Merci de votre invitation. Quelques planches ont été préparées. En premier lieu, nous voulions rappeler comme M. Lachaume qu'une démarche pour le développement du stockage des matières a été entamée, notamment dans le cadre du PNGMDR 2010-2012, à titre de précaution. Les producteurs et l'ANDRA ont travaillé sur des options de stockage. Dans la suite de ces travaux, à titre conservatoire, le PNGMDR 2016-2018 a demandé à l'ANDRA de poursuivre les études de faisabilité du stockage des matières, notamment l'uranium appauvri, l'uranium de retraitement et les matières thorifères, au cas où celles-ci seraient classées en déchets radioactifs. Ces études sont menées en collaboration avec les propriétaires des matières. La prochaine étape majeure pour nous est un livrable attendu dans le cadre de la cinquième édition du Plan.
Quels sont les enjeux autour de la faisabilité d'un stockage pour l'uranium appauvri ? C'est d'abord un enjeu de volume, mentionné par les intervenants précédents. Dans l'édition nationale de l'inventaire, l'uranium appauvri représente un volume de 115 000 mètres cubes. L'inventaire de la catégorie des déchets de faible activité à vie longue, aux caractéristiques similaires, s'élève à 90 500 mètres cubes.
Un autre enjeu est celui de la sûreté. Ces matières présentent une faible activité, mais contiennent des radionucléides à vie longue, voire très longue. L'uranium appauvri est principalement composé d'uranium 238, qui a une période de 4,5 milliards d'années. Pour ces matières, les horizons de temps peuvent dépasser le contrôle sociétal.
Des similitudes avec les déchets FAVL avaient été mises en avant dans l'avis de l'ASN. Il s'agissait notamment de rapprocher, dans le cadre de nos études, celles faites pour les FAVL et celles faites pour les matières.
En termes de filières de gestion, que regardons-nous ? Les études prennent en compte les filières actuelles de gestion de déchets de l'ANDRA. Nous avons des centres en exploitation dans l'Aube, pour les déchets de très faible activité (TFA) et les déchets de faible et moyenne activité à vie courte (FMAVC). Les caractéristiques des matières dont nous parlons font que ces centres ne peuvent pas les accepter. Des filières sont en projet, notamment le projet CIGÉO, pour les déchets de haute et de moyenne activité à vie longue. Nous conduisons aussi des études pour le développement d'un stockage à faible profondeur pour les déchets FAVL.
Il est ressorti des études que les enjeux des matières se rapprochent fortement de ceux des déchets FAVL. Si nous faisons un focus sur ces travaux relatifs aux déchets FAVL, parmi l'ensemble des options examinées, il existe une étude pour le développement d'un stockage en faible profondeur sur la communauté de communes de Vendeuvre-Soulaines, qui pourrait recevoir une partie de ces déchets. Ainsi qu'il avait été indiqué dans un avis de l'ASN sur les déchets FAVL, les déchets prioritaires pour ce centre sont notamment des déchets de graphite et des déchets radifères. Compte tenu de sa capacité volumique, ce site ne pourra prendre en compte l'ensemble des déchets FAVL et n'aura pas vocation à stocker in fine des matières.
Nous pouvons conclure qu'il n'existe pas, pour l'instant, d'études visant à stocker des matières dans l'un des centres de l'ANDRA existant ou en projet avancé. Pour les déchets FAVL qui ne pourront pas être stockés dans le centre de Vendeuvre-Soulaines, et pour les matières, il est donc nécessaire de développer une filière dédiée et de rechercher un site, ce qui est un long processus, compte tenu du retour d'expérience que nous avons à l'agence.
Définir une solution de stockage pour les matières nécessite notamment de connaître les inventaires de ces matières : caractéristiques radiologiques et chimiques, et volumes associés. Nous avons aussi besoin de connaître les chroniques, c'est-à-dire la temporalité selon laquelle ces matières seront requalifiées en déchets et devront alors être prises en charge dans les stockages ; les conditionnements qui pourront être associés à ces matières devront notamment être définis.
Par ailleurs, il faudra passer par une démarche de recherche de site. Nous réfléchissons aux caractéristiques que devrait avoir un tel site d'accueil, notamment la roche hôte et la profondeur à laquelle pourrait être implanté le stockage.
Avec l'ensemble de ces éléments nous construisons différents scénarios. Ils seront comparés sur les plans de la sûreté, de l'environnement et de la dimension économique, afin d'identifier des solutions de stockage proportionnées aux enjeux. Comme l'a signalé Aurélien Louis, l'ensemble de ces travaux sera partagé avec les parties prenantes. À l'étape du livrable du PNGMDR que j'ai mentionné au début de mon propos, nous envisageons d'identifier deux scénarios pour approfondissement ultérieur.
En conclusion, pour ces matières, quelle que soit l'option du cycle - il en a été fait état dans les interventions précédentes, elles sont diverses et à des stades de maturité différents - une réflexion doit être menée sur leurs conditions de stockage ou d'entreposage, d'une part pour se prémunir des effets à long terme en cas de perte de contrôle par la société, et d'autre part pour conduire une démarche prudente de développement de solutions de stockage dont les principes sont les mêmes que pour les déchets.
Ainsi, une démarche progressive est en cours. Elle vise à démontrer la faisabilité du stockage des matières. Elle comprendra des étapes de concertation avec les parties intéressées. Toutes les options techniques possibles doivent être étudiées et sont pour l'instant sur la table. Cela nécessitera in fine un processus de recherche de site. Pour dimensionner le stockage, il faudra, le jour venu, un inventaire précis des matières qui in fine seront requalifiées en déchets, avec la temporalité des besoins.
Voilà les différents éléments que nous voulions porter à votre connaissance.