Intervention de Guy Benarroche

Réunion du 26 janvier 2021 à 14h30
Renouvellement des conseils départementaux et régionaux — Discussion générale

Photo de Guy BenarrocheGuy Benarroche :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cette loi est une énième conséquence de la crise sanitaire sur notre vie démocratique, difficile équilibre entre les exigences de deux points essentiels dans notre vie publique et personnelle.

Depuis le report du second tour des élections municipales, des élections de six des douze sénateurs de Français de l’étranger et d’un certain nombre d’élections partielles, notre pays est de nouveau amené à s’interroger sur les conditions du maintien des échéances démocratiques à venir. Le dernier débat tenu dans notre hémicycle a montré combien l’incompréhension et l’incertitude des parlementaires face à des décisions unilatérales et tardives, fondées sur des données d’un conseil instauré et choisi par l’exécutif, rendues publiques selon un calendrier assez aléatoire, ont laissé des traces.

Il n’est pas question de remettre en cause les difficultés liées à la première vague de l’épidémie, le mélange de panique et de manque d’anticipation qui a conduit à des décisions brutales sur la campagne électorale et la tenue des scrutins. J’espère que, depuis, nous avons appris de ces errements.

L’exécutif, dans une démarche d’apaisement, a cherché à anticiper les difficultés possibles. Il a ainsi fait appel à Jean-Louis Debré qui a remis un rapport au Premier ministre sur les modalités d’organisation et le report de la date des élections régionales et départementales.

Les auditions menées ont révélé l’unanimité des scientifiques et des formations politiques sur l’impossibilité de maintenir un scrutin en mars ainsi qu’un consensus en faveur d’une date en juin 2021. C’est l’objet du premier article de ce texte.

Pour l’article 1er bis, la commission des lois a pallié l’oubli du Gouvernement quant aux dispositions prises pour le scrutin du deuxième tour des municipales permettant une double procuration pour un mandataire, recommandations qui apparaissent dans le rapport Debré.

Comme un certain nombre de membres de mon groupe, ainsi qu’au vu des travaux de la mission d’information sur l’organisation de ces scrutins, je reste prudent sur les votes à distance, par correspondance ou électroniques, en raison, en particulier, de problèmes techniques non résolubles dans un délai si court. Toutefois, j’ai déposé des amendements supprimant la possibilité de double procuration, afin de se prémunir contre de nombreuses dérives.

Je salue, en revanche, l’apport de la commission des lois permettant les procurations « familiales » et la possibilité offerte à chaque citoyen qui ne peut comparaître devant les officiers de police judiciaire pour l’établissement de sa procuration, d’obtenir que les autorités compétentes se déplacent à cet effet.

Venons-en à l’analyse, par le comité scientifique, de la situation sanitaire, objet de l’article 2. En plus de rendre public sans délai ce rapport, notre assemblée a rappelé que notre interlocuteur doit rester le Gouvernement, qui nous remettra lui-même un rapport à partir de l’avis des scientifiques.

Ce rapport, rendu au moins deux mois avant les élections, ne devra pas nous indiquer si celles-ci se tiendront, mais comment sécuriser leur mise en œuvre.

Bien entendu, reste à évoquer la question des rapports intermédiaires qui devraient suivre, avec ou sans revoyure, et donc, globalement, de la loyauté d’une prise de décision argumentée sur la tenue des élections.

La caution du comité scientifique ne doit pas servir d’alibi à un report des élections à l’automne à des fins politiques, alors que les scientifiques interrogés dans le rapport Debré estimaient que « cette saison est plus propice à une reprise de l’épidémie ». Et ce, sans parler du faible impact d’une campagne menée pendant les mois d’été ou du télescopage avec la préparation budgétaire des collectivités et de la proximité avec l’élection présidentielle.

Serait-ce, alors, un prétexte pour les reporter à l’année suivante, c’est-à-dire après l’élection présidentielle ? Nous ne voulons pas le croire.

L’avis du conseil scientifique du 26 octobre dernier évaluait la population vulnérable susceptible de subir des formes graves de la maladie, dont les plus de 65 ans, à 22 millions de personnes. Le ministre des solidarités et de la santé a annoncé, jeudi soir dernier – l’après-midi, il ne disait pas la même chose… –, que le Gouvernement comptait sur 30 millions de vaccinés à la fin du mois mai.

Aussi, il apparaît cohérent de fixer des élections à la mi-juin comme l’indique l’article 1er, puisque toute la population sensible et fragile sera vaccinée.

Reste la question essentielle de la campagne. Cette dernière pourrait être mise à mal par le prolongement de l’état d’urgence qui a servi de base à des décrets limitant les rassemblements, réunions ou activités sur la voie publique. Une élection sans campagne est-elle réellement démocratique ?

Comment mettre en place une réelle campagne permettant à chacun d’exprimer ses projets et de présenter ses programmes ? Si cela n’est pas possible, serait-ce un critère de report des élections ?

J’encourage, une fois de plus, le Gouvernement au dialogue et à la transparence. Madame la ministre, qu’envisagez-vous si une seule des régions est dans une situation sanitaire critique ou si, dans l’ensemble d’une région, seul un département présente des caractéristiques épidémiologiques inquiétantes ? Quels critères avez-vous fixés pour envisager un nouveau report des élections de juin ? De tout cela, nous aimerions être tenus informés, afin de participer au choix de ces critères et de ces décisions.

Pour toutes ces raisons, avec grande vigilance et avec les réserves nécessaires quant à l’évolution de la situation sanitaire – les scientifiques n’ayant, hélas ! pas de certitude sur l’acquisition de l’immunité collective – et de la nécessité d’un dialogue réel entre l’exécutif et l’ensemble des mouvements politiques, notre groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ce texte.

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