Intervention de Marie-Laure Denis

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 3 février 2021 à 11h28
Proposition de loi relative à la sécurité globale — Audition de Mme Marie-Laure deNis présidente de la commission nationale de l'informatique et des libertés cnil

Marie-Laure Denis, présidente de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) :

La CNIL, dans le cadre de son programme annuel de contrôle de 2017, a contrôlé les trois fichiers que vous évoquez : le fichier PASP (prévention des atteintes à la sécurité publique) et le fichier GIPASP (gestion de l'information et prévention des atteintes à la sécurité publique) qui sont gérés respectivement par la police nationale et la gendarmerie nationale pour collecter des informations sur des personnes jugées dangereuses ; et le fichier EASP (enquêtes administratives liées à la sécurité publique), qui est utilisé dans le cadre d'enquêtes administratives avant des recrutements à certains postes sensibles. Nous avons réalisé seize contrôles sur place. Le ministre de l'intérieur a ensuite modifié ses décrets, qui dataient de 2009 et 2011, pour tenir compte de nos observations, car la menace terroriste a évolué depuis une dizaine d'années, de même que les missions des services. Il fallait aussi tenir compte du Règlement général sur la protection des données (RGPD). Nous avons donc demandé que les atteintes à la sûreté de l'État soient explicitement inscrites parmi les finalités, afin que nous puissions dans nos contrôles identifier les données collectées à cette fin. Nous avons aussi insisté pour que les catégories de données collectées soient mieux précisées.

La CNIL avait rendu un avis sur ces décrets en juin. Les principes ont peu évolué dans la mesure où la collecte de ces données existait déjà, de même que les fichiers. Il ne s'agissait pas de collecter les données correspondant à l'ensemble des activités politiques, religieuses ou syndicales de la population, mais uniquement celles des personnes susceptibles de porter atteinte à la sûreté de l'État. En revanche, une évolution sémantique a eu lieu : on est passé d'activités politiques, religieuses, philosophiques et syndicales, à des « opinions politiques », des « convictions philosophiques et religieuses » et « l'appartenance syndicale ». La CNIL n'a pas été consultée sur cette modification sémantique, car les textes ont évolué depuis notre avis. Je rappelle que la CNIL n'autorise pas ou ne refuse pas les textes sur lesquels elle émet un avis ; celui-ci vise à éclairer le pouvoir réglementaire ou le législateur et il appartient au juge administratif de se prononcer sur la légalité des actes réglementaires. En l'espèce, le Conseil d'État s'est prononcé en référé, sans déceler de doutes sérieux sur la légalité du texte, mais il aura très certainement à se prononcer au fond. En tout cas, le collège de la CNIL ne s'est pas prononcé sur l'évolution sémantique.

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