Intervention de Dominique Théophile

Réunion du 20 janvier 2021 à 15h00
Droits nouveaux dès dix-huit ans — Discussion d'une proposition de loi

Photo de Dominique ThéophileDominique Théophile :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Rémi Cardon propose d’ouvrir aux jeunes de moins de 25 ans un droit au revenu de solidarité active, le RSA.

Parce que la crise économique et sociale que nous traversons touche en premier les plus jeunes, vous souhaitez faire de cette réforme « la première pierre d’un dispositif universel » qui réponde à la fois à une urgence - la précarité grandissante de la jeunesse française - et à un souci « d’autonomie et d’émancipation ».

Votre proposition n’est pas nouvelle, puisqu’elle actualise, au regard de la crise sanitaire, un débat vieux de trente ans. En 1988, le gouvernement socialiste de Michel Rocard avait en effet porté la création d’un revenu minimum d’insertion, le RMI, pour faire face à l’émergence d’une « nouvelle pauvreté » de masse.

À l’époque déjà, les jeunes de moins de 25 ans avaient été écartés de ce dispositif, au motif qu’ils bénéficiaient d’actions spécifiques d’insertion professionnelle. En 2008, la création du RSA, et plus tard celle du RSA jeune, n’a pas remis en cause l’existence de cette limite d’âge, notamment au regard des risques de stigmatisation sur le marché du travail.

Si cette proposition n’est pas nouvelle, elle a le mérite de mettre un peu plus en lumière les difficultés que rencontre la jeunesse française, en plus de nous permettre d’en débattre aujourd’hui dans cet hémicycle et, si j’en crois certaines déclarations, de faire bouger quelques lignes.

En France, 1, 5 million de jeunes vivent en situation de pauvreté. C’est trop ! Leur part a fortement crû ces quinze dernières années, passant de 8 % à 13 %. Et ce phénomène, qui existait avant la crise sanitaire, n’a fait que s’aggraver ces derniers mois : parce qu’ils étaient en CDD, en intérim ou entre deux contrats et qu’ils n’ont pu, en raison des confinements successifs, retrouver un emploi ; parce que, étudiants ou jeunes diplômés, on ne leur a pas donné, et on ne leur donne pas, leur chance.

Ce constat, nous le partageons avec le Gouvernement. Des mesures d’urgence en faveur du pouvoir d’achat des jeunes ont été présentées, ici même, ces derniers mois. Vous les connaissez. Il s’agit du versement exceptionnel de 150 euros pour les jeunes les plus précaires. Il s’agit de l’instauration du ticket de restaurant universitaire, ou ticket RU, à un euro pour les étudiants boursiers. Il s’agit du doublement des aides d’urgence du Crous.

Toutefois, ces mesures, nous en convenons, ne sauraient constituer une réponse satisfaisante, surtout pérenne à une crise qui s’annonce longue.

Si nous partageons avec les auteurs de cette proposition de loi une même ambition, à savoir sortir de la précarité une partie de la jeunesse française et l’accompagner vers son émancipation, nous n’en partageons pas les moyens, parce que nous pensons que la perspective d’un jeune ne saurait être celle des minima sociaux, parce que la question de l’insertion sociale et professionnelle, évidente dans l’esprit des promoteurs du RMI et du RSA, semble aujourd’hui secondaire, et parce qu’essayer ce dispositif, même le temps de la crise, ce serait inévitablement l’adopter.

Nous pensons ensuite que nous avons mieux à leur offrir, en facilitant leur entrée dans la vie professionnelle quand cela est possible, en les accompagnant lorsque cela est nécessaire. C’est toute l’ambition du plan de relance « 1 jeune, 1 solution », dont le montant de 6, 7 milliards d’euros constitue un effort sans précédent envers les jeunes.

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