Intervention de Bruno Le Maire

Commission des affaires économiques — Réunion du 2 février 2021 à 17h35
Audition de M. Bruno Le maire ministre de l'économie des finances et de la relance

Bruno Le Maire, ministre :

La crise a un impact très fort, en effet, pour les activités thermales. Les centres sont fermés et l'activité touristique s'est effondrée. Elles sont éligibles aux mesures de maintien de l'activité partielle comme au fonds de solidarité : elles peuvent toucher dans ce cadre une indemnisation représentant 20 % de leur chiffre d'affaires, avec un plafonnement à 200 000 euros par mois.

Le fonds de solidarité est le pilier de notre action en faveur des entreprises, notamment celles des secteurs fermés, de l'hôtellerie, de la restauration, du tourisme, du sport ou de la culture. Nous avons déjà reçu 680 000 demandes au 15 janvier au titre du mois de décembre. Le niveau moyen des aides est passé de 2 400 euros en octobre à 5 400 euros en moyenne par dossier, ce qui est révélateur des besoins des entreprises, mais aussi la conséquence du déplafonnement des aides. Les dossiers de demandes supérieures à 30 000 euros font systématiquement l'objet d'un traitement manuel de la DGFiP et de la direction générale des entreprises. Nous avons reçu en janvier 4 600 demandes supérieures à 30 000 euros : 2 600 ont été traitées en quinze jours ; les deux tiers ont été rejetées, car il s'agissait de fraudes - des entrepreneurs ont déposé, pour le même mois, plusieurs dossiers avec des chiffres différents ; certains demandent des aides, mais n'ont pas réalisé de chiffre d'affaires de référence les années précédentes... Nous veillons donc à concilier rapidité et efficacité, tout en limitant les fraudes.

Le plafond des aides autorisées par la Commission européenne a été relevé de 3 à 10 millions d'euros. Nous utiliserons cette faculté pour aider, au cas par cas, des entreprises qui ont des charges fixes importantes dans les secteurs les plus touchés par la crise. Les remontées mécaniques, par exemple, profiteront de ce déplafonnement, tout comme - c'est encore à l'étude - les grands magasins parisiens ou les grandes surfaces, qui viennent d'être fermés et qui ont des loyers élevés.

La part de l'industrie dans le PIB a baissé de 18 % à moins de 12 % en une dizaine d'années, mais s'est maintenue en Allemagne ou en Italie. Il n'y a donc nulle fatalité, simplement les politiques publiques ne répondaient pas aux besoins de l'industrie française qui souffre à la fois d'un problème de compétitivité prix et d'un problème d'offre. Nous voulons nous y attaquer. La désindustrialisation a été un renoncement collectif et une faute économique autant que politique. Elle fait des ravages sociaux. Je me battrai pour l'industrie, car elle fait partie de notre culture. Mais on ne peut pas la défendre avec des impôts de production sept fois plus élevés qu'en Allemagne : c'est pourquoi nous les avons baissés de 10 milliards d'euros en 2021 et en 2022. Cela ne suffira pas toutefois à la réindustrialisation. Nous devons aussi mener une politique d'innovation beaucoup plus ambitieuse. Le crédit d'impôt recherche est un atout. Le programme d'investissements d'avenir (PIA) a doublé. L'industrie a besoin de nouvelles technologies et de technologies de rupture. Nous devons aussi valoriser nos atouts. La filière nucléaire en est un, avec des dizaines de milliers d'emplois et des technologies que nous avons mis des décennies à maîtriser. Le nucléaire n'est pas contradictoire avec le développement des renouvelables et l'amélioration de notre mix énergétique.

Pour réindustrialiser, il faut aussi traiter la dimension culturelle, expliquer aux jeunes que l'industrie est un secteur d'avenir, où se déploient l'impression 3D, l'intelligence artificielle etc. Sinon, nous manquerons des formations et des compétences nécessaires à l'industrie de demain. L'équilibre économique français passe par la défense de notre industrie, de notre souveraineté alimentaire, et la valorisation des métiers de service qui représentent une part importante de notre richesse.

Gaïa-X est un très beau projet. Une entreprise a besoin à la fois de stocker ses données numériques et de les valoriser. Or, les entreprises américaines ou chinoises ont un monopole en la matière et il sera sans doute difficile de les rattraper. C'est pourquoi nous devons séparer le stockage souverain des données et leur valorisation. Tel est l'enjeu. Les discussions sont longues, nous devons parvenir à un accord avec les Gafa pour qu'ils acceptent que les données qu'ils stockent ne soient pas valorisées et que s'ils les valorisent, ils n'en maîtrisent pas la propriété.

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