C'est vrai, Monsieur Pointereau, que nous avons souvent eu l'occasion de discuter de ce sujet. Cette proposition de loi nous donne une nouvelle fois l'occasion de débattre ensemble de l'urbanisme, qui est un enjeu au coeur de l'aménagement du territoire.
Ce sont les lois Defferre, en 1983, qui ont placé cette compétence au coeur de l'exercice du pouvoir local. Au fil des ans et des nouveaux défis, nationaux et locaux, le droit de l'urbanisme s'est enrichi pour s'adapter à deux objectifs : la cohésion territoriale, avec les leviers créés par la loi SRU pour atteindre des objectifs ambitieux de mixité sociale, mais aussi avec la création des PLU, qui ont permis de concevoir et de mettre en place des projets de territoire ambitieux et équilibrés et déterminant finement la proportion de logements sociaux dans les différentes zones du territoire ; et la lutte contre le changement climatique, avec les règles relatives à l'installation d'énergies renouvelables et les critères de densité ambitieux, qui permettent de mieux contrôler l'étalement urbain.
Les documents d'urbanisme permettent de concevoir des projets de territoire en fonction des défis et potentialités de chacun. En ce sens, ils sont, en effet, depuis plus de vingt ans, Monsieur le rapporteur, des outils efficaces de différenciation. Les communes et les intercommunalités ont le choix entre réaliser un PLU ou un PLUi ou, plus simplement, avoir recours à la carte communale, voire à l'application du RNU. Je connais un certain nombre de communes, notamment des bourgs ruraux, qui souhaitent rester au RNU. Nous savons qu'un certain nombre de communes souhaitent - et c'est heureux - élaborer un PLU. Dans ce cas, logiquement, la carte communale doit être abrogée. Or, en l'état, les règles de procédure interrogent certains élus locaux, et la proposition de loi de M. Pointereau entend les clarifier sur un certain nombre de points.
En tant que ministre des collectivités territoriales, je partage le constat selon lequel il est particulièrement important de garantir la lisibilité du droit pour sécuriser les procédures. Toutefois, j'ai également la conviction, pour avoir moi-même été maire, que, pour être lisible, notre droit doit être caractérisé par la concision et la stabilité. Il faut donc limiter la loi à ce qui est strictement nécessaire. Or, il me semble que l'ensemble de l'article 1er de la proposition de loi est déjà contenu dans les textes existants. Je pense aux dispositions relatives à la définition de l'autorité compétente pour abroger les cartes communales, à la conduite d'une enquête publique ou au retour à la carte communale en cas d'abrogation d'un PLU.
Vous soulignez à juste titre un vide juridique au sein des textes existants. En effet, il peut y avoir une courte période durant laquelle aucun document n'est en vigueur, lorsque la carte communale est abrogée, mais que le PLU n'a pas encore pris effet. Le rapporteur l'a aussi mis en évidence. Nous devons donc aligner ces délais, car une telle situation n'est pas satisfaisante.
L'article 2 remet en vigueur les POS, devenus caducs depuis le 1er janvier 2021. Le sujet n'est pas nouveau, puisque j'insiste que c'est dès l'an 2000 que la loi SRU a créé les PLU, pour permettre aux collectivités territoriales de construire de véritables projets de territoire. En ce sens, les PLU avaient logiquement vocation à remplacer les POS. En 2014, la loi ALUR a été plus loin en prévoyant que l'ensemble des POS qui n'avaient pas été transformés en PLUi deviendraient ipso facto caducs au 31 décembre 2015.
Des délais supplémentaires ont été laissés, d'abord jusqu'au 31 décembre 2019, dans le cas où un PLUi était en cours d'élaboration. Quatre ans, cela peut sembler court, mais, dans beaucoup de cas, les procédures avaient été préalablement engagées. Conscients des difficultés à achever certains PLUi, et au regard de l'importance capitale de ces documents, nous avions, avec Sébastien Lecornu, alors ministre chargé des collectivités territoriales, donné un an supplémentaire aux collectivités pour conclure les démarches en cours. Ce délai courait donc jusqu'au 31 décembre 2020, pour un total de cinq années. J'ai entendu ce que vous avez dit sur la crise sanitaire, mais les documents étaient dans leur immense majorité en voie de finalisation et je rappelle que j'ai travaillé personnellement sur les ordonnances prises pour faire face à l'urgence sanitaire et qui ont permis de prendre les délibérations nécessaires.
L'essentiel du chemin a été fait en matière de remplacements des POS. En 2014, 6 533 POS étaient en vigueur. Ils étaient 768 au 1er janvier 2020, et seulement 530 POS sont devenus caducs au 1er janvier 2021. Concrètement, l'année supplémentaire accordée a donc permis la transformation de 238 POS. En tout, plus de 91 % des POS ont bien été convertis - ce qui prouve que les élus font un travail important dans leurs communes. S'agissant des procédures en cours, pour environ 130 communes revenues au RNU, les PLUi ont passé le stade de l'enquête publique et pourront être rapidement approuvés. En revanche, 160 communes se situent au stade de l'arrêt du projet de PLUi, ce qui signifie, en général, qu'il reste au moins un an de travail. Plus de 200 communes sont à un stade d'avancement très faible. Ainsi, même le décalage d'un ou deux ans que vous proposez ne suffirait pas.
J'entends bien les difficultés qui peuvent se poser ici ou là, pour un certain nombre de projets de collectivités. Cependant, le droit de l'urbanisme prévoit déjà des outils sur mesure pour résoudre un certain nombre de problèmes et ne pas bloquer les projets. Le RNU permet les projets dans les zones déjà urbanisées et, même lorsque l'on fait de l'étalement urbain - ce que l'État n'encourage pas -, il est possible de justifier de dérogations. Contrairement à ce que vous avez dit, Monsieur le rapporteur, il n'y a pas de perte du DPU, puisque ce droit est maintenu pour la réalisation des logements sociaux. Par ailleurs, les porteurs de projets ont pu demander des certificats d'urbanisme permettant de cristalliser les règles du POS pendant dix-huit mois, soit jusqu'au 30 juin 2022.
Ainsi, compte tenu du faible nombre de POS concernés et de ces dispositions, les conditions étaient et sont réunies pour une transition en douceur. Ma conviction est qu'il est vraiment temps de mettre un terme à ces reports successifs. Je crois d'ailleurs que les propositions d'amendements du rapporteur viennent les supprimer, en contrepartie d'autres dispositions dont nous allons discuter. Cela fait vingt ans que le remplacement des POS par les PLU est programmé. Ces reports ne sont bons ni pour les collectivités ni pour le territoire national dans son ensemble. C'est la raison pour laquelle nous ne souhaitons pas retenir la proposition de loi présentée aujourd'hui.