Intervention de Arnaud de Belenet

Réunion du 26 janvier 2021 à 14h30
Renouvellement des conseils départementaux et régionaux — Discussion générale

Photo de Arnaud de BelenetArnaud de Belenet :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la date retenue fait consensus et vous disiez votre détermination, madame la ministre, à voir les élections se tenir en juin.

Reste à savoir si les modalités du vote seront compatibles avec les risques sanitaires que nous connaissons ; à ce sujet, nous pouvons nous en remettre à l’expérience des collectivités, puisque, depuis mars 2020 et encore plus depuis l’automne dernier, nous y voyons beaucoup plus clair et on a gagné en expérience.

Le Sénat propose d’ajouter l’avis du comité scientifique sur les modalités des élections et demande que l’on sollicite les conseils de ce comité pour l’organisation de la campagne ; c’est l’objet de l’article 2. En effet, c’est la principale question : comment cette campagne se déroulera-t-elle face à la crise qui a conduit le Gouvernement à mandater le président Debré pour étudier les conditions d’organisation ou de report des élections ?

Je partage le sentiment que le président de Régions de France a pu exprimer dans L e Journal du dimanche : nous avons besoin d’une respiration démocratique. En revanche, la petite musique, que l’on cherche à instiller, selon laquelle « on » – l’exécutif –, voudrait profiter de la crise sanitaire pour enjamber les prochaines échéances locales me semble infondée. Notre rapporteur le rappelait précédemment : alimenter cette musique serait alimenter le fantasme d’une manipulation politique et jeter l’opprobre sur l’ensemble du personnel politique, nous compris.

Lors de son audition, le président Debré faisait part de sa sympathie pour Léon Blum ; je ne prendrai quant à moi que peu de risques en citant Pierre Mendès France : « La démocratie, c’est beaucoup plus que la pratique des élections et le gouvernement de la majorité : c’est un type de mœurs, de vertu, de scrupule, de sens civique, de respect de l’adversaire ; c’est un code moral. »

J’ajoute que ce soupçon n’existerait pas si les échéances régionales et présidentielle étaient enfin totalement décorrélées ; quarante ans après les lois Defferre, la France n’a pas totalement donné à ses régions et à ses départements une identité locale propre. Nous ne pouvons que souhaiter que ces élections cessent de conforter ou de sanctionner une politique nationale. À titre personnel, je souhaite ardemment que la France se pose la question d’une journée entière consacrée aux scrutins locaux dans leur ensemble.

L’option proposée dans le rapport Debré consistant à reporter à la fin du mois de juin 2021 les élections régionales et départementales a fait l’objet d’un large consensus politique. La commission des lois y a donc souscrit, en apportant quelques modifications substantielles, notamment sur le calendrier. Notre rapporteur l’a précisé, ce report respecte tant les principes que la jurisprudence constitutionnels, en ayant pour objectif d’intérêt général de préserver les électeurs et les candidats face à la covid-19.

La commission a souhaité modifier l’article 1er du projet initial en proposant également un autre calendrier que celui proposé par le Gouvernement pour les échéances ultérieures. Celui-ci prévoyait de tenir les élections régionales et départementales en décembre 2027, afin de revenir, à partir de mars 2033, à un calendrier classique. La solution de la commission, qui consiste à décaler les élections à mars 2028, permet de revenir plus rapidement au droit commun sans percuter d’autres élections.

Le rapporteur a souhaité ajouter au projet de loi l’article 1er bis, qui permet aux électeurs de disposer de deux procurations, avec la possibilité, à titre dérogatoire, de voter dans une autre commune que celle du mandant. Le Gouvernement a émis des réserves sur ces mesures. Il craint, pour la première, l’occurrence de fraudes – ce risque ne nous semble pas totalement avéré, au regard des élections municipales de juin dernier, lors desquelles cette double procuration était autorisée – et, pour la seconde, il ne s’y oppose pas tant sur le principe que sur ses modalités. Nous adhérons à l’idée de faciliter la participation et de l’encourager grâce à ces dispositifs.

En ce qui concerne l’article 2 du projet de loi initial, qui prévoit la remise au Parlement d’un rapport du comité scientifique, la commission des lois du Sénat, craignant sans doute que cette « clause de revoyure » puisse fonder un potentiel report des élections après juin prochain, a proposé une rédaction plus sécurisée.

M. le rapporteur l’écrit d’ailleurs : « La situation sanitaire reste d’ailleurs très incertaine. Reporter les élections régionales et départementales en juin 2021 pourrait même paraître optimiste : l’immunité collective ne devrait pas être atteinte à cette date, malgré la campagne engagée pour vacciner la population. » Toutefois, nous souhaitons que les élections aient lieu, que la vie démocratique s’exerce normalement et que l’on ne crée pas de difficultés constitutionnelles.

Nous allons par ailleurs adapter, à raison, cet après-midi, l’article 4 du texte, relatif aux règles de propagande et de financement électoral, afin que les campagnes puissent se dérouler dans de bonnes conditions d’égalité entre candidats et de sincérité du scrutin.

L’article 5, introduit par le rapporteur, vient utilement compléter le dispositif précédent, en octroyant un délai supplémentaire aux candidats pour le dépôt de leurs comptes de campagne. À l’article 6, que nous avons ajouté, il nous est proposé d’instituer une campagne audiovisuelle sur certaines chaînes du service public pour les prochaines élections régionales. Nous comprenons l’utilité démocratique d’une telle intention pour sensibiliser nos concitoyens au rôle des régions et des départements et donc aux enjeux de leur renouvellement. Les difficultés matérielles que rencontrerait évidemment France Télévisions pour la mise en œuvre de cette mesure et le coût que celle-ci représente nous semblent tout à fait surmontables.

Enfin, la commission a introduit, en adoptant des amendements de notre collègue Catherine Di Folco, les articles 8 et 9, utiles aux collectivités locales concernées ; un délai supplémentaire leur est octroyé pour adopter les budgets primitifs et les comptes administratifs ; ces collectivités disposeront donc d’une plus grande souplesse et de davantage de sérénité dans leur préparation budgétaire.

Le groupe Union Centriste soutiendra le projet de loi dans la rédaction issue de son examen par notre commission des lois, afin que les élections régionales et départementales se tiennent en juin 2021.

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