie. Elle se décline et s'adapte pour chacun. Les professionnels que nous formons au ministère chargé des sports, et les enseignants d'APA qui sont formés à l'université, ont vocation à accompagner ce mouvement.

Oui, nous devons aller plus loin dans la formation des enseignants et des éducateurs sportifs. Beaucoup a été fait pour que la sensibilisation des fédérations se traduise dans les faits sur les territoires. Celles-ci ont mis en place, ces dernières années, des plans de déploiement de l'activité physique à des finalités de santé, pour les populations de seniors, ou de personnes qui ont des pathologies spécifiques.

Avec la direction générale de la santé, nous avons reconnu un certain nombre de formations diplômantes qui donnent un éclaircissement sur qui peut faire quoi. Prescrire, oui, mais les médecins veulent savoir à qui ils adressent leurs patients ! Nous réfléchissons à une nouvelle filière professionnelle, et les travaux sont engagés avec l'ensemble des parties prenantes. Il faut distinguer entre activité physique et sportive et APA, qui n'est pas de la rééducation.

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